Un roman bigarré, enlevé, qui nous fait vagabonder avec ce brave Collot aux quatre coins d'un siècle tourmenté et de l'expérience humaine. D'un rebondissement à l'autre, on suit avec délices les mésaventures de ce héros aux mille métamorphoses, dont "artilleur" n'est qu'une des innombrables casquettes. Collot ressuscite avec justesse le roman d'aventures à l'ancienne, et rend un bel hommage à la littérature picaresque dont il s'inspire. A découvrir !
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En chemin vers la métairie de mes parents... j'eus faim. Vraiment faim... Ces champignons étaient tout ce que je trouvais pour me caler la dent creuse... J'en mâchai des douzaines... Je repris ma route. Puis je dus m'asseoir. Puis m'allonger au creux d'une haie... Le ciel s'approche de moi. Les nuages prennent des couleurs intenses et impossibles. Le vent me parle. Tel un oiseau des mers je vole au-dessus de la campagne. L'infini est à portée de main. Le temps s'agrandit. Disparaît. Une femme, belle, m'apparaît. Je ne l'ai jamais vue. Je sais qui elle sera. Mon corps n'est plus là.
Il faut comprendre mes paroles et mes pensées d'alors. Il faut les remettre dans leur époque. En ces années-là, si proches et pourtant si lointaines, la monarchie, si ancienne, semblait devoir être éternelle. Je ne savais pas que le destin, dans un immense, un fulgurant coup de balancier me ferait, nous ferait -moi et des centaines de milliers d'autres hommes- défendre bec et ongles, au péril de nos vies, avec un sens de la liberté et un idéalisme presque fous, une autre république, l'Une et Indivisible République française. Ce qui, quelques années plus tôt, du temps des rois, me semblait totalement inimaginable deviendrait réalité. Nous serions tous comme enivrés par la Révolution et par la République, tout comme Boswell l'avait été par Paoli, par ses combattants et par la beauté de la Corse.