Cathy avait suivi le chemin habituel qui mène au trottoir : bien faite, des parents paresseux, des professeurs qui s’ennuient, des écoles ternes, aucune formation, et beaucoup de bons moments. À quinze ans, elle y était déjà, et neuf ans plus tard elle en avait gardé des traces évidentes. Cathy avait tout vu et touché à tout. La vie, dans ce qu’elle a de plus cru, et la mort l’avaient poussée et entraînée dans tous les sens. Elle s’était défendue avec son tempérament plutôt facile et son cœur généreux, et pas grand-chose d’autre. Elle m’avait dit un jour qu’elle n’avait jamais lu un livre et qu’elle avait regardé la télé soixante-douze heures de suite après avoir pris de la drogue. Son maquereau – je ne savais pas qu’il était maquereau à l’époque – m’avait employé pour le protéger d’un autre maquereau. Ça avait fini par faire du vilain et je m’étais retrouvé à protéger Cathy.
C’est toute la vie du détective privé, le plus souvent la piste vous ramène à votre point de départ, et ça, c’est quand il y a une piste.
Les enfants qui font des fugues retournent généralement vers quelque chose… un souvenir, quelque chose comme ça.
Il y avait chez elle quelque chose de peu naturel, un curieux mélange : sa vivacité excessive et superficielle dissimulait un fond d’indolence. Elle parlait d’une voix monocorde, qui n’exprimait aucune émotion, comme si un certain nombre de ses sentiments avaient été niés ou détournés. Elle m’apparut à la fois très vaniteuse et très inquiète, ce qui ne fait pas un bon cocktail.
Rien de plus facile que d’ouvrir un classeur, et une personne à l’esprit systématique m’avait rendu la tâche plus aisée encore. Le premier tiroir contenait un dossier portant la mention SWAN. Je m’installai au bureau pour le lire. L’histoire qu’il racontait était claire même si elle n’était pas très jolie.
Une chose était certaine, avec une femme comme ça pour lui tenir compagnie, il n’avait pas décidé tout seul de faire le grand plongeon.
C’était un plaisir que de la regarder réfléchir. Elle avait bu deux tiers de son verre, mais la glace avait fondu et elle s’en était lassée. Je suis un peu comme ça moi aussi, avec les gin tonics, alors j’ai tendance à les vider d’un coup. Elle ne fumait pas et n’agitait pas ses mains nerveusement. Elle était là, immobile, à se concentrer et on pouvait presque sentir la puissance de sa concentration.
On ne tue plus les gens parce qu’ils ont commis un meurtre.