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Critique de Colchik


Voici ma première rencontre avec Abdulrazak Gurnah, récipiendaire du prix Nobel de littérature 2021, mais cela ne sera probablement pas la dernière tant la puissance de son écriture et la finesse de ses personnages m'ont subjuguée.
Saleh Omar, soixante-cinq ans, débarque à l'aéroport de Londres en provenance de Zanzibar et réclame le statut de réfugié en usurpant l'identité d'un autre, Rajab Shaaban. Placé dans une petite ville côtière par un service d'aide aux réfugiés, il s'adapte tant bien que mal à sa nouvelle vie. Mais les circonstances le mettent en contact avec le fils de Shaaban, Ismaïl Mahmud, dit Latif. le destin de ces deux hommes, ancré dans un passé mêlant injustices, mensonges et non-dits, les conduit à se revoir et à engager une conversation pour dissiper les ombres qui entourent les drames vécus.
On peut attribuer tous les qualificatifs en vogue au roman de Gurnah : littérature postcoloniale, de l'immigration, écriture migrante ou diasporique. Mais ce que j'ai lu est, avant tout, un formidable roman d'aventures. Empruntant la forme du récit au recueil des Mille et Une Nuits et le thème du voyage au conte de Sinbad le marin, chacun des protagonistes va raconter à l'autre ses errances. le lecteur est alors embarqué dans les voyages des marchands poussés par les vents de mousson, les pérégrinations liées aux études, l'itinérance hébétée des prisonniers ou la fuite vers un asile. Saleh et Latif retracent leurs périples en explorant leur propre paysage intérieur pour sonder leurs remords et leurs colères, et débusquer les faux-semblants d'une mémoire lacunaire.
La singularité du style de Gurnah provient de sa langue poétique qui sculpte la phrase sans que la ciselure ne devienne trop précieuse, artificielle. L'érudition de l'écrivain, habile connaisseur de la littérature occidentale, sert le texte avec une ironie distanciée (ainsi le leitmotiv de Bartleby).
J'ai subi un véritable enchantement avec ce livre, celui qui soumet l'auditoire au conteur avant de succomber à la magie des belles histoires.
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