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La musicienne, le peintre et la prison

Avec ce troisième roman, Maëlle Guillaud confirme son talent à sonder les tréfonds de l'âme humaine. En racontant les tourments d'Hannah, qui se rend tous les jeudis à la maison d'arrêt, elle nous livre une histoire de passion, avec tous les démons qui rôdent autour.

Voilà maintenant trois ans qu'elle suit le même rituel. Prendre le train puis le bus, en espérant qu'il n'y aura pas de retard, pour arriver devant la porte de la maison d'arrêt. Tous les jeudis Hannah va voir Juan, l'homme qu'elle aime. «Toutes les semaines à présent, une journée lui est dérobée. Elle s'agace souvent de ces interruptions, de ces interminables traversées qu'elle s'impose pour retrouver Juan. Lui ne lui demande rien. "Ne viens que si tu peux. Et si tu ne viens pas, je comprendrai". C'est faux, elle le sait, il se raccroche à elle parce qu'elle représente leur passé et leur avenir. Et qu'en détention l'avenir se pare d'une superstition mystique.»
Leur passé, ce sont des souffrances, des drames. Hannah a perdu ses parents, morts dans un crash aérien alors qu'elle avait huit ans. Puis plus tard, elle perdra ses grands-parents et se retrouvera seule. Sa bouée de secours aura été la flûte traversière que son père lui a offerte après un concert qui l'avait enthousiasmée. «Ce qu'elle avait compris à leur mort, c'est que l'instrument serait son plus fidèle compagnon, celui qui remplirait le vide. La propulserait dans une autre réalité. La ferait voyager dans le temps, les espaces, les sentiments. La rendrait vivante, l'élèverait vers un ailleurs inaccessible aux autres. La musique avait été une révélation. Une soif de beauté, une vibration intérieure qu'elle ne pouvait combler autrement.»
Pour Juan, cela avait été la découverte que ses parents, grands-parents et leurs amis étaient des franquistes qui continuaient à vouer un culte au Caudillo, avec tous les relents nauséabonds d'extrême-droite véhiculés par cette idéologie.
Si, lors de la soirée où il leur avait présenté Hannah, il n'avait pu surprendre les mots prononcés par son père, «Une musicienne. Juive, en plus. Il nous aura vraiment tout fait!», il aura tout de même violemment rompu les ponts, s'enfuyant avec Hannah.
C'est à Tanger qu'ils avaient fait connaissance, une ville faite de mirages où «on vient traquer des souvenirs qui n'ont pas eu lieu». C'est là qu'elle avait découvert l'atelier de Juan, ses toiles, son talent, sa capacité à transcender ses démons dans des aplats de noir, un peu à la manière de Soulages. C'est là aussi qu'elle avait ressenti la puissance de son désir. Qu'ils s'étaient liés, qu'ils avaient imaginé leur vie à deux. C'est là aussi qu'elle avait fait la connaissance de Nessim, l'ami d'enfance de Juan, celui avec lequel il s'était encanaillé, celui qui allait le faire plonger.
Maëlle Guillaud, créatrice du prix Monte Cristo en 2019 en partenariat avec la maison d'arrêt de Fleury Mérogis, rend parfaitement la douleur de l'absence, le poids de plus en plus lourd de la solitude, le vertige du manque. «Juan lui manque. Elle enfouit son nez dans son oreiller. Il sent la lessive, elle projette, ravive sa mémoire, mais l'odeur de Juan s'est estompée comme la buée sur une vitre, et Hannah se laisse submerger par les larmes. (...) Elle pleure l'absence de Juan, l'amour qui s'est échappé derrière les barreaux, elle pleure sa jeunesse qui n'a pas duré, le temps qui file et lui arrache les êtres aimés, elle pleure les nuits tourmentées et les aubes claires.»
Au fil des pages, on va découvrir les raisons de l'incarcération et tous les sentiments qu'elles engendrent. Tous ces démons qui gravitent autour de leur amour et qui les brûlent, la jalousie, la convoitise, la trahison, la culpabilité.
Après Une famille très française et Lucie ou la vocation, Maëlle Guillaud donne ici une nouvelle preuve de son talent.


