Entrevoir l’Éden vous change à jamais, car on pénètre le monde de la nostalgie : ce qu’on appelle l’âge adulte.
Qui aurait cru que cette masure en torchis se trouvait en plein Paris, dans l'annexe du Jardin des Plantes, de l'autre côté de la rue Buffon ? Quatre murs branlants, un toit de zinc, une cheminée partiellement éboulée, le tout au fond d'une cuvette, au pied d'un immeuble en brique de style industriel, qui abritait les labos d'ornithologie. Et puis cette forêt d'orties, enrobant la cabane pour la protéger des regards indiscrets.
Les animaux ont cela de supérieur qu'ils fonctionnent en clan, quand la famille est une perversion spécifiquement humaine.
Pas facile de mener mon enquête. Je ne suis ni flic ni détective. Il me faut donc trouver des moyens détournés pour aborder les parents des enfants kidnappés.
Ça porte un nom : le syndrome de Stendhal ; trop de beauté tue !
Vint le tour des animaux. Le Jardin des Plantes offrait un spectacle d’apocalypse. Si les bêtes de la ménagerie avaient toutes péri, victimes des gardiens qui avaient fui sans les libérer de leurs cages, on assista à d’étranges résurrections.
Trois semaines après le début de la crue, un commando de gendarmes plongeurs passa en Zodiac rue Buffon. Ils y virent le plus effrayant des spectacles : posés sur leurs socles de bois, les animaux empaillés de la grande galerie de l’Évolution flottaient dans le Jardin des Plantes, comme s’ils marchaient sur l’eau. L’enceinte ayant été submergée, certaines bêtes allaient désormais au hasard des rues, tels les rescapés d’un naufrage.
Les gendarmes comprirent alors avec horreur que tous ces fauves avaient les yeux tournés vers eux…
N’étaient leurs pattes clouées sur les planches vernies, ils étaient vivants ! À l’angle de la rue Geoffroy-Saint-Hilaire, un lynx gronda en voyant s’avancer le bateau. Plus loin, sur le toit d’un immeuble de la rue Poliveau, deux tigres prenaient le soleil, se frottant le dos à une cheminée.
— Regardez, frémit alors un des gendarmes en pointant les félins. Ils se sont détachés de leur socle…
— Et ils n’ont pas peur de l’eau ! ajouta-t-il, en voyant les tigres plonger.
Lorsque les dents des tigres percèrent le caoutchouc du Zodiac, le bateau vacilla. Avant de mourir, tous eurent une dernière vision : sous l’eau, boulevard Saint-Marcel, une carcasse de baleine nageait placidement, escortée par le squelette d’un tyrannosaure… »
"on ne peut pas rester prisonnier de son enfance, sylvain". d
Dit -elle avec une profonde tendresse
Au moins, j'ai les pieds sur terre ! Toi, tu es un poète. Tu ne te bas pas avec une administration, le bon vouloir des ministères, des subventions... et puis le public.
Si on ne trouve pas les vrais coupables, il va falloir un bouc émissaire. Une foule reste une foule : haineuse, simpliste, radicale.
La rancune avait peu de prise. Elle le frappait par intermittence sans jamais qu'il s'y enlise.