C'est en lisant la présentation ici-même de
Diadorim que ma réflexion s'est approfondie en ce qui concerne ce que Babelio identifie comme la littérature SUD-américaine. Pour un européen, je suppose que la différence importe peu mais il y a trois amériques: amérique centrale, amérique du nord et amérique du sud. Des auteurs comme
Alejo Carpentier ou
Carlos Fuentes n'appartiennent ni à l'amérique du sud ni à l'amérique du nord. Peut-être faudrait-il modifier l'appellation: non pas littérature sud-américaine, ce qui exclut Fuentes et Carpentier, mais littérature latino-américaine.
Revenons à
Diadorim et son résumé: «En Amérique du Sud,
João Guimarães Rosa (1908-1967) est, avec
Jorge Luis Borges, le géant continental du siècle.» Oui, en effet, si l'on exclut Fuentes et Carpentier, si Chamoiseau, Alexis, Depestre, ou le très grand, le titan
Aimé Césaire sont exclus.
Avec
Diadorim, Rosa est l'auteur d'un seul et unique roman, ce qui fait de lui un géant...
Et
Borges, un faiseur de petites oeuvres, très conceptuelles et formalistes, cérébrales et apolitiques. En somme, de petits géants, ou des grands nains, ou des géants à genoux, ou...
(Quand on sait les dizaines de révolutions, les centaines de coups d'état, la multiplicité des dictatures et des régimes coloniaux (encore aujourd'hui, les dictatures molles d'Ivan Duque, les coups d'état parlementaires contre Pedro Castillo et Manuel Zelaya, le retour du refoulé avec Jeanine Áñez, entre fascisme et racisme exterminateur), il est très très très étrange de voir à l'oeuvre un écrivain reconnu comme
Borges qui se tient à l'écart des tensions et des revers de son époque.)
Bref, c'est sans doute une image fantasmée pour lecteur blasé que celle de l'amérique du sud, une amérique de perroquets et d'exotisme, une amérique du baroque et de la surcharge, alors qu'il s'agit bien plutôt d'une terre d'injustice imbibée de sang, peuplée de millions de fantômes d'Indios et de millions d'africains, tous voués à un esclavage total.