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Critique de Dionysos89


L'intégrale Alone est un beau travail des éditions Critic et de l'auteur pour refonder deux romans consécutifs, parus chez Rivière Blanche, en une belle intégrale avec l'ajout de deux courts récits qui vont bien, le tout sublimé par une couverture de François Baranger qui claque méchamment son Pépé !


Pépé (il vaut mieux découvrir par soi-même d'où lui vient ce surnom) est un solitaire dans la plus pure tradition des Alones, ces aventuriers qui errent dans les immensités de la France post-apocalyptique, survivant à l'écart des communautés qui tentent de se reformer, voire de se réformer, au prix de nombreux fanatismes. En effet, les Alones ont un code d'honneur entre eux, envers aussi ceux qui pourraient parfois être dans le besoin, mais ne peuvent pas blairer du tout les Fanar et les Fanam (fanatiques religieux / fanatiques militaires). La France transcrite par l'auteur a subi ce qui ressemble à une apocalypse scientifique, puis une apocalypse sociale, car les machines ont détruit les villes et les communautés restantes périclitent vers un nouvel âge de la loi du plus fort (ce n'est pas très clair dans ce roman-ci).
Ayant alors, eux, des traditions, des codes, un vocabulaire en commun, ces Alones pourraient être vus comme une nouvelle communauté, mais non, ils préfèrent la solitude, ou en tout cas les groupes réduits. Ils prônent la libre-conscience, la maîtrise très tôt de l'art de la survie, y compris de certains arts martiaux, ainsi que l'habitude de savoir se débrouiller foncièrement seul et d'aimer cela. Puisqu'il faut bien avoir été entraîné, voire élevé par un mentor, le héros l'a été par Grise, à peine plus âgée que lui, qui a disparu lors d'une escarmouche. Pépé s'est résolu à tracer sa route sans elle et à constamment se fondre dans un environnement inhospitalier, même si l'attrait romantique et la fougue de la jeunesse ne sont jamais complètement oubliés. L'est comme ça, le Pépé !
A comme Alone permet alors de se familiariser très vite avec le personnage (notamment une scène introductive extrêmement immersive) grâce à un vocabulaire un peu châtié, à de l'humour grinçant et un rythme très soutenu. Ainsi, les cent cinquante pages de ce roman en font une aventure au long cours, car la montée en puissance de l'intrigue est quasiment un cas d'école : le héros débute mal, trébuche plusieurs fois, affronte ses peurs et rencontre surtout, au fil de ses pérégrinations, des communautés de plus en plus hostiles. L'auteur a opté avec raison pour un panel de personnages restreint mais bien utilisé : trois personnages secondaire gravitent autour du protagoniste et lui sont, tour à tour, d'une bonne aide, sans pour autant s'arroger sa place.
Ce « A comme Alone » m'a soufflé par son rythme, ses personnages et sa fraîcheur ! Ne connaissant pas l'oeuvre de Gilles Thomas (alias Julia Verlanger) dont ce roman semble être un hommage, je ne peux pas décemment faire de parallèles, toutefois, si le but était de faire un exemple parfait de ce qui est appelé le « roman populaire », aventure-plaisir immersive, bien écrite et référencée (car les noms ne sont jamais un hasard), alors c'est réussi.

Une nouvelle a été insérée pour servir de transition entre les deux romans-miroirs : « L'ère du Tambalacoque » est un sympathique récit sur le destin d'un des derniers Arpenteurs et de son rôle dans la survie d'un arbre devenu conscient ; après avoir appris à se comprendre, à communiquer, les deux entités doivent s'assimiler pour viser plus haut dans leur impact sur un environnement hostile. C'est l'occasion de retrouver les combats pleins d'action façon Thomas Geha, même si cela manque d'une petite conséquence supplémentaire en toute fin de nouvelle pour bien comprendre l'impact de cette quête. Pour rester vraiment évasif, je dirais « Tambalacoque à l'eau, qu'à la fin il nous les brise », mais pour comprendre quelle influence majeure aura cet arbre majestueux, il faut poursuivre l'aventure des Alones.

Deuxième roman de cette intégrale, Alone contre Alone poursuit l'aventure. Pépé était bien heureux, ayant retrouvé son mentor et amour, étant entouré de ses amis, se reposant tranquillement sur la côte d'une vie d'aventure. C'était sans compter ses adversaires d'hier qui continuent de le traquer. C'était sans compter non plus sur le fait que son monde post-apocalyptique continue de produire des entités diablement dangereuses pour la survie de l'humanité. Après avoir combattu un commando désirant annihiler sa retraite tranquille, Pépé doit repartir en chasse à l'aide de ses comparses.
Un petit peu à l'image de ce que j'avais ressenti dans le diptyque du Sabre de Sang, ce diptyque d'Alone me fait préférer le parti-pris du premier tome et être légèrement déçu par sa suite directe, un peu comme si l'ouverture proposait plein de choix, mais que les deuxièmes tomes ne recelaient plus la même noirceur et reprenaient le schéma classique suivant un héros avec ses acolytes et ses antagonistes. Sans perdre l'aspect « aventure populaire », Alone contre Alone est un poil plus consensuel dans son déroulé avec des péripéties plus attendues. Cela n'enlève rien évidemment au côté agréable de ce Pépé dépassé par bien des événements mais qui tente de les régler avec ses petits bras musclés.
Une bonne poursuite de l'aventure lancée par A comme Alone, qui ne dépasse pas son prédécesseur mais construit globalement un monde cohérent et qui n'est pas figé.


Cette intégrale se clôt par une ultime nouvelle, « le silence est d'or », qui, contrairement à sa consoeur, ne nous informe pas de grand-chose, car elle reprend un événement fondateur pour le personnage principal, que nous avons déjà bien compris, mais ce coup-ci du point de vue opposé, afin de mieux comprendre leur psychologie. Il est évident qu'elle n'aurait de toute façon pas pu être mieux placée dans le présent volume : la placer avant le premier roman déflorait le tout, la placer au milieu n'aurait pas eu d'intérêt, alors la placer à la toute fin permet d'en faire un dernier baroud d'honneur, de retrouver une dernière fois deux personnages que nous avons aimé suivre.


Cette intégrale Alone est donc un sacré bel objet avec du contenu qui vaut le détour, un ensemble cohérent enrichi de deux nouvelles complémentaires qui éclairent le reste et une couverture de François Baranger qui envoie sec !

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