Citations sur Il était une fois, Tome 2 : La belle et la bête (58)
Elle qui n'avait jamais senti l'odeur de la mer la reconnut pourtant immédiatement. C'était une odeur sauvage et iodée, qui sentait bon la liberté, et la fit rêver de voyages au long cours vers des îles dont elle n'avait jamais entendu parler.
- Vous me laissez en plan?
- Moi? Je fais quoi? demanda-t-il par dessus son épaule. Je vous laisse... en plan? Eh bien, oui.
Linnet le contourna et se planta devant lui pour l'empêcher de franchir la porte.
- Pourquoi ne voulez-vous pas m'écouter?
- Parce que vous dîtes des âneries.
Je suis reconnaissante au comte d'avoir pris soin de moi, déclara Linnet avec calme. Mais j'ai décidé de ne pas l'épouser. Après tout, lui-même avait pris cette décision avant que je tombe malade. Je ne me marierai pas avec quelqu'un qui a pitié de moi. Jamais.
- Si tu me jettes dehors, je dormirai sur le chemin. Si tu retournes en France sans moi, je te suivrai. Je me construirai une cabane devant ta grille, je dormirai sous ta fenêtre, je t'attendrai devant ta porte.
Elle porta la main à sa bouche et laissa échapper un petit rire.
- Tu as perdu la tête, Robert!
- Au contraire, je l'ai retrouvée. Je suis amoureux de toi, et je l'ai toujours été. Même quand j'étais incapable d'une pensée cohérente et que l'opium m'embrumait l'esprit, il y a une chose que je savais: que je t'aimais.
Mais il lui suffisait d'apercevoir sa haute silhouette pour que son coeur batte à tout rompre et qu'une onde brûlante la submerge. Inutile de se voiler la face: si l'occasion se représentait, elle enverrait de nouveau sa vertu par-dessus les moulins. encore et encore.
- Tu es une femme intelligente. Tu possèdes un atout extrêmement précieux sur le marché, et dont la valeur est doublée du fait de ta beauté. Pourquoi diable me le céderais-tu, et pour rien?
- A t'entendre, je suis à vendre au plus offrant. Eh bien, ça a peut-être été le cas, continua-t-elle lorsqu'il garda le silence. Mais les enchères sont retombées parce que tout le monde croit que je ne possède plus cet atout ô combien précieux.
Linnet viendrait à lui. Non pas qu'il y accordât de l'importance, puisqu'il s'agissait d'un jeu entre eux. Ce qui le fascinait, ce n'était pas le flirt, mais ce qu'il pressentait de similitudes entre eux.
A sa manière, elle était aussi peu "aimable" que lui, parce qu'elle était trop belle, trop intelligente, et avait la langue trop acérée.
Sauf que lui n'était pas beau.
- Vous êtes toujours aussi sarcastique? s'enquit Piers, l'air un peu abasourdi.
- Non. Je suis une fille très gentille. Mais vous faites ressortir ce qu'il y a de pire en moi.
Piers se tourna vers elle pour l'observer. Même si cela lui coûtait, il s'efforça de voir au-delà de sa peau crémeuse et de ses longs cils. Et il découvrit tous les signes d'une vive intelligence.
Comment son père s'était-il débrouillé? Où l'avait-il dénichée?
Lorsque Piers abaissa le regard sur le corps infiniment délectable de sa fiancée - de sa fiancée supposée -, il sut qu'il s'exposait à de graves ennuis.
C'était son père qui l'avait choisie, que diable! Piers excluait donc d'avoir quelque chose à voir avec elle, aurait-elle été la plus belle femme de toute l'Angleterre.
Ce qu'elle était, souligna une petit voix dans sa tête. Non seulement il n'avait jamais vu de femme aussi exquise, mais il n'imaginait même pas qu'elle pût exister.