Je donnerais cher pour pouvoir prendre l’air ne serait-ce que cinq minutes dans une cour, gueuler un coup et m’envoyer une grosse giclée d’eau froide au visage. Je commence à comprendre la torture qu’est l’enfermement.
Je les dévisage une à une pour tenter de repérer les tueuses, les psychopathes, les violeuses, les mangeuses de bébés. Mille horreurs me passent par la tête. Des images confuses sur la prison me reviennent en mémoire. J’essaye de me souvenir, ça pourrait servir. Je me remémore ce film, l’histoire d’une Américaine emprisonnée à tort pour trafic de drogues. Est-ce qu’on la frappait et la dépouillait ? Est-ce qu’on la violait ? Est-ce que de vieilles détenues la tripotaient sous la douche ? Je ne me souviens plus. Je suis épuisée. Je voudrais dormir mais que m’arrivera-t-il si je ferme les yeux ? Alors je reste à l’affût, le doigt sur la détente.
Je suis tombée au fond d’un puits mais aucune mission sauvetage ne semble se mettre en branle pour me tirer de là.
On me crie des choses en arabe sans prendre la peine de les traduire. On tire sur ma laisse comme sur celle d’un animal apeuré.
Mon cerveau colle en vrac des images sur les mots que le flic prononce : « Il y a des tueuses. Il faut faire attention. Il ne faut pas leur faire confiance. Elles te dépouilleront, elles te frapperont, ou même pire. Il y a des folles là-bas. » Je serre les dents. Je sais qu’il veut me faire peur. Il guette ma réaction dans le rétroviseur mais j’évite soigneusement son regard. Je ne veux pas lui donner satisfaction.