Il sait qu’il aurait dû être abattu au restaurant avec les autres, que Yu l’a épargné dans le seul but de se distraire, qu’il ne le libérera pas, car il représente une nuisance plutôt qu’autre chose. Il ne se voile pas la face sur sa situation.
Il s’est finalement résigné. « Il vaut mieux être un favori, plutôt qu’être réellement mort. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. » L’espoir de revoir peut-être, dans un futur lointain et incertain, sa mère et ses sœurs chéries. Il s’est même habitué à l’appréhension qui l’habite sans cesse, depuis son enlèvement. Il a une épée suspendue au-dessus de sa tête, il en a parfaitement conscience. Mais étrangement, les bras de son bourreau le réconfortent.
L’homme qu’il est devenu a perdu de son assurance avec la gent féminine. Il n’a rien d’un dragueur, et n’enchaîne pas les conquêtes. Il s’investit entièrement dans son job, lequel lui apporte une réelle satisfaction, sur un plan personnel.
Les commandes arrivent les unes après les autres à un rythme digne d’un samedi soir. Les casseroles bouillent, les poêlons grésillent, les fours gratinent et les commis courent dans tous les sens, afin de servir les assiettes que Jérémy dresse et inspecte les unes après les autres, d’un œil expert. Aucun faux pas ne sera permis.