Conçu un peu comme une pièce de théâtre, ce court roman comporte finalement assez peu d'éléments Fantasy mais suffisamment semble-t-il pour que l'éditeur le range dans cette catégorie et en fasse la promotion auprès de ce public.
Dommage sans doute car le livre aurait toutes les chances de séduire un public de littérature plus générale alors qu'il pourrait décevoir celui qui rechercherait un total dépaysement, voir un récit Uchronique qu'il n'est pas.
Prenant donc pour cadre Marseille bien encré dans notre réalité historique, nous suivons la destinée de quatre personnages une poignée d'heures seulement avant que le roi Henri IV ne débarque avec ses troupes et remette ainsi de l'ordre dans la cité qui sous le consulat de Charles de Casaulx se sera épris à rêver d'indépendance...
Le rideau se lève donc et met en scène nos compagnons d'infortune chacun tour à tour, tout commence dès à présent entre les murs de l'auberge "la roue de Fortune". La première partie du roman est plutôt sympathique avec des courts chapitres et un effet domino pour passer à chaque fois le témoin à un nouvel interlocuteur. Écrit à la première personne, la narration se veut extrêmement fluide et plaisante à lire.
Entre l'ancienne mercenaire aujourd'hui reconvertie tenancière mais qui n'a toujours pas fait le deuil de son ancienne vie, le vieux chevalier complètement fatigué alors que son passé devient de plus en difficile à porter, la vieille femme qui dirige la guilde des assassins tout en nourrissant en secret des sentiments envers le vieux chevalier, et deux mages en cavale "Artbonnier", condamné à fuir car épris l'un envers l'autre d'un amour interdit.
Je ne sais pas si c'est délibéré ou bien une coïncidence, on retrouve un peu de
Robin Hobb dans le roman de Jean-Laurent del Socorro, l'usage de nom de type ""Victoire" "Patience" rappelle incontestablement certaines figures de l'assassin Royal, l'usage de l'Arbon (Artbonnier/Artiseur) peut également être comparé à celui de l'Art avec les mêmes conséquences physique liés leurs usages...
Pour en revenir au roman, cette première partie est bien agréable, le changement de point de vue est toujours bien pensé et bien amené à chaque fois et l'on prend plaisir à suivre les personnages tout en redécouvrant Marseille au 16e siècle, en pleine guerre de religion.
Silas, maitre assassin de la guilde intervient dans ce que l'on peut considérer comme des intermèdes entre chaque partie, chacun des chapitres qui le met en scène est savoureux et je confirme qu'il a incontestablement un faux air de Benvenuto Gesufal de "Gagner la Guerre".
Avec le recul de plusieurs semaines de lecture, Silas est incontestablement le personnage le plus marquant du roman, le passage de l'interrogatoire et ce véritable dialogue de sourds qui en découle avec tout le cynisme de la situation, est un moment vraiment très réussi et très percutant.
Si la première partie nous amène tout doucement mais irrémédiablement vers l'échéance du roman et épilogue qui ne sera sans doute pas un happy end, la seconde est une suite de chapitres reprenant les évènements clefs de la vie de chacun des quatre personnages principaux. L'ordre des chapitres et des intervenants respecte une chronologie temporelle avec à chaque fois une mise en lumière des ombres du passé de chacun. Incontestablement les séquences des deux anciens Victoire et de Gabriel sont les plus intéressantes à suivre, les autres ne semblant qu'être là pour faire du gras.
C'est donc finalement la partie que j'ai le moins appréciée et qui aura presque failli à me faire sortir du livre, c'est aussi celle que j'ai trouvé la moins aboutie avec une construction un peu artificielle et des passages assez inégaux. Alors que la première partie avait une belle construction et une bonne dynamique, il y a une sorte de cassure, le passé des personnages est certes intéressant, attachant même parfois, mais au final cela ressemble à une grosse disgression étirant le récit plus que nécessaire.
La dernière partie du roman reprend le schéma initial pour le mieux et livre un final satisfaisant, peut être un peu trop intimiste pour moi et certainement pas assez épique selon mes critères personnels.
Une nouvelle qui clos le livre et met en scène Gabin, un personnage mineur de "
Royaume de vent et de colères", s'avère parfaitement forte en matière de charge émotionnelle, Silas s'invite dans cette histoire et confirme que son seul charisme pourrait facilement animer à lui seul un bien bon roman. Sait on jamais, Janua Vera avait bien lancé en son temps Gesufal Benvenuto avant qu'il soit propulsé tête d'affiche dans gagner la Guerre...
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