J'ai rarement le sentiment que je ne trouverai pas de mots assez forts pour exprimer mon ressenti après une lecture.
Ce sentiment est à la fois pénible et délicieusement agréable. La pénibilité liée au risque de n'être pas tout à fait compris et le plaisir rassurant de constater qu'il n'existe pas de point de bascule au terme duquel trop de lecture m'aurait blasé.
Je sens donc que ça va être difficile de dire tout le bien que je pense de
la vague qui vient mais je vais quand même essayer.
Le bandeau rouge que j'ai perdu entre temps, ( je n'aime pas beaucoup cet accessoire, pourtant gage d'approbation consensuelle par quelques initiés triés sur le volet, plus que de qualité réelle, admettons-le en préambule) précise que d'après une journaliste du magazine Elle dont le nom est trop petit sur une image pas assez pixelisée et mon intérêt pas assez grand pour que je fasse plus d'efforts pour saisir son identité, il s'agit du roman le plus drôle de la rentrée.
Il aurait fallu que je lise les centaines d'autres romans de la rentrée pour savoir si je tombe d'accord avec elle ou pas et je vais donc m'abstenir de juger son verdict mais il est vrai que j'ai parcouru les plus de trois cents pages du bouquin avec un sourire idiot (c'est le seul de ma panoplie, mon sourire séducteur ayant été érodé par plus de vingt ans de mariage) et de nombreux éclats de rire intempestifs et fort agréables.
Effectivement
Daniel Fohr est drôle du début à la fin du livre. Et ça fait indéniablement beaucoup de bien.
Pour autant,
La Vague qui vient n'est pas une farce mais une belle oeuvre de littérature.
De fait les personnages sont truculents et une lecture superficielle comblera tout un chacun pourvu qu'il soit pourvu d'un certain sens de l'humour.
Mais l'auteur va beaucoup plus loin que la simple plaisanterie en offrant aussi une analyse précise de la pensée insulaire, de ses paradoxes et de ses richesses, en une photo prise sur le vif pour devenir carte postale en relief.
La question de fond, traitée avec talent et peut-être une certaine dose d'inconscience freudienne est notre rapport au monde rendu possible par le regard de l'autre.
Cette trame de fond est développée avec talent et diversité de points de vue, on y croise aussi les drames existentiels, petits ou grands, liés à la complexité de cette position dans la peau de l'artiste, qu'il soit écrivain, dessinateur de BD ou actrice.
Le livre est achevé, je le regarde posé à ma gauche sur un bureau où s'amoncellent à ma honte assumée des feuilles de toutes sortes et d'utilités diverses et j'éprouve un paradoxal sentiment de connivence et d'abandon.
Je ne relis pas mes livres et je sens que je vais regretter celui-là.
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