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Critique de colka


Le Tour d'écrou... Titre à la fois intrigant et inquiétant pour toutes les évocations qu'il peut suggérer. C'est en tout cas un coup de maître pour Henry James de maintenir, tout au long de la lecture de ce roman, sa lectrice ou son lecteur dans le vertige du doute : celui dans lequel va les plonger ce récit noir et envoûtant.
En effet, tout est sujet à caution dans ce roman : les éléments du fantastique auxquels se réfère James; le fil de l'intrigue constamment rompu par des ambiguïtés déroutantes, les personnages dont le comportement se prête à de multiples interprétations. A commencer par celui de la narratrice, institutrice de son état et qui va se voir confier la charge de s'occuper de deux orphelins, Miles et Flora, dans une propriété de la banlieue londonienne, Bly. Pour la seconder, Mrs Grose, l'intendante, une brave femme qui a bien les pieds sur terre.
Si l'on adopte un postulat de lecture qui réfute le surnaturel et les apparitions, cette jeune femme dont on ne connaîtra jamais le nom présente un profil psychologique très inquiétant. Comment ne pas être dérangé par le fait que très vite les apparitions de deux personnages, Quint, le majordome et Miss Jessel, l'ancienne institutrice, vont la conduire à malmener son entourage, en l'occurrence Mrs Grose, avec laquelle elle va entretenir des rapports très complexes mêlant persuasion, aveux forcés puis une forme de persécution qui va avoir raison du bon sens de cette femme peu habituée par sa fonction à faire front face à l'adversité. Même jeu pervers avec les deux enfants dont elle a la charge. D'abord complètement idéalisés, ils vont devenir peu à peu dans son esprit des êtres diaboliques, sous l'influence des deux revenants maléfiques que sont devenus Quint et Miss Jessel, morts dans des circonstances que l'on ne connaîtra jamais. Obsession d'un complot qui se tisserait contre elle, paranoïa qui va d'abord la pousser à se poser comme sauveteuse des enfants, puis comme leur persécutrice, sa folie va la conduire au dérapage dramatique d'une situation qu'elle ne contrôle plus...
Oui mais... Cette lecture n'est pas la seule possible car le récit qui nous est fait par la narratrice concerne des faits passés, alors qu'elle a poursuivi apparemment sa carrière dans d'autres familles sans que rien ne puisse lui être reproché bien au contraire. Quid alors de sa folie ? Même si l'on doute de l'existence des deux revenants maléfiques que sont Quint et Miss Jessell comment mettre en doute les propos de Mrs Grose qui les dépeints comme deux êtres nuisibles et manipulateurs ? Quid alors de leur réelle influence et de leurs relations avec les deux enfants qui refusent d'en parler ? Vue sous cet angle, c'est un tout autre histoire qui se dessine...
Rien n'est donc simple dans ce roman et c'est ce qui, à mes yeux, est passionnant car à chaque instant tous les faits qui se présentent peuvent être soumis à une double lecture.
Je pourrais ajouter également que si l'on accepte les codes d'une écriture délicieusement surannée, certaines scènes d'apparitions ou avec les enfants sont d'une intensité dramatique et émotionnelle à couper le souffle.
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