Si vous suivez le travail de la maison d'édition Gulf Stream, vous avez vu passer ce roman depuis des mois sur les réseaux sociaux… Sa sortie était prévue le 26 mars, et il a été présenté en avant-première au SLPJ de Montreuil en décembre dernier !!! Les événements ont fait qu'il n'est finalement arrivé dans sa version papier que le 11 juin, c'est pourquoi je vous en parle enfin… Ça fait plus de trois mois que je l'ai lu et que j'ai rédigé l'essentiel de cette chronique, mais je n'aime pas mettre en avant des livres que vous ne pouvez pas vous procurer. Beaucoup de mots pour peu à dire… passons à l'essentiel !
Vous avouerez déjà que l'écrin de ce roman est sublime, non ? Gulf Stream fait vraiment un beau travail éditorial de mise en valeur de ses ouvrages, comme ça avait déjà été le cas avec Moitié d'âme d'
Anthelme Hauchecorne l'an dernier. de même ils n'hésitent pas à se lancer dans des séries, risque de moins en moins pris par les maisons d'édition, car il est très compliqué de convaincre les libraires de suivre ces séries… et de garder l'attention des lecteurs sur le long terme, tant l'offre est pléthorique.
Sur le rabat de la couverture au début du roman, on découvre cette magnifique carte, illustrée par le studio Vaderetro (qui signe aussi la couverture), qui représente la partie haute de l'univers, à savoir les îles flottantes et les mers/ciels dans lesquels les navires évoluent. Non seulement elle est très belle, mais en plus elle facilite grandement le suivi du trajet de l'Héliotrope.
Dans cet univers steampunk, les Industriels ont commis un génocide pour accéder au pouvoir et dominer le monde : ils ont décimé les Alchimistes, et détruit tout ce qu'ils ont trouvé comme trace de leur existence. L'équipage de l'Héliotrope, outre ses activités de piraterie, vogue aussi à la recherche des « clefs » qui les mèneront à la cité perdue des Alchimistes, seul bastion restant du pouvoir de ces derniers… dont on trouve quand même quelques « héritiers », les Irréguliers, qui sont dotés d'aptitudes extrasensorielles… Prudence en fait partie. Elle doit cacher son don pour ne pas être pourchassée par le pouvoir.
Le roman débute sur un prologue qui place le contexte de l'intrigue tout en poésie, et avertit le lecteur qu'il pénètre un univers insolite et qu'il doit laisser ses certitudes derrière lui : « On situe cette histoire au début du Ve siècle après la Grande-Fracture. La date exacte des événements sera laissée à la libre imagination du lecteur, qui devra souvent faire appel à sa fantaisie s'il suit ce récit. S'il ne goûte guère l'absurde, l'impossible, l'irrationnel, l'illogisme et le fantasque, alors il lui faut abandonner ici la lecture. // Pour celui qui décide de continuer, entrons dans l'histoire sur la pointe des pieds, en ouvrant juste un peu la porte, comme l'on entre dans le boudoir d'une jeune fiancée en pleins préparatifs… »
C'est une des choses que j'ai particulièrement apprécié dans ce roman : la poésie de l'autrice, tout comme de l'univers qu'elle a créé. Elle nous fait voyager dans son imaginaire, mais aussi dans le notre, faisant remonter à la surface des contes et histoires entendus durant l'enfance, mais aussi donnant corps aux rêves de nombre d'enfants. Être un pirate, voler, voir l'avenir, partir à la recherche d'un trésor…
Et dans le même temps, on est dans une réalité qui peut être plus crue, comme le fait que les pirates se rendent dans une « maison de compagnie » pendant leurs escales. Les Industriels, qui gouvernent, n'ont pas hésité à éradiquer une catégorie entière de population, les Alchimistes, et à pourchasser les quelques individus qui présentent des capacités hors-normes. le peuple est aussi clairement défavorisé par rapport aux décideurs. Les pirates ne sont pas des gentils, mais ils ne sont pas non plus les monstres dépeints par le pouvoir… Tout est en place pour une révolution. Aura-t-elle lieu ? Affaire à suivre… La géopolitique de l'univers est très classique dans un roman d'aventure, elle n'en est pas moins intéressante dans sa mise en oeuvre dans ce roman destiné aux jeunes adolescents.
En plus de la carte qui nous permet de circuler dans l'univers des Steam Sailors, le studio Vaderetro signe aussi un plan de l'Héliotrope, le navire au coeur du roman. J'ai apprécié avoir la possibilité de voir les trajets de Prudence sur le navire, en particulier juste après son enlèvement, lorsqu'elle a encore tendance à s'y perdre. Tout y est, y compris les passages secrets !
Dans ce premier tome, les éléments se mettent en place graduellement, mais ES Green prend soin de glisser régulièrement des scènes plus dynamiques, ce qui évide une exposition de l'univers qui traîne trop en longueur et devient soporifique. On n'est certes pas dans le rythme d'un roman d'aventure où chaque page amène son lot d'événements inattendus, mais on ne s'ennuie pas pour autant. On découvre les personnages principaux, ainsi que le monde créé par l'autrice, du moins essentiellement le Haut-Monde, car on quitte le Bas-Monde dès le deuxième chapitre. On vogue aux côtés de l'équipage de l'Héliotrope d'île en île, à la rencontre des différents peuples de ce Haut-Monde, et à la découverte des intrigues qui les lient ou les opposent les uns aux autres.
L'Héliotrope, premier tome de la trilogie Steam Sailors, augure de belles choses pour la suite. J'ai particulièrement apprécié la poésie d'ES Green, qui m'a plongée au coeur de son imaginaire, et par extension du mien. Ce voyage aventureux dans un univers riche, socialement et politiquement intéressant, peuplé de pirates et corsaires, rythmé de batailles « volantes », est dépaysant à loisirs… J'ai hâte de découvrir ce que nous réserve l'autrice pour la suite.
J'ai reçu la version papier de ce roman de la part des éditions Gulf Stream. Merci Julie pour la confiance.
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