C’est comme ça, avec le temps… « avec le temps, va, tout s’en va ». Je pense à cette chanson et j’ai bien envie de pleurer, mais je ne vois plus vraiment d’intérêt à verser des larmes. Après tout, j’ai eu beau pleurer toutes celles que j’avais, rien n’a changé. Jamais. C’est une perte d’énergie de pleurer, ça fait mal au cœur, ça fait mal au visage, aux yeux qui brûlent et puis très vite, à force de pleurer on ne se reconnaît plus.
J’attrape le carnet dans lequel je consigne tous les souvenirs de Laurent. J’ai besoin de le retrouver. J’ai beau être nue dans mes draps, recouverte de la trace des baisers d’un autre, il n’y a toujours que lui. Je n’arrive pas à le laisser partir. Est-ce possible que les vivants hantent les morts ? Comme un fantôme, mais à l’envers. Cela remettrait ma vie à l’endroit.
- J’ai envie que tout s’arrête vous savez, je n’ai plus envie d’être. Je voudrais m’endormir pendant des années, me réveiller et que tout soit passé.
Il secoue la tête :
-Ca ne servirait à rien. Vous vous réveilleriez avec la même souffrance. C’est la vie et le temps qui effacent la douleur.
J’ai toujours détesté le silence. Il y a toujours quelque chose de pesant et mes pensées pèsent des tonnes dans le silence.
On n’aime pas une personne pour ce qu’elle nous apporte. On aime une personne pour ce qu’elle est. Ou bien sont-ce deux facettes d’un seul amour ?
Les mots ne sortent pas de ma bouche. Ils sont coincés dans ma gorge. J’ai peur qu’une fois délivrés, ils me détruisent totalement. Là, contenus dans ma poitrine, ils me rongent, mais le processus de destruction est bien plus lent. Bien plus douloureux aussi.
Elle remplit mes pensées, elle m’obsède. L’idée de m’échapper avec elle m’obsède. C’est ça, plus qu’elle, c’est ce qu’elle représente qui me tente. Un moment fou, un moment où l’on ne pense à rien, un moment où je ne serai plus ni père, ni mari, mais juste Marc.
Je suis devenu père et j’ai dû porter un fardeau supplémentaire sur mes épaules. C’est comme ça, quand on veut faire les choses bien, les enfants deviennent lourds à porter.
Lourds d’angoisse à chaque fois que je vois qu’on fait du mal à des enfants, je pense aux miens. Lourds de fatigue.
Elle, elle est belle et assez fine. Et si brillante, et connue… À côté, je ne suis rien. Juste une maman qui passe sa journée à gérer la maison. C’est trop cruel d’être ainsi réduite à néant avec tous les efforts que j’ai faits pour bâtir une jolie vie à ma famille. Je ne mérite pas cette humiliation.
C’est injuste, il s’agit de mon destin, de ma vie, et il prend le pouvoir de décider pour moi. Comme un dictateur.