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3.43/5 (sur 121 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1947
Mort(e) : 2009
Biographie :

Clinicienne des passions humaines, lectrice compulsive et éclairée, Chantal Creusot se penche sur les mystères de l’état amoureux et de ses revers. Saisissant et nostalgique, proche de l'univers balzacien et du désenchantement flaubertien, Mai en automne renfloue tout un monde oublié qui se remet à vivre et palpiter. Cet unique roman, écrit dans la prémonition de ses dernières années, est le livre d'une vie, l’inoubliable testament romanesque d’une femme du vingtième siècle.
"Mai en Automne" est publié aux Editions Zulma.

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Citations et extraits (33) Voir plus Ajouter une citation
Au début de années cinquante, sur les côtes du Cotentin, vivaient à la lisière d'un bois, dans une sombre maison délabrée, une femme et son enfant. Jamais personne ne leur rendait visite. La mère, jeune et déjà fanée, se déplaçait, vaquait à ses tâches avec lenteur et, quelle que fut son occupation, semblait toujours rôder au lieu d'imprimer à sa démarche la sobriété des gestes utiles. Son épaisse chevelure à l'abandon, qui autrefois donnait de l'éclat à un visage trop neutre à force de délicatesse, n'accusait plus que des traits émaciés. On ne l'avait jamais vu s'inquiéter de quiconque, s'attarder à une conversation, et ce détachement, ajouté à la négligence de son allure, suscitait de longue date la méfiance des villageois.
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Depuis, elle se dépensait sans compter dans l'art de faire l'amour, ce qui, paraît-il, retiendrait les hommes. Une technicienne n'étant pas forcément une magicienne, elle n'en retenait aucun.
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Devenue adulte, Hélène ne conservait de son enfance et de son adolescence que des impressions indifférenciées, une abstraction remplie d'actes à accomplir qui devaient inévitablement la préparer à cette métamorphose que représentait l'état de grande personne. Lorsque son père lui présenta le procureur, elle n'avait ressenti aucune révolte, juste un imperceptible mouvement de recul. L'intuition et quelques lectures illicites l'avaient initiée aux réalités amoureuses mais il ne lui vint pas à l'idée qu'elle pouvait les appliquer à ce fiancé sévère, embarrassé quand il s'agissait de savoir s'il devait marcher devant ou derrière elle. Son instinct lui disait qu'elle serait gagnante. Sa nuit de noces fut décisive. Sous le coup de la frayeur, voyant son mari battre en retraite, elle sut qu'elle ne redouterait jamais plus personne. Elle ne songea pas être mal tombée ou qu'il manquait de confiance, elle venait seulement de découvrir l'art imparable de l'intimidation.
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Le fourgon funéraire déboucha sans tarder à l'angle de la ferme. Deux hommes à la mine composée en sortirent. Après un bref échange, la fermière les dirigea vers la chambre mortuaire où Camille avait veillé toute la nuit. Assoupi sur une chaise, il sursauta à leur entrée. La fermière avait revêtu Marie de la robe blanche, lavée et repassée, qu'elle portait le jour de sa mort. Elle avait natté et coiffé en couronne sa chevelure. Paupières closes, les mains jointes sur sa poitrine, elle semblait retenir contre son cœur un ultime secret. Camille, le visage crispé par des sanglots contenus, la contempla une dernière fois avant de quitter la pièce. Sur un signe, les deux employés procédèrent à la mise en bière. Il soulevèrent avec des gestes précautionneux le corps dont les bras retombèrent à demi. Alors, la fermière remarqua un anneau d'or à l'annulaire de sa main gauche. Camille n'avait pu résister à la tentation de ces fiançailles d'outre-tombe. Elle ne ressentait rien à ce moment. L'intensité de son chagrin paralysait ses émotions. Elle vérifia que la tête reposait bien sur le coussin, lissa l'étoffe de sa robe, lui prit la main et la baisa. Les deux hommes laissèrent passer quelques secondes puis recouvrirent la dépouille du linceul. La fermière sortit précipitamment pour ne pas voir Marie disparaitre à jamais.
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Écrire reste pour moi ce qu'il y a de plus efficace contre cet opiniâtre processus de désintégration qu'est la vie. Le soir, je ramasse les morceaux de l'existence et les recolle en noircissant du papier.
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Le plaisir, cette exigence de nourrisson, je l'avais toujours tenu à distance et je crois que, dans mes colères, j'ai du cracher dans mon berceau. Je me méfiais de la langueur qui nous escamote pour nous livrer sans défense aux éléments. Elle ne pourra jamais être autre chose qu'un acompte. Contre cette balayure d'étoiles que sont les plaisirs sensuels, j'aurais voulu porter le soleil en moi. A quoi celui-ci ressemble, je ne le saurai jamais, j'ai perdu la foi. Je ne ferai plus l'amour, d'ailleurs je ne le faisais pas : je couvais une idée.
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Voilà, pensa-t-il, non sans amertume, ce qu'il y a de terrible avec nous autres, c'est que même la tragédie n'est pas une valeur sûre.
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(Marianne)
...Bref répit pour son entourage, elle fut quelques années une enfant très sage chez qui la colère avait laissé place à la mélancolie, mais sa pugnacité endormie ne faisait qu’attendre pour se ranimer les temps propices de l’adolescence.
Un matin, après une nuit à se retourner dans son lit entre deux sommeils précaires, elle se réveilla humide.Du sang déjà caillé souillait ses draps, sa chemise . A l’affolement consterné succéda sa curiosité inquiète. Sa méfiance agressive en éveil, elle appela sa mère qui, embarrassée, lui murmura des paroles rassurantes :
- Ce n'est rien de grave, tu n’es pas malade, ne t’inquiète pas, cela se reproduira chaque mois, c’est signe que tu es désormais une jeune fille, je vais te donner une serviette pour te protéger.
Elle quitta la pièce et revint quelques minutes plus tard munie d'une garniture qu'elle tendit à sa fille.
-Tiens, maintenant prépare-toi pour le lycée, je vais nettoyer le lit.

