Je renonce aux détails, mais l'essentiel est intact.
C'est traître la sclérose en plaques. ça ne se voit pas. Par moments ça se sent à peine; et puis ça vous inflige une volée de symptômes pour vous punir de l'avoir oubliée un instant.
J'ai beaucoup lu sur ce sujet lorsque j'ai reçu mon diagnostic. Et plus je lisais, plus j'étais en colère ; non parce qu'il était établi qu'on m'avait inoculé la sclérose en plaques, mais parce que la médecine officielle refusait obstinément d'étudier cette question. Jamais elle ne se remet en cause. À chaque nouvelle expérience mortelle, elle laisse sur son chemin quelques dizaines ou centaines de morts, et elle continue sa route sans se retourner, arrogante comme une héritière inculte.
Et s'il est temps d'envisager le métier qui me tente vraiment, il est temps, plus encore, d'assumer mon ambition la plus profonde, celle d'écrire. Il ne s'agit pas pour moi d'un métier, même s'il serait doux de pouvoir en vivre. C'est plutôt quelque chose d'identitaire ; c'est ce que je fais de mieux, à mon avis, et ce qui me plaît le plus.
Mon corps m'échappait, mon cerveau était en fuite. Je ne me reconnaissais plus de l'intérieur.
La maladie est entrée brutalement dans mon histoire personnelle, elle en est un des éléments désormais inévitables, parfois à peine un détail, parfois une brusque poussée de symptômes, et tous les choix importants de ma vie, une menace à prendre en compte.
Le regard des autres me ferait presque souhaiter que mon corps se dégrade plus vite, pour qu'enfin on ne me reproche plus ma faiblesse.
Quand ça va mal, on attend le mieux; quand ça va mieux, on pressent le mal.
Ma SEP n'est pas sans histoire. Au contraire, elle est toute une histoire. C'est l'histoire d'un rappel morbide et vital à ma condition précaire d'un être humain.
Les symptômes vont et viennent, ils s'exacerbent à chaque poussée, s'aggravent, puis reculent comme l'océan à marée basse, laissant la plage jonchée de séquelles plus ou moins pénibles.