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Critique de Aquilon62


SUJET N°1 :
Qu'est-ce que la démocratie ?

SUJET N°2 :
Démocratie classique et démocratie moderne

SUJET N°3
Commentaire de texte :
"Il faut faire de la politique, mais il faut savoir qu'il n'y a pas que la politique. Parce que la France n'est pas seulement une réalité politique. Parce qu'elle est aussi une famille de familles réunie par une espérance partagée, la foi qui nous fut longtemps commune. Il nous appartient de nous conduire en héritiers de cette famille qu'illustre le cortège immense de nos héros et de nos saints. Cela exige d'entretenir en nous l'amour et la connaissance de notre Histoire ; l'admiration pour nos cathédrales, nos églises romanes, nos châteaux et nos sanctuaires, les palais de nos rois, les alignements de nos buis, les quatrains de nos poètes, les merveilles de notre littérature, la geste de nos héros, la douceur de nos collines. La France est ce pays dont les paysages portent plus qu'aucun autre, peut-être, la marque et la patine du long travail du temps. Où les routes serpentent dans la carte du Tendre, où les montagnes couronnées de neige plongent leurs parois brutes dans l'azur enchanté de la plus belle des mers ; où les forêts elles-mêmes élèvent leurs futaies comme la voûte d'ombre d'une cathédrale ; où surgissent, de la moindre colline, de somptueux châteaux ; où les coteaux taillés en espaliers pour y accueillir des alignements de vignes surplombent des fleuves qui tendent le miroir de leurs eaux argentées vers le bleu profond du ciel. Elle est ce pays qui a vu naître la chanson de geste et les comédies de Molière, l'amour courtois des fabliaux et les Pensées de Pascal, les bergeries de Rousseau, les tragédies de Corneille et les raffinements délicieux et pervers De Laclos. On y a bâti le Mont-Saint-Michel et la basilique de Vézelay, Notre-Dame de Paris et la cathédrale de Beauvais, Cluny, Cîteaux, Fonfroide, Fontainebleau, Chantilly et Versailles. On y a inventé les jardins de Le Nôtre et joué Les Plaisirs de l'île enchantée ; créé Les Indes galantes, La Damnation de Faust et le Prélude à l'après-midi d'un faune ; mis en musique le cantique de Racine sur un air de Gabriel Fauré, la légende Rebecca sur une composition de César Franck ; on y a sculpté Notre-Dame de Grâce et l'Ange de Reims ; conçu le portail de Conques et la Porte de l'enfer de Rodin ; peint le retable du Maître de Moulins, les ports de Claude Lorrain, la promenade du chancelier Séguier et la mort de Sardanapale, Impression soleil levant et Les Coquelicots ; on y a écrit La Princesse de Clèves et La Comédie humaine, Une saison en enfer et À la Recherche du Temps perdu, Madame Bovary et La Chartreuse de Parme, Booz endormi et Le Dormeur du val, Les Fleurs du mal et le Diable au corps, La Reine morte et le Hussard sur le toit, Antigone, Aurélien et Voyage au bout de la nuit ; on y a tourné Le Schpountz et La Grande Vadrouille, La Kermesse héroïque et Les Tontons flingueurs, Baisers volés et Plein Soleil, Un taxi pour Tobrouk et Que la fête commence, Tous les matins du monde et La Grande Illusion, Les Enfants du paradis, Drôle de drame, les Diaboliques et Flic ou voyou. On y a multiplié les grands crus, les fromages, inventé la baguette, mis au point la recette du turban de filets de sole à la carmélite, le buisson de mauviettes en cerises et la poularde en demi-deuil. On y a donné corps et âme à Cyrano et D Artagnan.
Il nous appartient d'entretenir en nous et d'insuffler à nos descendants la fierté de l'héritage reçu en même temps que l'humilité de nous reconnaître débiteurs de ceux qui nous l'ont transmis."
Extrait du Cabinet des Antiques - Michel de Jaeghere - Pages 534 à 535

Si on considère que c'est de la philosophie vous avez 4 heures.
Si on considère que c'est de l'histoire vous avez 4 ou 3 heures selon votre série.

Pour y répondre la meilleure des solutions est se plonger dans cet ouvrage, et autant le dire tout de suite l'érudition dont fait preuve l'auteur ne connaît, aucune limite.
Car c'est du grand art que de réussir à rassembler dans une seul et même ouvrage des sources aussi différentes, diverses et diversifiées qui vont de l'Antiquité (avec par exemple Aristote, Cicéron, Euripide, Hérodote, Saint Augustin ou Xénophon) au oeuvres médiévales, modernes et contemporaines (Tocqueville, Chateaubriand, Condorcet, Hitler, Montesqieu ou Rabelais).
Et l'auteur réussit ce pari avec maestria. Alors certes par moment le propos peut être plus incisif et sujet à discussion. Mais on ne pourra jamais reprocher le manque d'argumentation et de clarté dans chacun des sujets abordés.
C'est magnifiquement écrit, jamais ennuyeux et c'est une source de connaissances inépuisables à laquelle l'auteur nous propose de nous abreuver.
Nous sommes très loin des idées lancées à l'emporte-pièce par des démagogues en mal de notoriété ou de reconnaissance voire les 2 à la fois, et pour qui l'important est plus sûr la forme que le fond.

À propos sur le titre même le Cabinet des Antiques, il pourrait faire référence au livre d'Honoré de Balzac qui désigne le milieu de cette vieille noblesse de province, ruinée par la Révolution et oubliée par les Bourbons restaurés.
Mais la référence est tout autre, et c'est l'auteur qui nous donne la clé

"Louis XIV avait à Versailles son cabinet de Médailles, qu'il ouvrait volontiers à ses visiteurs de marque, comme faisaient tous les princes, les riches aristocrates de son temps. Mazarin avait sa propre galerie d'antiques, qu'il parcourait, à la fin de sa vie, en disant : « Il faut quitter tout cela ! » Ces trésors suscitaient alors une admiration d'autant plus vive que les élites étaient nourries depuis l'enfance par la lecture, l'étude des auteurs de l'Antiquité classique, la méditation des exemples de comportements et de situations que proposait l'histoire antique, où l'on croyait pouvoir trouver des réponses universelles. Rabelais s'est moqué de cette éducation passéiste et livresque."
Et de poursuivre
" Nos Modernes ont choisi d'aiguiser plutôt les esprits par le calcul, les chiffres, la tyrannie des mathématiques et des sciences naturelles, convaincus qu'il y avait plus de sagesse dans la connaissance des ressorts cachés des lois de l'univers que dans l'improbable quête de celles de la nature humaine. Cette révolution a suscité les progrès indiscutables de la science, de la médecine, les facilités des transports, la circulation numérique de l'information, l'amélioration exponentielle de notre confort. Elle nous a fait bénéficier d'une pluie de gadgets sans lesquels nous n'imaginons plus notre vie quotidienne. Elle nous a éloignés des interrogations sur les ressorts de l'âme humaine. Sommes-nous bien certains de n'avoir rien perdu au change ? "

Une chose est certaine c'est que ce livre a pour lui de nous emmener aux sources de notre civilisation, et de nous proposer un voyage engagé, riche et sinueux, mais tellement passionnant.
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