Lien : https://collectiondelivres.w..
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Et mes jours seront comme tes nuits de Maëlle Guillaud me laisse songeuse.

Hannah , depuis trois ans, prend le train chaque jeudi . Elle a rendez-vous avec Juan... au parloir de la prison où il purge sa peine.. le trajet est long , monotone et Hannah a le temps de se souvenir..

Sa famille trop vite disparue, la rencontre avec Juan, les folles journées de complicité amoureuse, leur passion exigeante lui pour la peinture, elle pour la musique... les jours heureux défilent et Nassim, l'ami-frère de Juan , tel un oiseau de malheur, s'invite dans ses souvenirs..

J'ai été séduite par le style et la plume de Maëlle Guillaud qui fait apparaitre sous les yeux du lecteur des personnages plus vrais que vrais, une ville écrin Tanger .
J 'ai été perturbée par l'atmosphère malsaine qui se dégage de ces pages, relents de fascisme, manipulation perverse, emprise psychologique, mensonge .. j'en passe .

Je referme ce roman dubitative , surprenant , non ?
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Hannah vit entre parenthèse depuis que son bel amour Juan est loin d'elle, depuis qu'elle lui consacre ses jeudis, qu'elle a elle aussi franchi la ligne entre le monde de dehors et celui de la prison.
Ils se sont rencontrés à Tanger. Hannah est musicienne, Juan artiste peintre. Ils ont tout de suite été en harmonie, soudés par le chagrin d'une enfance pas toujours heureuse, elle orpheline à huit ans, lui issu d'une famille de franquistes convaincus et toujours aussi passionnés qu'il rejette avec ardeur.
Autour de Juan il y a aussi Nessim, l'ami fidèle, celui qui a reconnu son talent, qui l'aide à vendre ses toiles, celui qui a une telle emprise sur Juan qu'il pourrait lui demander la lune.

Alors chaque jeudi Hannah ne vit que pour ses visites à la prison, c'est sa respiration, son moment suspendu, hors du temps, son obligation consentie.
Jusqu'au moment où le rideau se déchire sur une Hannah un peu perdue, et où le lecteur se demande où Maëlle Guillaud l'a embarqué.

L'autrice a un vrai talent pour sonder les âmes, mais aussi pour décrypter l'enfermement sous toutes ses formes au fil de ses romans. D'abord avec une jeune femme qui fait voeux de devenir religieuse dans Lucie ou la Vocation, puis une jeune fille qui se cherche dans une famille très française, enfin une jeune femme dont l'amoureux est en prison. Chacune a sa propre geôle qui la tient prisonnière. Ici, Hannah est prisonnière d'un amour absent, envolé, mis en cage loin d'elle.
Jusqu'à ce qu'elle trouve la force de s'en détacher ?

chronique complète en ligne sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2022/04/18/et-mes-jours-seront-comme-tes-nuits-maelle-guillaud/
Lien : https://domiclire.wordpress...
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Merci la médiathèque et ses têtes de gondole qui mettent en avant de nouveaux romans! Je ne serai jamais tombée dessus sans cela.

De prime abord, je n'ai pas été trop dépaysée de mon boulot par la description du milieu carcéral et les visites familles. Cela m'a permis d'entrer plus vite dans le roman.
On sent le rituel, l'attente des retrouvailles tandis que l'incarcération freine les relations amoureuses. Les tentations extérieures sont également évoquées mais subtilement et sans que cela ne soit à outrance.
Durant cette écriture, j'ai vu l'évolution où au départ je craignais que ce ne soit que des redondances. Finalement, on assiste par bribes à la construction du couple, du personnage principal déjà bien endeuillé. La cause de la peine de prison ne vient qu'après et prend son sens au fur et à mesure: il est question de trahison, d'économie parallèle, de secrets...
La fin se devine presque mais laisse un goût de surprise où l'auteure m'a embarquée sans que je ne la vois venir... Et c'est là que j'ai compris que j'avais pris une petite claque dans cette lecture.

Un roman teinté de sentiments, qui fait du bien et en même temps rappelle que tout demeure fragile.

