« Ce n’est pas sans raison que l’on court au milieu des épines ! Si tu ne chasses pas le serpent, c’est donc le serpent qui te chasse ! »
Tu t’endors, avec une âme d’ange. Tu te réveilles assassin ! À cause de la graine, enfin, tous ces trucs qu’il venait de me chuchoter comme le diable crache sa lave au creux de ton oreille…
Moi, je voulais m’en aller. Sur-le-champ. Devenir un moucheron en train de filer par le grillage de la fenêtre. Gagner honnêtement l’argent des chameaux et marier Yasmine. Et merde à la mauvaise graine !
« Ces hauts fonctionnaires sont les pires bandits de la terre ! . Nous ne sommes que des amateurs ouilla-ouilla en comparaison ! Une main par-ci, dix doigts par-là, pour joindre les deux bouts… De la bricole ! Et c’est nous qu’on persécute ! »
Il s’aimait beaucoup aussi. Il adorait caresser ses fines lèvres sévères, ses joues creuses et ridées comme du vieux bois, son front bombé, dégarni. Derrière une trompeuse indifférence, il cultivait la patience proverbiale du crocodile qui feint l’arbre mort au milieu du fleuve pour mieux te croquer.
Cet avare, capable de presser les pierres pour en tirer le jus, me nourrit grâce aux mannes du Seigneur qui s’abattent sur le désert : sauterelles à la braise, bouillies, grillées, en poudre…