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Critique de HordeDuContrevent


Un polar noir obsédant, d'une froideur étrange, un huis-clos lugubre oppressant, totalement addictif !

Je n'ai pas pu lâcher ce livre avant de l'avoir fini tant il est haletant. Impossible de le poser sans savoir ce qui se passe. Ce d'autant plus que la construction est brillante, si nous pensons parfois détenir des bribes d'explications, elles partent aussitôt en lambeaux quelques pages plus loin. Nous ne comprendrons qu'à la toute fin l'histoire, reconstituant peu à peu le puzzle d'une tragédie vertigineuse. C'est d'autant plus passionnant que Keigo Higashino traite d'une thématique sensible, celle des lacunes de notre mémoire et de la quête d'identité consécutive. Et ce que cachent ces lacunes.

Sayaka Kurahashi contacte son ancien petit ami pour lui demander de l'aide. A la mort de son père, elle a reçu une étrange clé à tête de lion et un plan conduisant à une bâtisse totalement isolée dans les montagnes, près du lac de Matsubara. Elle sent que cette maison recèle peut-être des explications au trouble dont elle souffre confusément : une amnésie concernant sa jeune enfance. Elle ne se souvient en effet de rien avant ses cinq ans, pas le moindre petit souvenir, amnésie amplifiée par l'absence totale de photos d'elle avant son entrée en primaire dans les albums de photos familiaux. Elle a besoin d'y aller car elle va mal et pense trouver une explication à son mal-être. Mariée à un homme d'affaires souvent absent, elle maltraite en effet sa petite fille de trois ans et a peur de commettre l'irréparable.
Ils vont découvrir une étrange demeure manifestement abandonnée, à la porte condamnée et dont la clé à tête de lion ouvre une discrète porte au sous-sol. A l'intérieur, le temps semble s'être arrêté, tout est laissé en plan comme si les habitants étaient partis dans la précipitation, comme semblent l'indiquer les tasses sur la table, les vêtements sur cintre, les cahiers ouverts sur les bureaux. Tout semble s'être arrêté exactement à 11h10, horloges et montres figées à cette heure-là, vingt-trois ans plus tôt. Dans une chambre d'enfant ils vont trouver le journal intime du petit garçon qui vivait là et comprennent peu à peu l'ampleur de la tragédie qui a eu lieu.

Je n'ai pu m'empêcher de me demander quel était mon plus vieux souvenir, de me remémorer là où j'ai vécu enfant. Une part de moi y est-elle encore ou y est-elle morte, je ne saurais le dire, sans doute les deux, mais elle est indéniablement constitutive de ce que je suis devenue. Comment peut-on se construire sans souvenir ? L'amnésie n'est-elle pas un réflexe de défense de l'organisme face à un traumatisme ?

"Chacun n'a-t-il pas une maison où l'enfant qu'il était est mort autrefois ? "

Ne surtout pas en dire plus, si ce n'est que la construction est brillante ; l'écriture épurée et concise, incisive pourrait-on dire, sans fioritures ni digressions poétiques, au service de l'ambiance lugubre et angoissante ; le déploiement de l'intrigue est implacable pour d'autant mieux nous glacer ; la personnalité des personnages semble assez froide de prime abord pour mieux nous surprendre ensuite ; le suspense engendré par les secrets de la maison, thème également passionnant, est menée de main de maître. La lecture se fait véritablement en apnée. le titre interpelle immédiatement, l'incipit laisse perplexe, nous voilà bien harponné, jusqu'à la dernière phrase. Savoureusement haletant !

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