« -Oh Frédéric !
-Ouille !
-Pardon.
-Je t’aime.
-Je t’aime. »
(Quand on dit qu’un dialogue doit servir l’histoire, là on est servis, n’est-ce pas ?)
Le silence était tombé sur la table. Personne n'osait prendre au sérieux le récit de la jeune femme, mais, en même temps, personne ne voulait briser la part de rêve qu'elle avait apportée avec elle.
Le comte de Neipperg allait deviner que Marie-Louise avait voulu protéger son amie. Qu'allait-il faire,alors? Allait-il parjurer son amour, l'abandonner? Ou croirait-il que Marie-Louise était dupe ? Il la prendrait pour une sotte ,alors... En attendant ,que faire? Comment prévenir la chute ? Marie-Louise frissonna, elle quitta le balcon en se frictionnant les épaules . Il n'y avait pas de solution pour le moment ; il fallait s'y résoudre. Le moindre mouvement de sa part ne ferait que précipiter les soupçons. Elle n'avait qu'une chose à faire. La pire . Attendre.
Fanny sourit et avala sa salive. Pour l'instant, on n'avait parlé que de politique.C'était heureux. La jeune femme savait que, tôt ou tard, on allait l'interroger. Certes, elle n'aurait pas de peine à inventer quelque chose, mais le plus tard serait le mieux. Pour l'instant, elle n'avait pas la moindre idée. Elle tachait de regarder brièvement tous les convives, sans jamais s'attarder. Elle craignait d'attirer l'attention.
-S'ils ne tirent pas bientôt, je vais m'évanouir, dit Frédéric.
Fanny leva les yeux. Elle voulait voir le ciel, une dernièrne fois. Un oiseau de passage, intrigué sans doute par cet attroupement incongru, traça un cercle dans le bleu limpide et reprit sa route vers le palais.
-Oh! Regarde...Une colombe.Tu crois que c'est un signe? Un bon signe?
Frédéric secoua la tête.
-Ce n'est pas une colombe, c'est un pigeon.
Il y a parfois des silences imprévus, étonnants, qui vous frappent les sens plus violemment que le tonnerre.