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Milan, 1981. Giacomo Colnaghi, substitut du procureur, dirige l'enquête sur l'assassinat d'un membre de la Démocratie chrétienne par une branche dissidente des Brigades rouges, la Formation prolétarienne combattante. Contrairement à la plupart de ses collègues qui veulent arrêter et punir ces jeunes qualifiés de terroristes rouges, Colnaghi cherche surtout à comprendre. Catholique pratiquant, d'origine modeste, fils d'un résistant communiste tué par les fascistes, le magistrat essaie de concilier sa foi et son idée de la justice avec l'héritage paternel et les revendications de ceux qu'il est chargés d'arrêter. Ainsi, malgré les attentats, les enlèvements, les assassinats, Colnaghi voudrait trouver autre chose que la violence pour répondre à la violence. Cherchant sans cesse les origines du mal, les responsabilités de l'Etat et les solutions à apporter, il demeure incompris de sa famille qu'il néglige un peu, mais aussi des brigadistes qui font de lui une cible. Car le dialogue n'est plus possible dans l'Italie des années de plomb...

Mort d'un homme heureux est le livre d'un homme bon, car plein de doutes. Et ce sont ces doutes qu'analyse Giorgio Fontana dans un roman doux-amer qui raconte une époque pesante, celle des années de plomb, et un magistrat qui tente de comprendre la société dans laquelle il vit. Guidé par sa foi -en Dieu et en la justice- mais loin d'être aveuglé par elle, Colnaghi révèle l'ambiguïté de ses positions intellectuelles. Devenu un bourgeois et perçu comme tel, il reste le fils d'un ouvrier communiste fusillé pendant la guerre. Ce père qu'il a peu connu, dont il ne sait que ce que sa mère et quelques proches ont bien voulu lui raconter, reste pourtant très présent dans ses pensées. Il aime d'ailleurs fréquenter un petit bistrot ouvrier, se mêler à ces travailleurs, pour un peu se sentir proche de cet homme trop tôt disparu. C'est par lui qu'il comprend qu'on peut mourir pour ses idées. Ce passé familial le met en apathie avec les jeunes qu'il interroge et poursuit en justice. Il reste cependant impuissant à les convaincre de choisir une autre voie que la violence pour faire aboutir leurs revendications. Pour l'extrême-gauche, ce réformiste, humain et respecté, devient l'homme à abattre car il fait vaciller leur système de valeurs...
Roman des hommes de convictions broyés par L Histoire, Mort d'un homme heureux est une bulle de bonté et de paix dans un monde de violence, un roman attachant, humain et lumineux.
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"Tout se passe sous notre responsabilité, Roberto: aider les personnes, ne pas les traiter comme de simples parties dans le jeu du procès. Des exceptions oui, des erreurs, non."

Ainsi parle Giacomo Colnaghi, substitut du procureur à la cour de justice de Milan: il a une haute idée de la justice. Il aime son métier et se laisse dévorer par lui.

La période est redoutable: les années de plomb, celles où l'Italie, après les attentats de la gare de Bologne et de la Piazza Fontana à Milan dus au terrorisme d'extrême-droite, sombre dans le terrorisme d'extrême- gauche qui en est la réplique -probablement provoquée par une" stratégie de la tension" orchestrée en sous-main...

A la fin des années 70, les Brigades Rouges ou ses nombreuses factions dissidentes - Prima Linea etc...- enlèvent, tuent, des dirigeants politiques, des industriels, des magistrats...

Giacomo Colnaghi est en charge, avec deux autres magistrats, de ces attentats, de ces assassinats. Il n'a guère le temps de s'occuper de sa petite famille, sa femme Mirella et ses deux enfants, demeurés en province: il vit dans un petit appartement à Milan et passe son temps à travailler.

Il enquête, il arrête , il interroge, il sanctionne. Il refuse qu'on le protège, qu'on l'escorte. Il vit dangereusement.

En tant que magistrat, il incarne aux yeux des BR, l'Etat bourgeois, et cette démocratie chrétienne qui a si mollement combattu le fascisme et si peu puni les sanglants attentats de Bologne ou de Milan. Il est donc une cible du nouveau terrorisme rouge.

