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Critique de ghislainemota


L'avantage de regarder Netflix est de découvrir des films et des séries inspirés d'auteurs qui me sont inconnus.
Le déclic est venu avec " Les patients du docteur Garcia" où je suis ressortie enthousiasmée par les personnages dans une Espagne très troublée.
Almudena Grandes s'est consacrée à l'histoire de son pays afin de donner une vision de la guerre civile espagnole et du régime répressif de Franco.

Dans "Les secrets de Ciempozuelos" nous sommes dans un asile pour femmes où le docteur Vélasquez s'occupe des paranoïaques telle Aurora Rodriguez Carballeina.
Revenu dans son pays après un séjour en Suisse il découvre les fractures sociales qui sont les plaies béantes que le régime inflige. Il tente pourtant de lutter mais la solitude l'envahit malgré ses amis et ses conquêtes.
Résolu à soigner ses patientes avec un médicament révolutionnaire, le sort des malades s'améliore considérablement. Pourtant son programme va devoir s'interrompre; les autorités de santé désapprouvant la chlorpromazine.
Autour de ce portrait d'un homme plein d'empathie envers ses malades gravitent des femmes de tous milieux.
Maria Castejon, l'aide-soignante issue d'un milieu très modeste se retrouve piégée par un docteur sans scrupule.
Aurora, femme très cultivée, internée depuis vingt ans vit une paranoïa destructrice. Elle se donne pour mission d'engendrer l'homme de demain, l'être parfait. Sa propre fille n'étant pas à la hauteur, elle la supprime car non conforme au chef-d'oeuvre qu'elle veut créer. D'où le titre du roman en espagnol "la Madre de Frankenstein".
Dans cet univers féminin, les religieuses qui dirigent l'établissement ont de grands pouvoirs que soeur Anselma utilise au nom de l'Eglise catholique.
Beaucoup de personnages entrent en scène pour refléter une société corrompue où le silence est de rigueur, les interdits légions, la liberté d'expression inexistante et l'eugénisme, une voie de purification: une ère d'obscurantisme fasciste.
C'est donc dans cette dictature franquiste cléricale que les femmes des années 1950 se trouvent dans des situations victimaires n'ayant aucune prise sur leur avenir.
De la boniche à l'intellectuelle, leur sort est lié aux machistes, aux cathos qui volent les enfants d'internées, aux lâches qui n'assument pas leur paternité.

La finesse psychologique des héros m'a emportée vers la souffrance de ces femmes impuissantes et malheureuses même si certaines tentent de se révolter.

Dans ce contexte d'un peuple déchiré entre les Républicains et les Franquistes, j'ai trouvé ce roman excellent, éclairant sur l'idéologie nationale de l'époque où les homosexuels sont soignés par des électrochocs, où le sexe est encadré de péchés, où l'internement est arbitraire.
Point de salut. Les salauds brisent des vies de femmes en suivant l'ornière sociale de leur naissance. D'ailleurs Vallejo nommé "le Mengele espagnol" pensait que les vaincus étaient des déficients mentaux et les femmes des êtres inférieurs biologiquement.

J'ai pris mon temps pour lire ce dernier livre de l'auteure décédée en 2021.
500 pages pour dénoncer des horreurs, pour peindre des portraits hallucinants de bonté comme la famille Goldstein ou de cruauté représenté par le père Armenteros.
Un livre pour "la mémoire de femmes privées de liberté".
Un livre qui m'a d'autant plu touché lorsque je pense au sort de ma grand-mère, fille- mère dans les années 1940. Une vie de paria, de misère et de honte.
Alors comment ne pas ressentir le mal-être de tous ces secrets de femmes?
Nous avons depuis bien avancé avec les féministes pour trouver notre place dans la société occidentale. Malheureusement le bonheur des femmes n'est pas la préoccupation de certains pays opprimant leurs mères, leurs soeurs, leurs épouses.
Un roman éclairant "'comme un phare".



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