L'épouvantable encyclopédie des fantômes

C'était une très, très, très méchante et hideuse petite voix. Une de ces petites voix qui ressemblait à ces genres de bruits de fer rouillé qui gratte un fond d'écuelle en vous râpant les os, en déchaussant les dents.

C'est là, dans l'amoncellement des collines, que l'empire des morts et le domaine secret des fées se mêlent et s'entremêle aux quenouilles des mémoires conteuses, à la trame dénouée des légendes.

Je les devine figés sous le cadran de l'horloge, perchés en haut de l'armoire, voletant autour du lustre, certains aussi vaporeux qu'une lanugineuse buée de lune, aussi peu palpables qu'un froissement d'herbes mouillés, qu'un cri perdu au loin; ou bien tout en os et en habits moisis, lorgnons sur regard cave, longue défunte livide et désséchée revêtue, pour ces noces tragiques, d'une robe de mariée dentelée par les souris, brodée de toiles d'araignées. Formes vagues que le moindre souffle disperse et éparpille et qu'un autre ramène, puis rafistole en rassemblant au hasard.

Le temps se fait si sombre, le ciel est si bas, le jour est si court que les ténèbres recouvrent et abolissent les frontières qui séparent le monde des vivants et des morts..

Le vent de novembre éparpille les fantômes sur le chemins. Décembre les réunit autour du foyer. Mai les entraîne en ronde aux fêtes des fées.

Les morts ne font pas rire

Les frontières se sont plus et le temps se disperse... Feu follet et coquelicot... se confondent au miroir de l'onde. Il est temps de rejoindre le sommeil des fantômes.

Combien de Petit Poucet, trahis et abandonnées dans les forêts des contes ou dans les remblais des sordides banlieues, ont usé leur âme en errant sans fin sur les chemins perdus

Dans les combles de l'au delà, voyez vous, quand les ombres s'abandonnent, les douze coups de minuit enfantent les chimères..

Minuit clavecine ses douze notes argentines sur la pendulette de la cheminée, en même temps qu’un murmure. L’heure des fantômes…