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Critique de Margotmatou


Un sublime recueil de six contributrices autour des thèmes de la colère et du traitement qu'on lui réserve en tant que femme ou minorité.
Tout commence par une fiction de Lucile Bellan autour d'une jeune femme et mère qui travaille : un récit à l'abord si commun, dont la simplicité tord progressivement le ventre et donne envie de hurler tout comme le voudrait son héroïne. Mais là est tout l'enjeu de Fruits de la colère : crier face à l'injustice, à l'exploitation et aux violences nous est interdit, sous peine d'être disqualifié.e, traité.e d'hystérique, de hyène, de menace. Ne resterait alors qu'à se taire, lisser, arrondir les angles, et laisser la rage nous consumer de l'intérieur jusqu'au désespoir comme la protagoniste du récit.
C'est là qu'interviennent l'édito lumineux de Pauline Harmange et les essais explosifs de Fatima Ouassak, Douce Dibondo et Daria Marx, qui nous invitent chacune leur tour à reconnaître la colère face aux oppression sexistes et racistes comme légitime, nécessaire et digne.
le sublime texte de Fatima Ouassak, militante que j'admire énormément et qui m'a remis elle-même cet exemplaire, aborde son expérience en tant que mère soucieuse du bien-être de ses enfants racisés dans une banlieue populaire et son parcours de militante. Quand ses enfants sont maltraités par les institutions, quand les démarches écologistes pour rendre la vie meilleure sont attaquées par les médias, quand l'entourage encaisse les injures racistes jusqu'à l'explosion, que faire de toute cette colère ? Pour Fatima Ouassak, seule une colère collective peut permettre de renverser la table et mettre fin aux injustices individuelles sans nous dévorer. le texte de Douce Dibondo poursuit ce raisonnement même si je l'ai personnellement trouvé bien moins fort : l'essai, écrit sous un angle décolonial est plus générique, plus théorique, moins incarné et il faut bien dire que je ne me suis pas sentie concernée. Enfin, Daria Marx aborde dans sa contribution le rapport à son corps, qu'elle a d'abord honni après un inceste et des violences sexuelles, puis les troubles alimentaires et la rage qui y a couvé pendant de nombreuses années. La violence infligée à soi-même dans une colère dont on ne connaissait pas le nom. La marge d'un corps gros et hors normes. Et puis la découverte du féminisme, de la révolte en étendard, de la sororité, de l'amour de soi et des autres femmes.
Les poèmes de l'autrice militante Kiyémis ouvrent et clôturent le recueil dont on doit la magnifique mise en page aux lettres gothiques et pages rose bombe à la collection des Insolentes chez Hachette.
La lecture de ce recueil n'a pas été sans me rappeler celle de King Kong Théorie de Virginie Despentes, dont je recommande évidemment la lecture ; ainsi que La terreur féministe : Petit éloge du féminisme extrémiste d'Irene qui m'a été offert en même temps que Fruits de la colère. Ils m'ont fait le plus grand bien et ont posé des mots sur ces milles petites ou grandes colères qu'on ressent chacun.e au cours de sa vie. Je souhaite le prêter partout dans mon entourage et garder précieusement ses mots en tête !
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