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Critique de Slava


Un jeune peintre talentueux mais miséreux achète un étrange tableau. Ce tableau est un portrait d'un vieil homme mais dont les yeux semblent vivants... Il l'emmène chez lui et en demeure troublé par cette oeuvre. Une nuit, il croit voir le portrait s'animer ! le lendemain, il trouve des ducats d'or chez lui... Ça tombe bien, pour quelqu'un de pauvre et qui veut faire reconnaître au monde son art ! Très vite, il devient connu et ses tableaux se vendent bien mais l'art peut résister à la mondanité et à la superficialité ?
Voilà une curieuse nouvelle d'un grand auteur russe, Nikolai Gogol. Il est connu pour ses nouvelles fantastiques (dont le Portrait) et du roman les Âmes Mortes. Ici, il se sert d'un thème connu du fantastique, un objet abstrait qui devient vivant. Si Edgar Allan Poe avait utilisé avec brio ce thème avec sa nouvelle... le Portrait (oui c'est peu original), Gogol le fait d'une efficacité décoiffante et d'une grande originalité. Des années plus tard, un certain Oscar Wilde s'inspire de la nouvelle pour composer un roman... Eh oui, Gogol a inspiré l'auteur du Portrait de Dorian Gray ! C'est dire !
Dans l'édition que j'ai eu, il y a deux parties à la nouvelle, comme faisant deux petites histoires autour du même thème. Il est unanime que la première partie est magnifique et puissante.
Avec une écriture superbe, aux comparaisons piquantes ("fâché comme un coq mouillé " dévorer avec des yeux de vampires") et doté d'un humour subtile mais acerbe, Gogol relate le changement qu'apporte ce tableau. La manière dont il le décrit nous le rend presque réel, on peut presque sentir l'effrayant regard réaliste sur nous. D'autant plus qu'on ne sait rien de ce tableau... La nuit où il prends vie est angoissante et étrange...
Mais étonnamment, après ce passage, plus une trace du fantastique, adieu, basta. En effet, après cela, le réalisme domine, lorsque le peintre décide de changer de vie. Gogol s'attarde aux détails réalistes. Mais surtout, on constate une grande satire envers les gens et la mondanité. En effet, le peintre est amené à côtoyer les riches et Gogol en profite pour les critiquer durement, mais avec son humour.
Et la nouvelle va plus loin : c'est une véritable réflexion sur l'Art et surtout comment en user. L'Art est un domaine sacré qu'il faut surtout s'en servir délicatement... et surtout, il est difficile de garder son talent quand le grand public en demande toujours et souhaite voir des artistes "bon marché ". En effet, Gogol fait le constat amer : mieux vaut être un artiste pauvre et isolé mais qui possède un grand don artistique que d'être un artiste en vue et connu de tous mais qui va se conformer à tous et perdant son originalité... Et la chute sera dur pour ces artistes-là, le héros du récit va le ressentir cruellement... La fin est déchirante et tendue, sonnant comme une terrible morale.
En revanche, la deuxième partie est différente de la première : lors d'une exposition, le public se presse autour du tableau, qui n'est d'autre que le portrait. Un jeune homme explique l'histoire de ce portrait...
Quand je dis différent, c'est que le ton y est : au revoir le ton fantastique et réaliste mais angoissant, et bonjour le mysticisme proche du conte. Plus de trace du fantastique mais un peu de merveilleux.
L'origine du tableau est expliqué et j'avoue avoir été un peu déçu. Je m'y attendais vraiment à un raison grandiose et fabuleuse... et bah non. de même, la trame est moins intéressante et un peu surréaliste.
Cependant, le point positif est qu'on remarque encore une satire à l'encontre des gens en général, déjà remarqué dans la première partie. On fustige encore le manque de reconnaissance de ceux-ci envers les peintres de génie, juste parce que ceux-ci sont "trop originaux" et peu conforme à leurs attentes.
Mais mieux vaut privilégier la première partie, qui est indéniablement la meilleure, la plus marquante. Gogol nous incite à réfléchir sur l'Art, sur ce qu'est le Talent et surtout comment on peut se brûler les doigts lorsqu'on se conforme aux attentes de tous...
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