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Critique de Tachan


Chaque année au mois de février, Mnémos nous fait le plaisir de sortir une pépite de l'imaginaire, c'est-à-dire un jeune auteur en qui ils croient beaucoup. J'ai déjà eu la chance de lire plusieurs de ces romans avec plaisir, j'attendais donc celui de Christophe Guillemain avec impatience. Il faut dire que l'auteur était soutenu par une superbe couverture signée Abel Klaer qui avait tout pour attirer l'oeil et interpeler sur le contenu.

Sur la toile, avant même de me lancer, j'ai vu passer de nombreuses chroniques aux avis assez nuancés. Je savais donc qu'il ne fallait pas trop que je m'emballe et que j'aie des ambitions démesurées, après tout c'est un premier roman. J'ai bien fait de lire ces avis et de retenir ces avertissements, car si l'univers tout comme la plume furent vraiment séduisants, j'ai eu beaucoup plus de mal avec les nombreuses maladresses de la narration...

L'auteur nous embarque au premier abord dans une Dark Fantasy aux inspirations circassiens remplie de Freaks, comme si Nightmare Alley, qui vient de sortir au ciné, rencontrait la littérature de l'imaginaire. C'est étrange et surprenant mais ça pousse le lecteur à avoir envie de plonger dedans pour voir de quoi il en retourne. le soucis, c'est que ça reste très flou, très obscur pendant la majeure partie du premier tiers de l'ouvrage et que ça s'améliore péniblement par la suite. Les enjeux tardent à venir même si on nous parle d'une certaine prophétie sur un Élu qui serait "Celui qui ouvre les portes", ça reste très ténu. Alors j'ai quand même pris plaisir à découvrir l'ensemble des membres du cirque, leurs relations et leurs numéros. J'étais intriguée surtout par le monde sombre en pleine déliquescence, sur sa fin, dans lequel ils évoluaient, un monde sans étoile où une maladie touche de plus en plus de monde : l'errance qui induit des changements corporels. C'était sale, rude, mauvais avec une peur qui rode partout, et seulement un personnage, Ylias, semblait surnager de part son innocence en comparaison de la fascinante mais perturbante magicienne du cirque et de son ami bossu, ou encore du triste sire vampire enfermé dans un vase en mode "génie" d'Aladin. Tout cela interpelait mais sans savoir où ça allait.

L'auteur a eu, pour moi, du mal à poser l'ensemble des bases de son récit pour en faire quelque chose de clair et de compréhensible, ou alors c'était totalement volontaire de sa part de faire quelque chose d'aussi lent et flou, mais ça ne m'a pas convenu. Dans les deux parties qui suivent cette amorce, cependant, même si des révélations se font, même si le rythme s'accélère et se tend à certain moment, l'ensemble est resté maladroit à mes yeux malheureusement et ce jusqu'au bout. Pourtant l'auteur avait tenté de nous aiguillonner avec les incipit de ses chapitres, mais ce ne fut pas suffisant.

Je regrette d'autant plus ce sentiment que l'univers en lui-même est tout ce que j'adore. Il manque juste pour moi de développement et de vie car l'ensemble reste assez froid. Les relations entre les personnages ne font pas vibrer contrairement au mécanisme de l'univers imaginé.

Cet univers, qui est un mélange de sombre magie et de mythologie à la mode chrétienne, est hyper intéressant. On découvre un monde derrière un voile, un monde fabriqué, un monde dirigé par un archange déchu où tout n'est que tromperie, jeux de dupes et mensonges. Les grandes divinités derrière tout cela ne se dévoilent qu'ultra progressivement, leurs buts également. On a ainsi un mélange d'anges, de démons, de mal-nés, de terres mythiques, de paradis perdus ou encore de labyrinthe... Et tout ça pour quoi ? Pour gagner une forme de liberté, mais ça reste assez flou quand même. Il y a énormément de micro informations délivrées au fil des pages qu'il faut assembler, des indices pour percer les voiles du mystères qu'on récolte et qui mènent assez facilement vers l'identité d'un personnage mais pas vers un autre dont le mystère subsiste jusqu'à la fin. C'est assez savoureux à lire.

J'ai beaucoup aimé la description de cette lutte entre grandes entités qui ont des répercussions sur le petit peuple et qui aboutit sur une prophétie à l'origine de l'ensemble de cette aventure, poussant des freaks à partir se battre comme représentant des peuples de Naacht et Sin-Mu. La description de ce paradis perdu et de ce qu'il faut faire pour le regagner fait partie des pages les plus fascinantes du livre car c'est écrit avec une poésie toute antique. de même que le jeu auquel se livre les grands figures de ce roman m'a passionnée, j'ai regardé ça comme une pauvre petit souris voyant des chats se battant pour leur nourriture. J'ai été fascinée aussi par la description de ce monde qui part à vau-l'eau, où les calamités semblent s'enchaîner sans qu'on semble pouvoir y faire grand-chose, comme ce qui nous arrive depuis quelques années, à nous aussi. de là à dire que pour l'auteur, il y a une mise en abîme de notre propre histoire actuelle, il n'y a qu'un pas ;)

Cependant, je ne peux m'empêcher de croire que le mélange entre le côté Freaks et circassien, et celui plus mythologique et fantasy a du mal à prendre. J'ai eu l'impression qu'on forçait à se rencontrer deux univers qui n'avaient rien à voir. J'ai eu l'impression, peut-être à cause d'une évolution trop rapide entre la première et la deuxième partie, puis entre la deuxième et la troisième, que les héros se métamorphosaient trop vite et qu'on sautait du coq à l'âne dans les missions qui leur étaient proposées et qu'ils menaient. Quelque chose ne matchait pas.

Cette lecture est cependant loin d'être une déception. Il y a de nombreuses pages où la plume et l'univers de l'auteur m'ont fascinée. Christophe Guillemain a tapé en plein dans ce que j'aime avec cette mythologie complexe où rien n'est ce qu'il semble être.
Cependant, son roman reste encore trop maladroit pour moi dans sa mise en oeuvre. J'ai vraiment peiné à le lire sans décrocher par moment. J'ai vraiment peiné à adhérer aux personnages, d'ailleurs je n'ai pas ressenti véritablement d'empathie envers eux. J'ai vraiment peiné à dénouer où il voulait en venir, le chemin qu'il voulait nous faire emprunter. Il y a des éléments trop longs et d'autres pas assez détaillés et développés.
Je suis malheureusement partagée mais je retiendrai un auteur à fort potentiel s'il parvient à mieux diriger ses intentions.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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