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Critique de JulietteAvitabile


« Et j'ai imaginé que la photographie pouvait conjuguer ces deux pouvoirs, j'ai eu la tentation d'un autoportrait... »
(premier texte, « Les lunettes à lire la pensée » p.9)

Ces deux pouvoirs, qui inspirent d'un même souffle à l'auteur crainte et désir, sont celui de lire la pensée et celui de « transpercer » l'apparence, de « déshabiller » par le regard. Comme un remède à l'effroi que lui procure l'idée de ces pouvoirs détenus par un autre et utilisés à son insu (ou comme pour mieux s'y abandonner), Hervé Guibert s'en empare pour lui, sur lui. Avec ce premier texte, il nous annonce l'intention de son écriture : l'autoportrait. Il ne se trompe pas. L'Image Fantôme n'est pas une autobiographie ni une autofiction, c'est un autoportrait. Dans ce roman qui n'en est pas un, (pas au sens classique du terme), à travers soixante-quatre clichés littéraires, il va en-dessous de ce que photographie l'oeil, de ce que dit la bouche, il écrit ce qui souvent ne se raconte pas et il est touche son lecteur. Parce qu'il rend sa valeur au commun. Parce qu'une grande impression de calme se dégage de cette écriture juste, mesurée, empreinte de mélancolie. Parce qu'il réussit à écrire. Parce qu'il saisit l'insaisissable, le détail, la nuance. Parce qu'il se dévoile. Parce qu'il ne refuse rien de ses contradictions. Parce qu'il est intime.
Des photos manquées et leur amertume, des tentatives, des vues invisibles, des rendez-vous, des rencontres ratées, des impressions, des objets vécus ; il rend éternel, non pas l'image, mais ce qui a entouré l'image, toute la vie particulière qu'à généré ou à laquelle a participé l'image. Ses textes, dont la longueur varie de quelques lignes à plusieurs pages mais dont le style reste fidèle, sont des portraits d'instants, des silences rendus, des aveux amoureux, des revanches quelquefois.
Il est toujours risqué d'écrire une « critique » trop élogieuse d'un livre – et je dis « toujours » comme si, alors que c'est ma première, en quelques sortes, ma première critique hors du carnet. On voudrait des mots à la hauteur de ceux de l'auteur mais le livre n'en a pas besoin. On risquerait au contraire d'en donner une appréciation presque fausse d'être trop émotionnelle et de gâcher la découverte personnelle d'un nouveau lecteur qui trouverait ses propres raisons. Je l'ai lu par hasard, ce livre-là, sans m'y attendre, sans en attendre. Je ne connaissais pas Hervé Guibert, je le connais un peu. Je devine la douceur de son regard, une tranquillité, la persévérance de la passion, la rigueur qui l'accompagne. Surtout maintenant, j'ai ses textes pour raconter mes « autobus », les « photos de famille », et les « premiers amours »...
À travers l'angle de l'image photographique (ratée), Hervé Guibert aborde la vie dans ses instants particuliers, dans ses amours, dans ses grands petits regrets et dans ses pathétiques espoirs, dans le passage du temps qui nous amène, inaltérablement, du vécu au souvenu, de l'instant à l'histoire, et nous fait chérir la mémoire.
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