Cette guerre n'en finirait donc jamais... De fait, peut-être ne s'est-elle jamais vraiment terminée. Certes, la paix fut proclamée, mais elle ne faisait pas le bonheur de tous. Au fond d'eux-mêmes, les gens n'avaient pas changé pour autant, à peu de choses près : le soldat allemand, si fier hier encore, n'était plus qu'un soldat anéanti, laminé. L'armée s'était littéralement désintégrée, n'avait pas mieux résisté que les uniformes dont l'étoffes était à base de pâte de bois, idem pour les cartouchières en similicuir. Qu'elle fut perdue cette guerre, ce n'était vraiment pas cela qui me décevait. Mais que les gens aient pu supporter une pareille chose pendant des années, que les quelques voix qui s'était élevées contre une telle boucherie n'aient même pas été entendue, c'était cela, rien que cela, qui me décevait...
Je cherche mon chemin dans la vallée embrumée de mon passé, qui s'étend à mes pieds, ondoyant à l'infini. Dans les paysages du passé, l'ombre voisine avec la lumière, les contours nets avec les contours flous, la douceur avec l'amertume ...
Je m'étais trouvé sans cesse confirmé dans l'idée que les masses humaines sont des troupeaux de veaux parfaitement serviles et qui adorent choisir leur propre boucher. Je ne voyais pas grand chose de bon dans l'homme (...)
Je me demande souvent ce qu'il serait advenu si j'avais suivi jusqu'au bout la filière "normale". Cela aurait-il fait de moi un peintre "normal", et non une sorte de dégénéré cité comme l'exemple à ne pas suivre, haï par ces concitoyens et mis au ban de la société par les gouvernements.