Marianne, pétrifiée, finit par interroger sa mère qui la considérait avec gêne :
-Que veux-tu dire avec cette histoire de sang et de jeune fille ?
-Cela signifie que les femmes pour avoir des enfants sont obligées d’en passer par là.(...)
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Peu de mois après son mariage, Simon n'était plus amoureux. Ce fut comme une disparition. Une évidence perdue. Et il sut que plus jamais il ne retrouverait l'espoir qui le portait vers Solange. Le château de sable, l'univers enchanté s'effondrèrent, le laissant abasourdi. L'heure où l'on cesse d'être épris avait surgi, l'instant dérobé qui se joue dans le secret des consciences : il est franchi et rien ne sera plus comme auparavant. Tout le monde ne réagit pas de même, certains glissent d'un état à l'autre, semi inconscients, beaucoup se résignent. Quelques-uns ne sont pas fâchés de voir s'éloigner cet hôte intimidant, ils respirent à nouveau, de reour en famille, dans la sécurité du solide compagnonnage. Certains encore ne peuvent vivre hors du cercle magique sans s'étioler, aussi repartent-ils en quête d'une nouvelle passion.
De même que Simon avait été foudroyé par l'évidence en contemplant sur la plage la photographie de Solange, de même fut-il frappé par la vérité du désenchantement. L'image de la jeune femme tomba en poussière. La prétendue lenteur de l'agonie des sentiments n'est souvent qu'un aveu tardif d'une mort déjà accomplie.
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C'est à ce moment qu'il l'avait rencontrée. Les premiers mois, sa futilité l'avait ravi, tant elle acquiesçait à son rêve d'une féminité qui échappât aux disgrâces de l'humanité. Sa mère dont le front se plissait et les mains noueuses s'agitaient à la moindre explication, l'avait détourné des raisonneuses.
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