Citations sur Éloge du courage (52)
L’instinct, la raison. L’expérience aussi. C’est elle qui guide mes pas. C’est elle qui oriente mon intelligence émotionnelle et me permet de penser hors du cadre, de prendre du recul. Sans expérience, je serais incapable de gérer les médias, la tactique, le doute. Cette opération « Notre-Dame », c’est mon heure de vérité. Je ne dois pas passer la soirée à me dire : « Je n’ai pas droit à l’erreur. » Mais agir en utilisant au mieux le potentiel de la Brigade, son courage, son esprit d’initiative.
Essayer de retrouver – ou surtout ne pas perdre – l’impulsion intérieure qui pousse un gamin à oser partir au feu. Retrouver un peu de sens quand l’un d’entre nous ne revient pas. Pour ne pas pleurer. Enfin si… Pour pleurer. Mais pour se relever. Pour repartir le lendemain. Pour avoir la force d’envoyer d’autres hommes en mission. Pour affronter le regard d’une mère devant un cercueil sur lequel est posée la photo de son enfant. Ces regards ne s’oublient jamais. Comment répondre au désarroi d’une maman un an, dix ans, après la mort d’un fils ?
Son histoire, nous la connaissons tous par la grâce de Terre des hommes, d’Antoine de Saint-Exupéry que les collégiens, je l’espère, continuent à lire. En 1930, lorsque son Potez-25 s’échoue dans la Laguna del Diamante, le pilote de l’Aéropostale est encore un jeune homme de 28 ans. Il a effectué quatre-vingt-onze traversées de la cordillère des Andes.Épopée à travers la neige et le froid. Ce jeune pilote, vêtu d’une simple veste en tweed, erre sans nourriture pendant cinq jours au-dessus de 3 400 mètres d’altitude. Guillaumet ne se bat pas pour une cause, pour un drapeau ou pour je ne sais quoi. Simplement pour survivre. On est là dans le combat le plus noble puisqu’il s’agit de résister aux éléments. Courage du cancéreux qui se bat contre tous les pronostics. Pas de médaille, pas d’héroïsme ni de gloire. Mais au bout, une récompense sublime : la vie.
Face à un entrepôt industriel qui flambe comme s’il était en papier, je lutte depuis deux heures contre les flammes avec mes hommes. Les fumées nous agressent. Le combat est difficile. Le monstre est puissant. Dans ces lieux vétustes, rien n’est aux normes. Nous avons tiré des tuyaux comme nous pouvions. Corps à corps avec le démon. Ça chauffe, ça gronde. Mur de flammes. Les 600 degrés qui fouettent. Le sol brûle. Les fumées qu’on ne sent pas. Le feu tape du pied, il frappe aux portes. Il m’attire, m’entraîne à lui.
Le courage est difficile à vivre pour les autres. Jalousies. Cette Légion d’honneur à 30 ans, cette photo en couverture de Paris-Match et ce titre à la une, « Capitaine Courage »… Plusieurs années après les événements, Évelyne a préféré quitter le service de santé des armées. Je parle en son nom, qu’elle me pardonne si je me trompe, mais quelque chose l’a poussée à « disparaître », à ne pas porter pour le restant de ses jours ce statut d’héroïne sur ses épaules. Elle n’a pas renoncé à servir comme médecin – toujours le mystère de l’engagement. Mais elle a préféré l’anonymat.
J’aperçois des singes narquois et des iguanes au regard désabusé, comme si ces bestioles préhistoriques avaient vu passer tant de monde avant nous qu’elles ne s’étonnent plus de rien, surtout pas de notre modeste défilé.
Nous sommes en milieu d’après-midi, la nuit tombe dans une heure. Petit à petit, un goût de rouille, un goût amer, envahit ma bouche. Je ne sais pas encore ce que c’est.
Ne laissons pas dire que le courage, c’est fini. Que notre époque l’a tué. N’ayons pas peur de croire en l’homme.
Le courage, c’est toujours dire « non ». Pas le « non » du caprice et de l’orgueil. Mais celui qui vient des entrailles, du fracas de notre histoire. Le « non » dont on se souvient génération après génération. Écouter Malraux sur le plateau des Glières.
Le courage, c’est le silence. Me revient souvent l’image de Steve McQueen dans La Grande Évasion. Pendant tout le film, il ne dit que quelques mots. Il joue, il se moque. Il se contente de parler avec sa balle de baseball. Il la lance contre un mur, celui de sa cellule, pour se préparer à fuir son camp de prisonniers. Tac, tac-tac, tac. Le courage, c’est souvent l’obstination, l’entêtement. Comme une répétition tenace. Et ne rien dire.
" Que peut le courage s’il n’est pas tenu en laisse par un guide ? Je vous le dis : le pire ou le meilleur – et parfois rien. Quel but peut-il avoir ? Aucun autre que lui-même. Dérision de la vanité. Si le courage est guidé par la générosité, comment pourrait-il manquer un but conforme à l’éthique qui le guide ? "