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Critique de andras


Laurent Gaudé nous invite à le suivre dans une traversée nocturne de Paris, désertée de ses habitants mais peuplée des âmes des parisiens d'antan qui s'y sont battus pour la liberté ou pour leurs idées (résistants, communards, joyeux drilles insolents des danses macabres du moyen âge...). Il nous fait aussi entendre l'écho de quelques voix qui ont résonné sur ces pavés : celles de Villon, d'Hugo, de Rimbaud, d'Artaud. Et il y a aussi l'image de son père dont la mort absurde et brutale hante l'auteur. Ce dernier semble un moment hésiter entre la vie et l'appel des fantômes du passé mais son double qui l'a accompagné tout au long de sa déambulation saura le pousser vers la cohorte des vivants avec cette phrase pour viatique : "C'est à cause que tout doit finir que tout est si beau."

C'est un livre bref, mélancolique et qui m'a touché même si j'ai le sentiment que l'auteur manque ici l'occasion de nous faire (et peut-être de se faire) des aveux plus intimes. Certes l'histoire des deux jeunes cheminots fusillés quelques jours avant la Libération de Paris est bouleversante mais n'est-ce pas aussi une façon de ne rien dire de plus sur la mort de son père, ni sur ce qu'il a ressenti ? Il nous dit que la famille attendait qu'on lui rende le corps (suite à une autopsie) "pour que l'on puisse en prendre soin [...], déposer de la terre sur sa dépouille" et cela lui permet d'évoquer le sort d'Antigone ("Jamais le cri d'Antigone [...] ne m'a été aussi proche")... et donc de regarder ailleurs ! de même, la courte page où il évoque un amour de jeunesse ("Sur tes lèvres, où je déposais mes angoisses de jeune homme et où je prenais les tiennes") se termine bien vite sur une énumération d'hôtels où tous deux se sont retrouvés... hôtels choisis pour avoir hébergé jadis d'illustres écrivains !

Il y a certes "mille vies" dont aurait pu nous parler avec brio Laurent Gaudé et ce livre était évidemment trop court pour les contenir toutes. Mais à côté des quelques écrivains illustres et des quasi-inconnus morts pour la défense de la liberté dont il nous trace un rapide portrait, il y a ces deux autres vies évoquées mais trop habilement escamotées. C'est un regret que j'ai eu à la lecture de cet ouvrage.
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