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Citations sur Rester groupés (78)

- Mais il est où Jacques à la fin ? Il doit encore trainer à la maison .
Atterrées , ses amies ne savaient trop comment rappeler à cette femme au cerveau grignoté par l'implacable Alzheimer que son mari était là , à l'heure , dans le cercueil qui sortait du long break noir .
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- Et le petit dernier, D'Artagnan, comment va-t-il ? Toujours immortel ?
- Non, en fait, ce n'est pas un immortel, plutôt un voyageur dans le temps....
- Ah oui, en effet, rien à voir ! s'esclaffa Buron, en soulevant quelques papiers.
- Non, rien, puisque ça implique qu'il arrive directement du XVIIème siècle sans être passé par les autres siècles. Il se serait réveillé en 1982.
- Oui, fit Buron en abandonnant enfin ses recherches et en croisant les mains sur son bureau, je vois qu'il va beaucoup mieux.
Capestan se contenta de hausser les épaules. Henri avait parfois dans les yeux une nostalgie d'exilé qu'aucune terre ne semblait pouvoir combler. S'il ne venait pas du XVIIème siècle, il en affichait de toute façon les symptômes. Il était seul, décalé, déplacé, sans amis ni parents qui le rattachent au fil du temps. C'était sa réalité à lui.
Pour un flic, Capestan accordait peu d'importance à la notion de vérité. Lorsqu'un homme lui disait qu'il était une femme, elle le croyait, quand un mythomane s'améliorait l'existence à coup de délire, elle l'écoutait, et si une ancienne gloire évoquait ses admirateurs du jour, elle la félicitait. Le rétablissement de la vérité n'avait aucun intérêt s'il s'agissait juste d'arriver, de piétiner les rêves ou les reconstructions avec les godillots du rationnel, puis de repartir, souverainement indifférent, comme le dernier des sagouins.
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La gastro, ça peut coller une trouille terrible. Quand mon aîné s'est retrouvé à l'hôpital la première fois, je peux te dire que je ne rigolais pas. Ça a duré quatre jours, mais ça a changé ma vie, dit-il en mâchant, songeur. D'un coup, la terre bouge, tu t'aperçois que tu vis sur un sol meuble. Toute ton existence, tout ce que tu as mis des années à construire, n'est plus soumis qu'à la santé d'un seul être. C'est vertigineux. Après, tu trembles tout le temps. En fait, tant que tu n'as pas eu d'enfant, tu ne connais pas la peur.
- La peur de ne pas en avoir, répondit Capestan à son assiette.
Torrez resta sans réaction une fraction de seconde, puis baissa les yeux.
- Oui, oui, sûrement.
Il découpa son jambon et reposa ses couverts.
- Non. En fait, non. Dans ce cas, le désespoir peut être réel, mais la peur, elle est abstraite. La vraie terreur, c'est celle de perdre.
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Un couinement attira leur attention. C'était le rat de Merlot qui se faufilait jusqu'à sa gamelle au pied du laurier. Les deux policiers le regardèrent grignoter quelques graines. D'une tape légère, Lebreton se débarrassa de sa cendre dans le cendrier à ses pieds. Avant de reprendre sa cigarette, il remarqua sobrement :
- Çà aurait pu être un cochon.
Capestan considéra le rongeur quelques secondes.
- C'est vrai, on ne s'en sort pas trop mal, concéda-t-elle avant de changer de sujet.
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Minuit. Auxiliaire de police Pilote.
Assis bien droit sur le tapis, l'échine chauffant à la flambée derrière lui, Pilou toisait le rat d'un œil mécontent. Le nouveau commençait à prendre ses aises et s'aventurait de plus en plus régulièrement sur des territoires lui revenant de droit à lui, primo-habitant. Il convenait de lui signifier les limites.
(...)
00h01. Auxiliaire de police Ratafia.
Depuis le dessous du canapé, les petites billes noires de Ratafia fixaient l'animal devant lui. Quel con, ce chien.
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- C'est chiant la roquette, tu peux donner jusqu'à cinq coups de fourchette sans rien ramener.
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- Vous me rappelez de quelle brigade vous faites partie déjà ?
- Une antenne du 36, éluda Capestan sans vergogne.
- Le 36. Le fameux 36. Si ce n'étaient des chiffres, on prononcerait les majuscules, n'est-ce pas ? Le Trente-Six !
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Paul avait connu une gloire éclatante, puis sa fin. C'était encore assez récent, mais il serait bientôt considéré comme un has been. Ou peut-être l'était -il déjà, en la matière les premiers concernés étaient souvent les derniers avertis.
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Oui, Orsini m'a envoyé un texto, il s'est plus ou moins mêlé au personnel des pompes funèbres pour avoir des infos. Avec sa tronche, ça n'a pas du être trop compliqué. Il passe une cravate et hop, il peut infiltrer des garnisons de croque-morts incognito. Je suis sûre qu'il n'avait pas dit bonjour qu'on lui confiait les clés du corbillard. On tient du pisse-froid de compétition, quand même.
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L'heure était grave mais Capestan était flic. Une sorte de sonde réflexe relevait les détails, fouillait alentour, analysait les données. Et dans cette grande pièce, nulle part elle ne distingua la trace d'une femme, d'enfants nés ou à naître. Rien n’indiquait qu’il reçût des visites. Paul semblait célibataire. Capestan sentit sourdre une étrange joie qui envahissait son plexus, repoussant, écrasant dans les coins le ressentiment et les vieilles traces de colère. Ils reprendraient bientôt leur place. Elle ne voulait pas de cette joie. Elle se reprocha même de l'éprouver.
Le coin d'un cadre retourné qui dépassait derrière le grand vaisselier à côté de la cuisine attira son attention. Elle le reconnaissait, surgi d'un passé tellement lointain qu'il en devenait improbable. Ce cadre, elle l'avait confectionné elle-même, pour les trente ans de Paul. Un mètre sur deux, en relief. Une compilation de photos, tickets de cinéma, cailloux, places de concerts, plumes de mouettes et autres petits souvenirs de leurs épisodes à deux. A cette époque, la star avait tout et les cadeaux ne le surprenaient plus. Mais il était resté figé, heureux, content, devant ce machin inaccrochable. On ne lui avait jamais rien fabriqué. Quinze ans plus tard, Anne se demandait encore ce qui lui avait pris. Elle comme lui étaient la pudeur incarnée et jamais ils n'avaient pu afficher ainsi leur histoire. Ils avaient passé les années suivantes à planquer ce cadre dans leurs appartement successifs. Sans jamais se résoudre à le jeter, ni même à le descendre dans une cave.
Attendrie malgré elle, elle posa les yeux sur Paul. Sa mèche légèrement fauve masquait un regard du même or.
Il ne pleurait pas.
A sa place non plus, Capestan n'aurait pas pleuré ce père.
La douleur pourtant tirait ses traits et serrait sa mâchoire.
Peut-être qu'Anne était censée prononcer quelques mots, peut-être qu'elle devait le consoler, qu'elle voulait le consoler. Mais elle resta là immobile, à préférer hésiter.
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