- Edmunds ! hurla Simmons dans la cacophonie ambiante.
-Tu bosses beaucoup avec lui ? demanda doucement Wolf sans parvenir à masquer une pointe de jalousie, ce qui déclencha chez sa collègue un petit rictus.
- Je suis sa baby-sitter, chuchota-t-elle. Ils l'ont transféré du service de la répression des fraudes. Il n'a pas encore vu beaucoup de macchabées, il va falloir que je le console.
Un jeune homme d'à peine vingt-cinq ans fendit tant bien que mal la foule. Il était maigre comme un clou et d'une tenue irréprochable, hormis des cheveux blond vénitien plutôt hirsutes. Un carnet à la main, il souriait à l'inspecteur principal avec une excitation non dissimulée.
- Qu'ont dit les mecs de la scientifique ? l'interrogea Sommons.
Edmunds feuilleta son carnet à la recherche de ses notes.
Pour ce qui me concerne, un Ferrero Rocher suffit largement à mon bonheur.
... elle ne pourrait jamais le comprendre, même si elle le désirait plus que tout. Jusqu'à preuve du contraire, elle croyait encore à la loi et à la justice, tout en acceptant un système récompensant les menteurs et les corrompus, lesquels profitaient de cette culture institutionnelle de l'apathie.
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Ils scrutaient tous la liste au tableau, dans l'espoir insensé que l'inspiration leur vienne et qu'un lien leur saute soudain aux yeux.
Le regard vide Wolf fixait le jardin partiellement ensoleillé qui entourait le vieux bâtiment......... Le fait de se concentrer sur ce paysage serein constituait un effort en soi pour son cerveau fatigué......... il comprenait pourtant le rôle crucial de cet immense jardin. Les patients qui erraient à l'intérieur des parties communes représentaient tout le spectre des troubles mentaux : les suicidaires partageaient leurs repas avec ceux qui avaient commis des crimes de sang, les grands dépressifs accablés par une image dégradée d'eux-mêmes côtoyaient des malades ayant la folie des grandeurs. Une recette idéale pour un désastre annoncé, diluée dans une médication à outrance. Wolf n'y voyait rien d'autre qu'une volonté de contrôler les gens plutôt que de les guérir.
Il était cerné par des dizaines de minuscules flammes huileuses qui se consumaient encore vaillamment, à l'image de ces lanternes japonaises flottantes qui guident les âmes perdues vers le royaume des morts.
C'était l'odeur de la mort, reconnaissable entre mille. Les gens qui travaillent dans ce genre d'environnement, finissent par s'habituer à ce mélange unique de merde, de pisse, de chair putréfiée et d'air vicié.
Aucun ne semblait avoir conscience du monstre qui marchait parmi eux.
Perchée à la pointe du dôme d'Old Bailey, la statue de la Justice ne lui apparaissait plus désormais comme un symbole de puissance et d'intégrité, mais pour ce qu'elle était vraiment : une femme désespérée ayant perdu toutes ses illusions, prête à sauter dans le vide et à s'écraser sur le sol.
Aucun ne semblait avoir conscience du monstre qui marchait parmi eux. Un loup déguisé en agneau.