Pourtant, Giacomo n'est pas un bourgeois et il ne sera jamais un fasciste. Mais il est, qu'il le veuille ou non, un rouage de l'Etat et c'est, profondément, un démocrate ET un chrétien. Un chrétien de gauche plus qu'un démocrate-chrétien...

Il est un enfant de pauvre, qui a choisi un métier mal payé et dangereux par idéalisme; il est surtout un orphelin dont le père, un résistant communiste, un partisan de la brigade Garibaldi, a été torturé et tué par les fascistes pour avoir brûlé des cartes de rationnement au temps de l'occupation allemande et de la "république sociale "de Salo', la bien-nommée...

Ce beau roman fait le portrait non d'un juge, mais d'un Juste qui porte haut son idéal, sa dette à l'égard d'un père admiré et adoré, son questionnement permanent sur la justice et son refus de toute colère.

Un Juste qui veut aussi comprendre, et pas seulement juger, et, qui sait, arrêter l' escalade sécuritaire et la surenchère de la vengeance qui ne mènent qu'au chaos et à la violence sans fin.

Dans son train-train quotidien - un week end à la plage, une course à bicyclette ou un repas au restaurant avec deux vieux amis, une discussion presque banale avec sa femme ou sa mère,- se ménagent de larges temps de réflexion : débat avec un membre des brigades rouges, une chrétienne, un autre magistrat, sur la faute, le pardon, la justice, la sanction -l'auteur, Giorgio Fontana, a fait des études de philosophie.

Mais l'équilibre entre le quotidien banal et la hauteur de la réflexion reste naturel, et le portrait de Colnaghi, pris entre ces deux pôles, gagne en épaisseur, en profondeur et en humanité.

Il est aussi touchant quand il répare le pneu de sa bicyclette que quand il donne sa pensée sur le mal.

La vie anodine et menacée de Giacomo s'entrelace avec le récit de l'engagement et de la mort de "Beppo" - le nom de guerre de son père, un "nom de chien" pour "une vie de chien"- récit reconstitué par la mémoire passionnée du fils, qui porte sur son coeur et relit tout le temps le dernier message de ce père - un Juste lui aussi.

Ce deuxième récit, intégré au premier, donne à la trame historique son éclairage et sa complexité: si L'Italie a connu les secousses du terrorisme noir suivies de celles du terrorisme rouge, c'est bien dans cette période de la guerre, du fascisme, de la résistance - et de la guerre civile qui a suivi la chute de Mussolini en 1943 , qu'il faut en chercher les racines.

Un livre intéressant, un double éclairage historique justifié, un héros humain et attachant: bref, une belle découverte!
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En 1981, l'Italie vit encore ses années de plomb marquées par les attentats et assassinats des Brigades rouges. Cette année-là, Giorgio Fontana voit le jour dans une petite ville de Lombardie. le dernier roman du jeune écrivain italien, Mort d'un homme heureux, se focalise sur cette période avec le portrait d'un magistrat, impliqué dans la lutte anti-terroriste. Un homme qui est loin d'être tout d'une pièce : idéaliste, rêveur et pragmatique à la fois, il a la foi chevillée au corps : catholique d'abord mais aussi croyant en son métier, la différence majeure vis-à-vis de ses collègues juges étant qu'il cherche à comprendre les racines du mal avant d'essayer de l'éradiquer. La façon dont Giordana analyse le comportement et les failles de son héros est fascinante, aussi bien sur le plan familial que professionnel (le deuxième aspect "bouffant" littéralement le premier). le livre est écrit dans un style faussement simple mais extrêmement élaboré qui n'est pas sans poésie ni émotion. de manière récurrente, une autre intrigue irrigue le livre, avec des chapitres consacrés à l'histoire du père du magistrat, résistant et tombé sous les balles nazies en 44. le parallèle entre les destinées de ce père et de ce fils, qui ne se sont que très peu connus, est l'une des belles résonances de ce beau livre sur l'engagement, la rectitude morale et les doutes qui assaillent tout être humain. Enfin, Mort d'un homme heureux est aussi une magnifique déclaration d'amour de Fontana à sa ville, Milan.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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En un mot, ce roman est une belle surprise et une belle découverte littéraire.

