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Critique de ODP31


ODP31
11 novembre 2021
L'épreuve du feu.
Inconnu à mon bataillon, le Stephen Crane. Dégradé l'ODP car, côté States, cet écrivain n'avait rien du soldat inconnu de la littérature à son époque. Il a été poète, correspondant de guerre, romancier, journaliste et novelliste. Un cumulard de la plume. Une production dense mais éphémère, car il est mort à l'âge de 28 ans. Encore un auteur du 19ème mort de la tuberculose. Tousser ou écrire, il ne faut pas choisir.
C'est la sortie du livre hommage que Paul Auster vient de lui consacrer (« Burning boy ») qui m'a mis sur sa piste. J'ai aussitôt déserté mes autres lectures pour monter en première ligne de la guerre de Sécession.
Le jeune Henry Fleming, 16 ou 17 ans, vit seul avec sa mère dans un trou perdu et rêve de gloire, de conquêtes et d'héroïsme. de jolies filles aussi. Ou surtout. Un ado. Il s'engage avec fougue, revêt le bel uniforme nordiste et part chasser le rebelle sudiste, le menton haut et le torse bombé. Mais la guerre n'est pas qu'une aventure.
A l'aube de sa première bataille, Henry, face à la perspective de la mort, s'interroge sur sa capacité à provoquer son destin, à dépasser ses peurs. Courage fuyons. Après un premier épisode peu glorieux, le jeune soldat se perd entre les lignes, stagne dans les forets, champs et routes qui bordent les combats. Il se fait blesser et cette première goutte de sang donne cette magnifique traduction au titre du roman : l'insigne rouge du courage. Dès lors, dépucelé côté cicatrice, débarrassé de la honte, il va se lancer à corps perdu dans la mêlée sanglante.
L'auteur est né après la fin de cette guerre mais il a interrogé beaucoup d'anciens combattants et il restitue de façon extraordinaire les tourments des soldats face au feu de l'ennemi et la camaraderie au sein d'un régiment.
Le roman ne s'intéresse pas aux origines de cette guerre civile, à l'histoire, à l'abolition de l'esclavage ou à la stratégie militaire. Il ne choisit pas son camps. Dans la boue et la poussierre, les uniformes sont de la même couleur. Les ennemis parlent la même langue.
Schwarzie et Stallone n'auraient eu aucune chance d'endosser le rôle d'Henry si une adpatation ciné avaient vu le jour. Ce n'est ni Rambo à Gettysburg, ni Terminator à Chickamauga.
Ce livre touche l'universel car il s'intéresse seulement, et c'est déjà beaucoup, à la conscience et au courage d'un jeune homme, chair à canon en puissance. Il ne stigmatise pas les fuyards, ne juge pas les frileux, n'encense pas les plus valeureux. Coup de clairon sur l'humain.
Je ne peux qu'hisser le drapeau blanc devant une telle acuité d'observation, signer une forme d'armistice face à cette prose si épurée.
Hemingway n'avait pas tort quand il disait qu'il s'agissait de l'un des meilleurs romans de la littérature américaine.
Repos, soldat.
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