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Critique de sandrine57


Dans un petit village du Cotentin, Marie fille de ferme taiseuse et simplette, élève seule son petit Eric, fruit d'une étreinte champêtre avec un soldat pendant la guerre. Non loin de là, dans une maisonnette plus confortable que sa simple masure, se terre Solange qui elle aussi élève seule son fils Julien. Retirée à la campagne, Solange rumine feu son amour pour Simon, un avocat tombé amoureux d'elle en regardant une photo que lui montrait sa soeur Michelle, une compagne de résistance. Elle reçoit peu, se laisse aller. Ses parents et ses beaux-parents tentent le dimanche de la sortir de sa léthargie et Marianne, son amie d'enfance passe de temps en temps, assagie depuis que son père est mourant, elle qui passait son temps à multiplier les frasques pour le défier. Dans la ville proche, leurs parents, notables bon teint, s'arrangent avec une vie plus conforme aux apparences qu'à leurs espérances. Lucile, la mère de Marianne, se fane dans un mariage malheureux pendant que son mari, condamné, n'a jamais oublié son amour pour Hélène, l'épouse du procureur, libre, libérée, jouisseuse assumée.


Les destins croisés de provinciaux issus de toutes les couches sociales, de l'avocat à la fille de ferme, du médecin à la libraire. Tous ont en commun de vivre dans une société corsetée par les convenances où les sentiments ont peu de place, on se fréquente et on se marie entre gens du même monde. L'amour existe bien sûr mais ceux qui se laissent guidés par lui s'exposent aux pires déconvenues, parce qu'il ne dure qu'un temps et laisse alors la place à l'amertume et à la frustration. En ces années d'après-guerre, la femme occupe encore une place secondaire. A la campagne, elle travaille bien sûr, mais en ville, dans la bourgeoisie bien installée, elle se morfond dans sa maison trop grande où elle ne sait que faire puisque les domestiques veillent à tout. Si les plus jeunes font des études, ce n'est que pour occuper une position subalterne, en attendant le bon parti qui fera d'elles des épouses accomplies. Celles qui sortent du carcan imposé sont montrées du doigt, détestées de leurs semblables.
Chroniques douces-amères et surannées d'un monde qui n'est plus, ce Mai en automne est une fresque sociale écrite de main de maître par une Chantal CREUSOT inspirée par les auteurs du passé. Psychologie des personnages finement analysée, désirs, déceptions, colères, frustrations disséquées presque cliniquement, peu d'action mais une pelote de destins, qui connaissent leur lot de drames, de passions, qui se déroule sur trois générations et laisse un goût amer pour ces êtres ballottés par leurs contradictions et leurs lâchetés. Un très grand roman.
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