On peut dire que le sujet est assez difficile à aborder : Les Années de Plomb et ces assassinats en série, exécutés soit par les Brigades Rouges, de jeunes communistes (surnommé terrorisme rouge) d'un côté et les néo-fascistes de l'autres (surnommé terrorisme noir mais qui n'est qu'évoqué en surface dans le roman). Mais pour moi, le défi est relevé haut la main : Giorgio Fontana décrit avec brio l'atmosphère pesante et l'enquête minutieuse du substitut du procureur Colnaghi.

Qui plus est, il met également en scène, avec tout autant de brio, l'affrontement intellectuel de l'époque entre les catholiques et la justice d'une part et les communistes radicaux d'autre part.

La force supplémentaire de ce roman est le style fluide avec lequel le roman (et plus particulièrement la traduction) qui fait que même lorsque le roman sur le fond accuse un certain temps mort (notamment lors des moments passés en famille qui ne sont pas vraiment indispensables à mon goût), on a toujours envie de poursuivre la lecture pour savoir ce qui se passe ensuite.

Bref, un excellent roman qui transcrit avec brio l'atmosphère sombre des Années de Plomb et la dualité intérieure de Colnaghi entre la loyauté envers le catholicisme et la justice et la volonté de comprendre les motivations des communistes, tout cela écrit avec une grande fluidité et un grand savoir-faire. Gageons que Giorgio Fontana devienne une des futures grandes gloires de la littérature italienne, car il le mérite amplement.
Lien : http://leslecturesduprofesse..
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Très attirée par l'Italie et assez au fait de la période des années de plomb, j'ai été plutôt déçue, l'impression de ne pas avoir été transportée et de ne pas être entrée dans ce roman…
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Un magistrat italien enquête sur l'assassinat d'un collègue par des militants d'extrême gauche pendant les années de plomb. Catholique fervent, il tente pourtant de comprendre de qui est à l'origine de l'action violente de ces jeunes militants et ce qui les sépare eux et lui.
Cette quête le conduit à s'interroger sur lui-même et sur son père, résistant pendant la Seconde Guerre Mondiale et qu'il a à peine connu, dont l'engagement est retracé
Mais son désir de justice et de compréhension semble peu à peu l'éloigner de sa famille et de l'univers qu'il s'était construit.
L'écriture (ou peut-être la traduction) n'est pas magistrale mais ce roman est une belle enquête fouillée tant sur la personnalité de son héros que sur les années de plomb italienne.
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Désolé mais je ne suis pas aller au bout de la lecture.
Sans la connaissance nécessaire de l'histoire politique italienne de la seconde moitié du XXème, je me suis senti vraiment perdu et comme il n'y a pas d'histoire...
A bon entendeur.
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Ce livre nous parle des années de plomb à Milan dans les années 80. Giacomo Colmarghi est substitut du procureur et croit en la justice et veut résoudre avec justice et impartialité des affaires. Nous sommes en pleines années de plomb et les attentats des brigades rouges et de certains groupes dissidents ensanglantent l'Italie. Giorgio Fontana va nous raconter alors l'enquête de ce juge et sa vie. Sa vie intime avec ses rapports avec sa femme et ses deux jeunes enfants et en particulier Danielle, son jeune fils qui est fragile et a besoin d ‘être rassuré. Mario, son sympathique ami d'enfance, qui est libraire, l a osé divorcer et cela a stoppé sa vie politique. Il y aussi Doni, son ami d'études, devenu comme lui magistrat et ensemble, autour d'une table ils vont essayer de comprendre comment ils peuvent travailler en gardant les illusions de leur jeunesse ; L'auteur nous fait le portrait d'un homme bon et malgré le titre, on aimerait tellement que la fin ne soit pas si funeste. J'ai apprécié la description intime de cet homme et de sa conception de son travail, de ses questionnements. J'ai aussi aimé ses déambulations dans les rues de Mila, que j'ai visité il y a peu.« le monde tel qu'il était lui semblait mériter sans conteste colère et compassion, mais jamais la haine. Et quelle révolution pouvait donc venir de ka haine ? » (p198)« Tout se passe sous notre responsabilité, Roberto: aider les personnes, ne pas les traiter comme de simples parties dans le jeu du procès. Des exceptions oui, des erreurs, non."
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