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Une histoire très courte, percutante, touchante. Les larmes me sont montées aux yeux en lisant la détresse des deux protagonistes. Hannah et Juan, séparés par des barreaux, par la vitre du parloir, par les actes impardonnables de Juan.

C'est un roman assez lent, il ne se passe pas grand chose, on est beaucoup dans les souvenirs d'Hannah mais les chapitres très courts permettent une lecture super fluide et plaisante.

Beaucoup de délicatesse et de poésie se dégagent des mots de l'auteure.

En résumé, j'ai bien aimé découvrir cette histoire, ces personnages qui intriguent et qui marquent !
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« Et mes jours seront comme tes nuits », semblables à ces journées gorgées de soleil sous le ciel de Tanger, là où tout a commencé. Hannah se souvient de sa rencontre avec Juan. Entre eux, plus que l'amour passionnel des débuts, celui qui n'obéit à aucune loi, il y a l'amour de l'art. Hannah joue de la flûte traversière, Juan est peintre. Tanger, la ville qui a abrité les premières fois, revient régulièrement dans le récit puisqu'à travers elle, les souvenirs affluent. Les corps se rapprochent, les sourires se comprennent, les yeux se dévorent. Tous les jeudis, Hannah se prépare pour retrouver Juan. le soleil fait place à l'obscurité, et la clameur de la ville mue vers un lieu où le temps s'est figé. Juan est en prison, et tous les jeudis, depuis trois ans, Hannah vient lui rendre visite. « Le jeudi, c'est la cérémonie des retrouvailles. » Il est son phare dans la nuit, même derrière des barreaux. Hannah raconte cette absence, ce cruel manque de l'autre, et sa façon qu'elle a de tenir par la musique. La musique l'aide à orchestrer sa vie pendant que celle de Juan a été mise sur pause, par Nessim, son meilleur ami, celui qui l'a trahi. Lorsqu'on est doué comme l'est Juan pour la peinture, il est facile de glisser vers des activités moins honorables, un piège qui se referme tout doucement sans faire de bruit. Face à l'appât du gain, l'amitié ne fait pas long feu. Voilà pourquoi il est coincé là, Juan, entre quatre murs : il n'a pas su s'arrêter à temps.

Ces deux âmes en souffrance s'étaient bien trouvées. Elle orpheline, ses parents ont été les victimes d'un accident d'avion, l'absence elle connaît. Lui prend conscience qu'il descend d'une lignée de franquistes, toujours fidèles à la droite de la droite, antisémite de surcroît (Hannah est juive). La solitude il connaît. Ce rapprochement de deux solitudes est le socle de leur union. L'asile imposé en sera aussi le prolongement. Maëlle Guillaud raconte l'enfermement de ces deux êtres, chacun à leur manière : elle par le manque, lui par l'incarcération. L'univers de la prison prend une grande place dans le roman. L'auteur décortique les émotions de ceux qui y entrent comme visiteurs et de ceux qui y vivent comme résidents. « Le passage de l'extérieur à l'intérieur est tellement brutal. Hannah repense aux mots de Juan. Elle a envie de lui dire que le cheminement inverse n'est pas facile non plus, mais elle n'en a pas le droit. » le monde carcéral a ses propres lois, ses propres codes, son univers : l'absence de silence, la défaillance du sommeil, la disparition d'une forme de solitude. Alors, chaque jeudi, Hannah vient parler du dehors, et Juan parle du dedans.

« Et mes jours seront comme tes nuits » est une histoire d'amour funeste, une tragédie shakespearienne où les deux amants souffrent autant qu'ils aiment. Ce supplice, cette lente agonie fera dire à Hannah : « Le bonheur, quel triste mot. »

« Et mes jours seront comme tes nuits » raconte l'enfermement au sens propre, mais aussi l'aveuglement volontaire, comme si, pour ne pas souffrir, le cerveau se mettait délibérément sur pause. le refus de regarder la vérité en face devient une forme de suffocation, la réalité se terre derrière des souvenirs fugaces. Grâce à une construction passé — présent efficace, Maëlle Guillaud met en lumière l'emprise. Celle de Nessim sur Juan, celle de l'enfermement de Juan sur Hannah. Mais au milieu de ce chaos, elle choisit de placer l'art comme réceptacle de tous les martyrs et de sublimer ainsi toutes les blessures.

