Il dormit mal, d’un sommeil agité.
A un moment, il s’était redressé brusquement dans son lit, alors qu’il discutait avec le juge Delorme… à 5 heures !
Il avait juré, puis, s’étant rallongé et tourné sur le côté, la fatigue l’avait enfin terrassé.
Cette fois, ce ne fut plus un sommeil en surface, mais en profondeur, à telle enseigne qu’il n’entendit pas la sonnerie du réveil et que Maïté dut le secoué à plusieurs reprises avant qu’il ne consente à ouvrir un œil.
Un peu moins d’une heure plus tard, la bouche amère d’avoir trop fumé et pas assez dormi, il répondait au salut de son chauffeur en s’engouffrant dans la 404 du service.
- On va à la boite, monsieur le principal ?
Ce n’était pas une question, mais la reprise d’une habitude quotidienne. Il embraya sans attendre de réponse.
- Négatif !
Thiébaut avait répondu d’instinct, suivant une impulsion du moment qui l’étonna.
- Impasse Tatin, Jules.
Il lui fallait voir au moins les lieux, sentir leur atmosphère, avant de se plonger dans la routine policière.
A trois heures, un coup de fil de Jules, donné depuis la poste de Meudon, avait prévenu Jeanne d’avoir à réunir l’équipe à 17 heures.
Interrogé sur le but de cette escapade, le chauffeur n’avait pu rien en dire, la tante n’ayant échangé que les banalités avec le patron durant tout le trajet.
Le commissaire avait dix minutes de retard. Ils étaient là, à l’attendre, intrigués, surtout Lambert le méthodique. Un vicieux du carnet noir à l’ancienne, couverture de moleskine et le large élastique ; il le plaçait toujours en équilibre sur son genou.
Pour cet homme rondouillard, à la mine réjouie, une affaire c’était avant tout un long rapport, nourri de détails, de dates, de chiffres, de renseignements glanés non pas au hasard mais selon une chronologie parfaite.
Quant au balafré, qui s’était fait raconter vieille dame par Jeanne, il avait hâte de la rencontrer.