Meurtre à l'ambassade

Si le problème a une solution, il ne sert à rien de s'inquiéter. S'il n'en a pas, alors s'inquiéter ne changera rien.
Proverbe tibétain

On perd du terrain sur nos poursuivants. Notre course risque de mal tourner. On s’engouffre sous un échafaudage étroit.
Ça passe encore, mais c’est vraiment limite.
Un voile blanc commence à troubler ma vision.
Les deux dobermans et leur maître ne nous lâchent pas.
C’est qu’ils sont endurants, les salopards.
Pan a l’air de tenir le choc. Il le faut. On doit tenir.
La circulation est plus importante dans cette rue. Il y a de nombreux scooters qui zigzaguent entre les minibus, les songkao et autres Ford Contour.

– Je me sens épuisé et j’ai mal partout. Pourquoi tout est aussi vague ?
– Tu as subi un gros traumatisme. Je te résume rapidement la nuit passée puis il faudra te reposer, car, dès demain matin, les journées qui se profilent risquent d’être longues et éprouvantes pour toi. Effectivement, lorsque tu es rentré hier, tu es allé porter du café à un Français réfugié à l’ambassade depuis très peu de temps : monsieur Dulgot. Cet homme a été abattu dans l’ambassade par arme à feu. Nous t’avons retrouvé gisant au sol, dans l’encadrement de la porte d’entrée de la salle du meurtre, une balle de la même arme logée sous la clavicule. Par chance les secours ont pu arriver à temps et…

Je prends conscience de mon corps. Une douleur aiguë apparaît sous ma clavicule droite. Toute mon épaule et mon pectoral, de ce même côté, sont recouverts d’un épais bandage. Je ne peux presque plus les bouger.
Qu’est-ce que je fais ici ?
Une infirmière, assez âgée, regarde la drôle de machine puis se tourne vers moi en souriant.
– Bonjour. Je crois que vous êtes tiré d’affaire, jeune homme. Vous avez eu de la chance.

. Durant mes années d’étudiant, un événement me marqua au fer rouge : un voyage en Thaïlande avec mon cousin Florent et un ami. J’ai contracté deux virus lors de ces vacances : celui du voyage et celui de la Thaïlande. À mon retour en France, l’envie de parcourir le monde et de retourner sur cette terre d’Asie ne me quitta plus.

J’ouvre la porte et m’avance dans l’encadrement.
C’est à ce moment-là que le coup de feu est parti !

Je tends la main vers la poignée et je sens un petit frisson me parcourir le corps. Au moment où ma main se referme, j’entends un léger bruit à l’intérieur de la pièce. Comme un souffle ou une sorte de chuintement étouffé puis un bruit plus sourd.

Quelques ombres courent le long des murs, il n’y a pas un bruit, comme s’il n’y avait pas une âme qui vive à des kilomètres à la ronde. Je me ressaisis. En fait, c’est juste la routine. Je crois que ces quelques jours au grand air ont déclenché chez moi une légère claustrophobie.

Est-ce de rencontrer cet homme que je n’ai jamais vu qui m’inquiète un peu ?
Pourquoi quelqu’un vient-il chercher refuge à une heure aussi tardive ?
Il faut que j’arrête de me poser tant de questions ! Il n’y a pas d’inquiétude à avoir. S’ils l’ont laissé entrer et qu’ils l’ont laissé seul c’est qu’il a été contrôlé. Ici on ne plaisante pas avec la sécurité.

– David, tu tombes bien. Il y a du remue-ménage ici. Un homme vient d’arriver il y a dix minutes à peine, complètement perdu et épuisé. Il tient un discours cohérent, toutefois un peu inquiétant. Tout est en règle concernant son identité. Je l’ai déjà vu ici, il y a une semaine environ, pour un problème de vol de papiers d’identité, mais il n’a pas voulu nous en dire plus. Pour résumer sa situation, il est français et vient chercher refuge pour une raison que j’ignore.