« Et mes jours seront comme tes nuits » c'est la ville des souvenirs qui bruisse, la présence d'une porte qui abrite bien des secrets, et l'absence, cruelle, tenace, autour de laquelle tourne l'univers d'Hannah. Maëlle Guillaud signe ici un très joli roman, délicat et subtil, jusqu'à cette fin foudroyante où tout fait sens. Les apparences comme les rendez-vous sont parfois trompeurs…

Lien : https://aude-bouquine.com/20..
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J'ai dévoré ce petit livre d'un auteur que je ne connaissais pas ! Et quelle émotion ! J'ai terminé le livre les larmes aux yeux ! Une puissance émotionnelle rare, l'héroïne affronte le manque de l'homme qu'elle aime, la solitude intolérable...
Une histoire d'amour que l'on a du mal oublier le livre refermé.
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Tanger, c'est là qu'Hannah, la musicienne, la juive orpheline, hantée par le crash d'avion de ses parents, a rencontré Juan, le peintre, le fils de franquistes ignobles qui le méprisent, c'est là qu'Hannah est tombée éperdument amoureuse. Juan et son meilleur ami Nassim, dont Hannah se méfie, ignore qui il est exactement, souligne l'influence, l'emprise qu'il a sur Juan. Les signes étaient pourtant évidents, quelque chose de mauvais allait arriver... Alors trois ans plus tard, en France, quand Hannah, tous les jeudis, rend visite à Juan en prison, vacillant entre ses souvenirs de Tanger, les répétitions musicales, le RER, le silence qui l'entoure, pendant que les jours de soleil à Tanger s'estompent et deviennent les nuits en prison, Hannah comprends enfin tout ce qu'elle n'a pas vu, parce qu'amoureuse à en perdre la raison...
L'écriture est délicate, posée, l'histoire entre dans le sentiment d'un coeur ravagé, d'une âme saccagée pour un un final déchirant et magnifique !
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Un court roman, facile à lire, sur les sentiments profonds entre deux personnes abîmées par la vie et ses déboires.
Hannah et Juan, deux personnes amoureuses, dont les origines sont différentes, et les font toujours souffrir: deuil de ses parents pour Hannah, parents franquistes pour Juan.
Ce couple se cherche, s'esseule, et subit les mauvaises influences d'un ami à Juan, qui le mènera en prison.
C'est là que se joue leurs sentiments, leurs détresses, et leurs parcours de vie, à la lumière de la vie quotidienne en prison et de celle de la vie au-dehors.
C'est triste, touchant, et bien écrit.
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J'ai laissé passer une journée avant de noter et de commenter ce livre, car je suis en colère contre lui. Je n'ai pas compris son intérêt en dehors de nous conduire droit vers la dépression…
On suit Hannah et Juan, deux amoureux séparés par le séjour de ce dernier en prison. Déjà, le sujet de base n'est pas joyeux. S'y ajoute un protagoniste sombre, meilleur ami d'enfance de Juan, qui agit comme une ombre sur le couple. Est aussi mentionné l'antisémitisme, mais sans que ça apporte quoi que ce soit de concret à l'histoire (à mon sens).
Le livre est court, et part un peu dans tous les sens (passé, présent, mais pas de manière continue, les sauts dans le passé ne sont pas ordonnés, et l'histoire présente non plus). Les chapitres sont très courts, et donnent l‘impression de passer du coq à l'âne, même si le tableau final est plutôt clair.
Beaucoup de choses sont abordées en peu de pages (environ 200) : la duplicité de Nassim (le meilleur ami), la culpabilité et la rancoeur d'Hannah, les regrets et la solitude de Juan.
On a envie de connaître l'issue, de voir la lumière au bout du tunnel, et la fin n'y répond clairement pas. C'est plutôt un coup de massue qui nous frappe sur la nuque pour nous mettre à terre. Je ne l'ai pas vu venir, et j'aime beaucoup ce genre de surprise en général. Mais pas là. Là, ça m'a juste complètement plombé le moral, et fait pleurer de colère, et de frustration.
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