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Critique de Floyd2408


Laurent Gaudé est devenu un personnage moins nébuleux, au hasard d'un rencontre dans ma librairie indépendante, mon Professeur de Mathématique de terminal, me vante cet écrivain, un de ces derniers romans en main, je reste inerte, cette envie germe en moi petit à petit. Deux ans plus tard, l'air est estival, je découvre Nous, l'Europe banquet des peuples de Laurent Gaudé, l'achète sans réfléchir, instinctif comme happé par ce roman et dans ce prolongement d'euphorie je prends aussi le soleil des Scorta, prix Goncourt 2004.
Ce préambule grave ce roman comme un tableau rêvé lors d'une nuit agitée, revivant dans la vérité de cette peinture accrochée dans un musée, une révélation s'installe, la magie de la vie s'opère, l'Europe de Laurent Gaudé s'accroche à moi pour glisser dans ce vestige prosaïque.
La forme du roman m'invite à plonger dans ma mémoire, la lecture du roman Charlotte de David Foenkinos, un poème en prose sur la vie de cette artiste peintre juive Charlotte Salomon, morte enceinte à l'âge de 26 ans. Une onde Gaudéienne souffle sur la magie de ce roman, un poème en sur l'Europe, un chant mélancolique égrène l'épopée du vieil continent aux éclats mortuaires, aux étincelles progressives, aux oraisons funestes, aux reflets d'espoir et l'ombre d'une humanité cruelle.
Ces seize poèmes dessinent les contours de notre Europe actuelle et de ces nations qui la composent, des prémisses avec ces personnes gravés au fer rouge dans la constitution ou non de cette grande entreprise de réunir dans un même corps d'idées, des pays en perpétuel compétition, une réussite incroyable. Laurent Gaudé se pose la question de savoir qui nous sommes dans son introduction littéraire, avec cette réponse « Je suis européen »
De la guerre, de l'essor industriel et de sa révolution, de la montée des extrémistes, de la colonisation, du féminisme, des exodes raciaux, la construction économique de l'Europe, de la libération des moeurs, Laurent Gaudé explore avec minutie les phases diverses de cette Europe nouvelle.
La métamorphose d'une société devenue esclave de son économie, comme cet or noir le charbon, essor fabuleux économique devenant lumière puis toxique, maladif, la route choisie est tortueuse, le périple sinueux.
Laurent Gaudé, comme une messe invite le lecteur à se repentir de ses aïeux, ces anciens européens se dévorant d'une jalousie orgueilleuse, d'un esprit de puissance, de conquête, de domination.
Laurent Gaudé n'oublie pas cette Europe honteuse, ces hommes, de ce leitmotiv, « Crachez sur son nom », qu'il cite un à un pour les mémoriser, dans cet anathème humain, Laurent Gaudé dénonce avec mépris ces personnages.
Chaque chapitre, strophes, couplets, poèmes se gravent dans une unité inextricable, du cheminement d'une Europe vivante, combattante, vertueuse, amoureuse, meurtrière, guerrière, tortionnaire, suicidaire, fiévreuse, douloureuse, assassine, aveugle…
Ce serpent se mordant souvent la queue, les hommes glissent sur l'écaille habillant cette humanité fragile, déstabilisé par la bureaucratie lourde.
Sans vouloir ternir ce magnifique roman prosaïque par une critique peu sensuelle, d'une écriture si belle, aux souvenirs éternels d'un Laurent Gaudé consensuel, de son Europe encore conflictuelle, laissez-vous caresser par cette aquarelle de mots.
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