Citations sur Le mur des apparences (21)
La colère de Figaro, dans la pièce de Beaumarchais qu'on étudiait en classe de seconde, était la mienne : « Qu'avez-vous fait pour tant de biens ? Vous vous êtes donné la peine de naître, et rien de plus. » Moi aussi j'étais contre les privilèges liés à la naissance, et pas uniquement contre la fortune, cette foutue cuillère en argent destinée aux bébés chanceux, mais contre l'apparence même, contre cette loterie de la génétique qui peut faire de notre vie un paradis ou un enfer.
(p. 12)
Elle associait la phrase de sa grande soeur 'la beauté est une malédiction' à sa disparition subite. Les enfants font ça, ils trouvent des raccourcis dans le monde trop vaste et trop complexe des grands. Comme moi en CMI, quand j'incriminais les fées de pacotille qui s'étaient penchées sur mon berceau. A huit ans, je ne risquais pas de penser génétique et lutte des classes pour tenter d'expliquer ce qu'on vivait, moi et mes parents.
Je ne m'étais pas intéressée à elles, c'était vrai, pas par mépris, ni même par indifférence, mais parce que - et ça je ne le leur avais pas confié - le calvaire quotidien qui était le mien focalisait mon attention. Je vivais roulée en boule en prévision des coups que j'allais recevoir. En plus de mon travail scolaire, c'était une occupation à plein temps. C'était même comme un épais brouillard qui masquait le reste de la vie autour de moi.
Pourquoi en finir avec la vie quand on est Margot? C’était absurde. Ça l’était d’autant plus qu’on avait tenté de me pousser à cette extrémité et que bien que j’eusse les meilleures raisons du monde d’en finir, j’étais bien vivante.
C'était exactement ce qu'avait fait Margot, non pas se révéler, comme je l'avais cru d'abord, mais se décharger. Son carnet était un aide-mémoire, une carte où elle dessinait sa progression, ses objectifs, où elle se délestait du poids de ce qu'elle avait en tête. C'était moins un journal intime qu'un vide-poches, comme on en met dans les entrées. (p.58)
Oui, je dois bien l'avouer, j'ai pleuré Margot. Je ne l'ai pas pleurée parce que je l'aimais. j'ai pleuré de rage parce que, quand on a sa vie, on n'y met pas un terme de la sorte. (p.26)
"Ce ne serait pas par les réseaux sociaux que je trouverais des réponses à mes questions. La solution de l'équation était ailleurs, dans le monde réel, au-delà des apparences."
L'envie, c'était ma partie. Oui, je l'enviais, déjà à l'école primaire. Mais cette envie, loin de me rendre hargneuse, me faisait baisser la tête. Elle avait tout, je n'avais rien. Prisonnière de cette vérité-là, je ne voyais pas ce que j'avais, et qu'elle n'avait pas. Et je m'en suis voulu. (p112)
Nous n'étions que des courtisans et notre monarque absolu avait nom Apparence. (p.119)
Est-ce que ce n'était pas ça, l'amitié ? Un bijou, une attention, et le coeur qui battait à l'idée de faire plaisir à celles dont l'existence me faisait plaisir. (p.98)