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Critique de LaBiblidOnee


Sublime, ce roman commence (et termine ?) par un sacrifice, histoire de nous faire comprendre que la montagne que nous nous apprêtons à pénétrer, sur les traces des six fourmis blanches éponymes, n'est pas la montagne des skieurs en goguette qui jettent leur argent par les fenêtres de chalets de luxe, buvant du champagne pour accompagner leur raclette. La montagne que Sandrine Colette va nous conter ici, c'est celle des loups et des superstitions, des disparitions et des mystères, celle des temps ancestraux que les croyances en le diable continuent de propager sur les chemins de randonnée, et même les chemins plus détournés. le mauvais esprit, le sort, le mal que l'on tente de tuer à la racine, mais qui repousse toujours, semé par les murmures du vent et des rumeurs, les on-dits, les « il était une fois ». Et les hommes. Sauf que cette histoire n'est pas un conte, et qu'elle n'a pas l'air de pouvoir bien finir…


Dès les premières pages, la plume habile, belle et confortable de Sandrine Colette nous happe pour ne plus nous lâcher. A chaque chapitre elle alterne la narration de Mathias puis de Lou, et tout s'enchaine avec délice. Mathias est « sorcier » sacrificateur, payé pour « offrir » ou sacrifier des chèvres aux mauvais esprits de la montagne lors des fêtes familiales, afin qu'ils laissent les habitants tranquilles. Lou, quant à elle, fait partie des six randonneurs, les six « fourmis », qui testent une nouvelle piste de montagne pour touristes en Albanie, avec leur guide Vigan. Mais très vite, leur aventure se transforme en épreuve lorsqu'une tempête de neige inattendue éclate, les déviant de leur chemin, mettant leurs forces à mal, leurs vivres à zéro, et leurs chances de survie en péril. Leurs chances s'amenuisent encore lorsqu'ils semblent traqués par le diable en personne. le décompte morbide des fourmis, que l'on pressentait devoir subir depuis le départ, démarre lorsque les deux histoires se percutent de plein fouet dans une avalanche de mésaventures potentiellement mortelles. Glacés, mais bourrés de l'adrénaline des personnages qui coule dans nos propres veines, nous tentons de secouer notre effroi et nos engelures pour que tout le monde s'en sorte. Mais hélas…


Je ne suis pas une groupie. le fait que tout le monde aime une auteure me donne plutôt envie de fuir par crainte que, pour être consensuelle, son oeuvre ne soit banale, ou simplement par peur d'être déçue. Pour ajouter à mon scepticisme, j'avais lu Des Noeuds d'acier à sa sortie, mais j'étais loin d'être subjuguée : je m'étais dit que ce livre ressemblait un premier roman un peu maladroit, bancal, dont la narration m'avait semblé moins naturelle, plus maladroite, ou quelque chose dans l'histoire moins crédible. Mais force est de constater qu'ici je suis entrée dans l'histoire, et au coeur des personnages, dès les tout premiers mots, les tout premiers pas. le rythme et le ton sont d'une justesse implacable. J'ai été Mathias autant que les six fourmis. Je me suis attachée à chaque personnage et j'ai fait mienne chacune de leurs émotions contradictoires. J'ai aimé Mathias jusqu'à ses derniers mots, ses dernières forces et jusque dans ses silences et ses soupirs. J'ai été gelée avec les fourmis, affamée, engourdie, effrayée, j'ai paniqué, mentalement crié, bouffé du flocon à m'en dégouter, et saigné. J'ai été courageuse aussi, j'ai achevé ma lecture lessivée, en jurant de ne jamais plus remettre les pieds en montagne. Mais avec une furieuse envie d'une bonne rasade d'eau-de-vie - de celles qui vous fouettent le sang et vous remettent les idées en place ! Coup de coeur autant pour l'ambiance, les personnages, la construction classique mais redoutablement efficace en l'espèce, et même la plume, plus qu'immersive malgré une grammaire qui m'a agacée au début. J'ai vécu ce livre et je vous le recommande, surtout en cette saison !


« Nous sommes tous partie prenante de cette aventure qui va virer à l'enfer. »
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