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Critique de Fleitour


Catherine Cusset, penchée sur l'Autre qu'on Adorait, nous guide vers une bien sombre destinée.
Comment peut-on se détruire avec une tel acharnement, flamber pour retomber en poussières, aimer pour finalement haïr?
Voici la question que le lecteur se posera sans doute.
Je me sens à des années-lumière de Thomas Bulot, comme bien d'autres, je n'avais pas grand chose à vingt ans, il avait tout, l'Autre qu'on Adorait.

Celui qui avait cette capacité de séduire les intelligences les plus vives et les plus jeunes , avait aussi cette aura pour élire celle qui émergeait parmi les plus belles, cet homme aux capacités intellectuelles si denses, casse, détruit, harcèle, boit plus que de raison, fume plus que de besoins.

Je ne peux me résoudre à partager les impressions de Cathrine Cusset à la grande Libraire quand elle a parlé de hauts très hauts et des bas très bas.
J'ai bien vu les bas mais pas les hauts.

Ce sentiment d'abandon et de solitude morale c'est Thomas qui progressivement le bâtit à travers ses renoncements et sa quête épuisante d'une nouvelle beauté qui viendrait habiller ses nuits.

De tous les mots de Léo Ferré, Catherine Cusset nous attache à un mirage, sans voir que les mots qui suivent font mouche, car
“ Entre les mots, entre les lignes et sous le fard,
D'un serment maquillé qui s'en va faire sa nuit
Avec le temps tout s'évanouit...”

Je suis encore et encore à la recherche d'un homme à l'activité exubérante. Pourquoi entretenir ce mythe d'un géant universitaire tombé seulement à cause de sa maladie. N'a t-il pas présumé de ses forces, ou poursuivi un projet démesuré avec l'oeuvre monumentale de Proust

Lisant l'attrape coeur de Salinger, je suis séduit par le vagabondage du jeune étudiant, il est sévère à l'égard de l'Université, chez Thomas il manque ce regard critique qui lui aurait permis de comprendre qu'il n'était pas fabriqué pour vivre dans ce monde là.

Les lectures choisies sont étranges comme le Livre Brisé, où l'alcoolisme a brisé et tué l'épouse de Doubrovsky.
Proust ajoute encore plus clairement, une chose qui tombe en ruine... c'est le Chagrin.

L'implacable descente aux enfers est bien là, c'est le résumé de l'éditeur, le roman de Catherine Cusset s'attache à donner la plus belle image universitaire possible de Thomas entre l'image et la réalité “tu as et le tu es”, c'est un constat de douloureux gâchis universitaire.


Je ressent à la fin comme un goût amer, à ne pas dire, avec un titre plus simple que tous les fils de la vie se casseraient un à un, un doute plane. L'Autre qu'on adorait, quel est-il ? Celui qui a vingt ans ou celui qui se suicide à trente neuf ans

Le Livre affirme par les « tu es ou tu as », je doute de ces vérités sans nuances. Les dégâts de l'alcool sont de plus en plus irréparables, et pas un de ses amis pour exprimer cette chute, la dite maladie est une plongée de plus, sur un tel terrain de dépendance à l'alcool.

Ce récit est cruel, les mots de la grand mère de Proust, dans « du Côté de Guermantes » exprime la mort déjà latente depuis longtemps, au moment de la rencontre tragique avec Nora, « Ce n'est pas d'aujourd'hui que tu sais que tu vas mourir. Tu le sais depuis toutes ces années où la mort est venue habiter chez toi », cette référence est glaçante ici pour Nora, cruelle pour Thomas, gratuitement cruelle.

C'est un portrait sans concessions, dans le cadre d'une vraie fiction, j'aurais trouvé cette destinée puissante, conduit avec brio avec des mots d'une noirceur sans failles.

S'agissant de la vie d'un ami, je suis saisi d'un malaise, peut-on dresser sa vie d'une façon si cruelle , si noire.
J'aurais aimé alors une plus grande émotion exprimée par l'auteur, un regret de ne pas avoir su trouver les mots avant qu'il ne plonge.
J'ai du mal à partager l'avis de Nathalie Crom, de Télérama sur sa dignité retrouvée, le respect oui, mais pas ce respect inconditionnel qu'il méritait peut être, comment alors parler de la dignité retrouvée d'un ami ?

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