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Critique de segrob


Dans le cadre de Masse Critique, j'ai fait la découverte d'un auteur, Joseph Incardona, un italo-suisse de 43 ans, qui écrit pour le théâtre, la BD, le cinéma et pour le bonheur des amateurs de polars noirs. Ses sources d'inspiration sont le roman social et la littérature américaine du 20ème siècle (Fante, Kerouac, Bukowski, …).

« Trash Circus » est son 6ème roman (édité aux éditions Noir 7.5 Parigramme).

En lisant la quatrième de couverture, je ne m'imaginais pas à quel point ce livre était …trash.

Tout d'abord, ce polar n'est pas à mettre en toutes les mains. Ames sensibles et romantiques, esprits pudiques, s'abstenir !!
Ce qui est sûr, c'est qu'il ne laisse pas indifférent. En lisant les critiques de nos amis « Babélio » , certains ne sont pas allés au bout et d'autres ont adoré !
A mon tour de vous apporter des éléments afin que vous puissiez vous faire une idée plus précise.

J.Incardona nous décrit l'existence d'un homme, Frédéric Haltier, fils unique, issu d'un père alcoolique qu'il n'a vu que trois fois ces quinze dernières années et d'une mère disparue assez tôt, venant d'un milieu social plutôt pauvre, pas d'amis, marié par erreur, veuf suite à un accident de voiture, sans fibre paternelle pour ses deux filles jumelles qu'il a placées dans un internat et enfn supporter par héritage du PSG.

Jusque-là, son dossier est chargé mais pas de quoi en faire un polar…

Cette biographie « côté vie privée », nous la construisons au fur et à mesure, car l'auteur distille chaque détail au compte goutte au détour de situations plus ou moins coquasses et tout au long de ses 31 chapitres qu'il répartit en trois parties.

Au cours de la dernière semaine d'Octobre (1ère partie), nous apprenons que Fred est en réalité un hooligan, de ceux qui préfèrent se réunir avant-match pour se mesurer aux hooligans adverses plutôt que de regarder le match.
Nous apprenons, comme signe de revanche par rapport à sa condition sociale initiale, que Fred vit dans un somptueux appartement, ne jure que par des habits et des accessoires de luxe (Porsche, Rolex, Hermès ….). Il a de plus intégré une société de production télévisuelle, et se trouve à la tête d'une émission qui fonctionne très bien et qui a pour concept de faire confronter en direct violeur et violée, assassin et famille de victime, …
L'autre trait de sa personnalité, fondamental et destructeur, est sa relation avec les femmes et le sexe.
On imagine que Fred a gardé des séquelles affectives de son enfance malheureuse. Il ne conçoit pas de relations sexuelles sans violence, sans domination et comme il le dit d'ailleurs, il laisse le sentiment de l'amour à d'autres.
Fred est intelligent et sait qu'il est dans une spirale sans fin, d'autant plus que drogue, alcool et médicaments en tous genres font partie intégrante de son « alimentation » quotidienne.
Pour couronner le tout, Joseph Incardona lui rajoute une tare, celle qui est son patronyme. Il est effectivement très fier, « Haltier », sans compassion, ni tolérance, raciste et a un comportement presque animal.
De cette vie qu'il ne maîtrise plus, va découler des actes irréversibles et irréparables.
Fred s'enfonce toujours plus et comme il le dit , il n'a pas d'autre issue que de continuer…

Les deuxième et troisième parties illustrent cette descente aux enfers, cette sensation qu'à chaque fois qu'il faut prendre une décision qui pourrait renverser le cours de sa vie pour une vie meilleure, il fait le mauvais choix. A tel point qu'on se prend à le déculpabiliser, qu'on estime qu'il a raison de ne pas se laisser faire, à le protéger.

La chute de ce roman noir rend compte de cet état de fait : passer de la lumière à l'ombre en quelques secondes, tout en étant totalement dépendant d'un autre, les pieds et poings liés, sans aucune réaction possible, pris à son propre piège, à son délire, à sa jalousie mortelle, à sa folie…

Joseph Incardona a une façon très cinématographique d'amener les situations. Il me fait un peu penser à Tonino Benacquista dans « Quelqu'un d'autre » par exemple. Il ponctue souvent les dialogues par une description des gestes de Fred.

Vous l'aurez compris, son vocabulaire très âpre, vulgaire, cru, pornographique à certains instants, ses descriptions très réalistes, détaillées, ses extraits de slogans publicitaires ont pour objectif de nous faire part de sa vision de notre société contemporaine, très bling-bling, dans laquelle l'amour ou plutôt le sexe fait partie des choses consommables. La finance, les médias ainsi que la face « cachée » du business footballistique nous sont aussi jetés en pâture après qu'il les ait mâché et mis à nu.

C'est pour ma part un auteur que j'aurai le plaisir de lire afin de me rendre réellement compte de son talent et de l'éventuelle diversité des scénarii qu'il peut nous proposer.

Merci encore aux Editions Parigramme et à Masse critique !
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