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Critique de CDemassieux


Frédéric Moreau est-il un héros ou un antihéros ?
La question mérite d'être posée car voilà un personnage qui n'agit pas, passant à côté des événements de son temps, de son amour, idéalisé pourtant à la manière romantique et anachronique, pour une femme plus âgée que lui. Mais Frédéric n'est pas Julien Sorel ; l'époque n'est plus la même ; les destins ne se ressembleront pas. Ce n'est plus le temps de l'exaltation.
Flaubert déclarait qu'il voulait, avec ce roman, faire l'histoire morale de sa génération ainsi qu'un « livre d'amour, de passion ; mais de passion telle qu'elle peut exister maintenant, c'est-à-dire inactive. » (Lettre du 6 octobre 1864)
Et, de fait, Frédéric est inactif, allant jusqu'à éconduire, affectueusement certes, Madame Arnoux lorsque celle-ci s'offre enfin à lui, dans un épisode à la grâce portée à la perfection, et qui sera leur dernière rencontre.
Appuyé par l'épisode de la révolution de 1848, pleine d'espoirs politiques avortés dans le sang au bout de quelques mois, L'Education sentimentale m'a toujours semblé un roman de la désillusion, plus encore que Madame Bovary, qui demeurait dans la sphère strictement intime et provinciale. Ainsi de la parenthèse enchantée de Fontainebleau, qui n'empêchera cependant pas le retour sanglant à la réalité : les Journées insurrectionnelles de Juin. Comme si l'évasion n'était plus qu'un rêve sans lendemain. Les exaltations sont éphémères.
Mais ce réalisme, renforcé par une distanciation entre l'auteur et son sujet, en fait l'un des romans majeurs de notre littérature, d'une incroyable modernité.
A propos de ce réalisme, Zola ne s'y est pas trompé, qui écrivait : Toutes les fois que le besoin me prend de lire quelques pages de Flaubert - et c'est là un de mes besoins fréquents -, je vais droit à L'Éducation sentimentale. J'ouvre le livre n'importe où, je suis satisfait. » (Revue le Voltaire, 9 décembre 1879)
Après sa lecture du roman, Hippolyte Taine écrivit ceci à Flaubert :
« Il me semble que vous vous êtes dit : “ Jetons un filet sur le boulevard et ramassons les individus qui passent. Les types très francs et très absolus sont faux, ils n'existent que dans l'esprit. Tout homme réel n'est qu'un à peu près, un hybride, un mélange de velléités et d'inconséquences.” » (Novembre 1869)
Pas mieux…
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