Connaitrons nous une fois un jour
Le goût exact de ce dont on s'est épris
Ces délicieux condiments de notre défaite?
Je suis l'alouette
J'ai nom secret sous les plumes
Et coeur allé
Du matin qui s'avance je suis l'alouette
Dans mon aujourd'hui il y a de la nuit
Qui lentement s'achemine
Je suis l'exilée
La bougie qui brûle au coeur de l'iceberg
Deux fois engloutie
Je fais de l'immense glaçon
Une lanterne sous la mer où les poissons se rassemblent
D'un pays blanc d'un pays rouge je suis l'exilée
Je suis le muet
Un éclair a frappé mon coeur
Un obus a traversé ma langue
Mais je redis l'histoire d'un amour jamais prononcé.
On m'avait dit:venue de Bohême
Au milieu d'un siècle qui brûlait
Pouvons-nous nous contenter d'un souvenir obscur
Sédimenté dans la mémoire
Entre fougère et coquillage?
« S’il vous plaît encore un peu encore un peu de vivre ».
Je suis l'exilée
La bougie qui brûle au cœur de l'iceberg
Deux fois engloutie
Je fais de l'immense glaçon
Une lanterne sous la mer où les poissons se rassemblent
D'un pays blanc d'un pays rouge je suis l'exilée
Je voulais une maison
Avec nid et cigognes sur toit
Et ce sont les corbeaux qui ferment mon ciel
À plates coutures de traits noirs
J’habite une boîte-chambre-aux lettres
D’où chaque jour j’attends
Qu’un amour de papier plié glisse jusqu’à terre
J’aimerais une fois poser une étoile
Au sommet de mon arbre
Et que l’on me voie avec cet air de fête
Mais à mon lit de paille
Vient brouter un cheval rouge
Ainsi que mes deux enfants-poulains
Quand ma très grande solitude
Fait de notre chambre une steppe
Pèseraient-ils autant
Ces jours d’exil et d’iceberg
Si je ne savais pas déjà
Quel terrible nœud ponctuera mon épilogue ?
Je suis la femme-saumon
Ce que je dois accomplir est écrit
Sur un endroit de mon corps
Que les gitanes ne savent pas lire
D’une triste histoire je suis la femme-saumon
Trois siècle changée en poisson
Avant de retrouver ma belle allure
Mes seins mes jambes
Grandir et déborder la fontaine
On finit par noyer père et mère
C’est tout un royaume qui coule
Ecoute-moi beau pêcheur
Si tu me veux encore
Alouvie par tant d’années de halètement
Nous nous rencontrerons
Là où les eaux se mélangent
Le plus sûrement à la Saint-Glinglin
(il n’y a pas si petit saint qui veuille sa chandelle)
Regarde bien
L’inexplicable stupeur
Avec laquelle je remonterai la fontaine
Sera le premier signe de ma métamorphose
Dans mes yeux tu liras combien j’aurai hâte
D’être
Et toutes mes forces vives sauteront de joie
Sur la berge où tu seras