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Critique de gouelan


Si vous aimez la photographie, les paysages grandioses, les BD qui semblent vous emmener dans un ailleurs, presque sur une autre galaxie, alors qu'en fait, elles collent à la réalité, cette intégrale « le photographe » est fait pour vous.

1986, Didier Lefèvre, photographe, accompagne une mission MSF en plein coeur de l'Afghanistan.
L'oeil du photographe saisit l'instant, l'insolite, la rigueur, la misère, la beauté, l'horreur. Les dessins d'Emmanuel Guibert reprennent cette magie. Les textes nous communiquent la richesse du partage entre Afghans et occidentaux, l'émotion de cette aventure, son caractère grandiose.

On a l'impression que ces guerriers afghans, ces villageois isolés et démunis, se fondent dans le décor. Ils sont rugueux et généreux à la fois. Ils sont aussi parfois impitoyables, obstinés.

On est écoeuré, quand on voit les blessures des hommes, et surtout celles des enfants, après les bombardements dans les villages. Que font des enfants au milieu de cette horreur ?

Puis, on regarde les photos du reportage, les dessins, et on comprend l'énorme contraste, l'absurdité de la guerre : « Un paysage magnifique et immuable qui se fout de la guerre. »
Qu'est-ce qu'ils foutent ces hommes à se faire la guerre, alors que tout autour d'eux invite à la paix, la méditation, la contemplation, l'humilité ?
Au lieu de cela, ils dynamitent les rivières pour ne manger que quelques poissons. Ils dynamitent les roches pour récupérer le lapis-lazuli. Des pierres précieuses pour alimenter la guerre. du beau pour faire du moche. Ils salissent tout. Ils abandonnent les troupeaux de chèvres et de moutons, trop affairés à faire la guerre. Ils préfèrent le fusil au bâton de berger. Ils oublient d'apprendre à leurs enfants l'essentiel : « Personne pour expliquer que savoir des choses ça vaut mieux que de s'étriper. »

On entrevoie les femmes afghanes autrement. « La femme afghane, c'est la gardienne des valeurs, la présence morale. » Si seulement on entendait leurs voix, si seulement on envoyait leurs enfants à l'école, au lieu de les enrôler dans la résistance. Apprendre autre chose que la doctrine et la fierté du combattant.

On admire le courage de ces médecins, infirmières, journalistes et photographes, qui osent s'aventurer et venir en aide à ces populations tellement différentes, tellement démunies, tellement engluées dans leurs idées, tellement isolées. Ils forment une équipe soudée par les épreuves, et ils vont au bout du monde.

L'Afghanistan a bouleversé la vie du photographe; malgré les épreuves, il termine son voyage par ces mots sur son carnet :
« Je pense au meilleur et au pire de ce que je viens de vivre en Afghanistan. Et je réalise une chose : j'ai envie d'y retourner. »
Il a pénétré cet univers, cette planète. Il a compris le langage de ses habitants. Il sait qu'il devra leur mentir en leur disant qu'il est chrétien, pratiquant, marié, père de famille. Bien-sûr, il ne sera jamais leur égal, il n'ira pas au paradis, mais ça passe, on ne lui mettra pas une balle dans la tête.
Leur religion passe avant le reste. Avant de connaitre l'autre. Telle que certains la prêchent et la pratiquent, elle n'ouvre pas au monde, elle enferme, hélas.

Une BD-documentaire-journal qui se termine par le portrait des différents personnages rencontrés durant la mission, une carte de la région et le journal filmé d'une mission en Afghanistan par Juliette Fournot : "À ciel ouvert" .

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