Citations sur Une enquête de Viktor Kurt : Internés (35)
Assis sur le bord de sa baignoire, Viktor se déshabilla. Il avait déposé avec précaution sa veste et son pantalon de costume sur la chaise de la salle de bains et d’un geste lent, il commença à déboutonner son gilet. Avec plus de lenteur, il ouvrit sa chemise blanche. Il savait que ces dernières secondes prises au temps ne faisaient que reculer la douleur qui l’attendait. Puis, nu, il se redressa et se plaça face au mur de miroirs incrustés de leds. Il leva les yeux et sans vouloir regarder son visage, qui s’émaciait au fil des années, il contempla l’œuvre qu’il avait créée sur son corps. Son torse était recouvert de vingt-sept scarifications.
— Je ne suis pas flic. Je n’ai pas à vous refuser ou autoriser quoi que ce soit. Vous faites ce que vous voulez, monsieur Mitchell
Abigaël a oublié de me prévenir qu’en plus d’être un petit obèse, c’est un petit con, pensa Viktor en regardant l’adjoint Van Blot partir d’un pas lourdaud vers la sortie du cimetière. Il se demanda comment un abruti qu’il n’avait jamais croisé auparavant s’était permis de faire allusion à son passé devant le jeune homme qui avait découvert le corps.
Même après trois ans de collaboration avec lui en Belgique, Abigaël ne s’habituait toujours pas au manque de sensibilité de Viktor. Elle savait que son ami avait réussi au fil des années à se conditionner pour maîtriser ses émotions et pour ne pas être dépendant de ses sentiments, mais malgré cela, elle se demandait comment il arrivait à garder ce détachement devant les victimes, souvent mutilées, qu’il examinait toujours avec beaucoup d’attention
— Vous avez vu ses poignets ? interrogea celui-ci.
Les poignets du jeune homme étaient cachés par le bas des manches de son blouson en jean, mais celle de droite était légèrement retroussée et Viktor y avait aperçu une marque. Sans attendre la réponse à sa question, il remonta les manches de la veste et vit que les poignets présentaient des traces qui indiquaient que l’adolescent avait été ligoté. Le tueur avait attaché Alexander avec une telle force que ses poignets présentaient, eux aussi, des hématomes d’environ sept centimètres de large.
— Nous n’avions pas encore vu cela, dit Fabien, mécontent que Viktor ait remarqué cet élément avant lui.
Impassible face au corps inerte, l’enquêteur confirma que Fabien pouvait maintenant se mettre au travail.
— Rien d’autre sur lui ? Le tueur voulait donc que nous sachions qui était sa victime. Reste à savoir pourquoi et pourquoi le corps a été déposé dans ce cimetière, dit Viktor sans détourner les yeux du cadavre, sur lequel les flocons de neige continuaient à se poser avec une légèreté qui contrastait avec l’horreur de la scène.
— Commissaire, je peux commencer mon travail, maintenant que monsieur Kurt a vu ce qu’il y avait à voir ? demanda le docteur Tremblay sans amabilité.
— Viktor ? OK pour toi ?
— Vous avez vu ses poignets ? interrogea celui-ci
Viktor ne dit rien et desserra la ceinture en cuir enroulée autour du cou de l’adolescent. Les traces d’hématomes visibles sous la ceinture ne laissaient aucun doute : la victime avait été étranglée. Mais il fallait attendre l’autopsie pour être certain que cette strangulation était bien la cause de la mort. Enfin, Viktor remarqua que les jambes étaient recouvertes d’un manteau neigeux d’au moins trois centimètres alors que le haut du corps était apparent.
Toujours accroupi, Viktor continua son analyse.
— Le meurtrier a soigné sa mise en scène. Il voulait que nous puissions voir ce qu’il avait fait. Il a travaillé en deux temps. Il a d’abord déposé le corps ici, puis est revenu pour dégager la neige qui avait recouvert la partie supérieure. Il a pris des risques en revenant. Vous savez qui est ce gamin ?
— Nous avons trouvé une carte d’identité. La photo correspond au visage de ce gosse. Il s’appelait Alexander Jacobs et n’avait que dix-sept ans, indiqua Abigaël, émue par le jeune âge de la victime.
— Tu as un premier avis, s’inquiéta Abigaël ?
— Le crime n’a pas été commis ici. Le corps et les vêtements de la victime n’ont pas de traces de sang et je suppose que le docteur Tremblay n’en a pas trouvé ailleurs.
— Exact, confirma Fabien
Viktor ne dit rien et desserra la ceinture en cuir enroulée autour du cou de l’adolescent. Les traces d’hématomes visibles sous la ceinture ne laissaient aucun doute : la victime avait été étranglée. Mais il fallait attendre l’autopsie pour être certain que cette strangulation était bien la cause de la mort. Enfin, Viktor remarqua que les jambes étaient recouvertes d’un manteau neigeux d’au moins trois centimètres alors que le haut du corps était apparent.
Abigaël soupira.
— Bordel, nous sommes encore tombés sur un sacré taré!