"
D'Artagnan, journal d'un cadet" trônait dans ma librairie, me narguait et même me provoquait: "craque... mais craque puisque ce nom chéri entre tous se détache sur ma couverture...", "Oui, je parle des Trois Mousquetaires... oui je réécris l'histoire à ma manière... et je sais que tu n'aimes pas ça... mais avoue: tu as envie de m'emporter avec toi...", "Tu ne peux pas passer à côté de D'Artagnan, Athos, Porthos et Aramis quand même et ce même si je te déçois...", "je te tente, je sais que je te tente: assume!".
Bon, j'ai fini par craquer et le Journal de mon cadet de Gascogne m'a suivie chez moi. Séduisant, attirant. Et vaguement repoussant aussi. "
Les Trois Mousquetaires", ce n'est pas rien, loin de là. Précieux, chéri, c'est mon Livre Sacré à moi et je n'aime pas quand certains ont l'outrecuidance de s'en emparer, ça réveille en moi la croisée, la fanatique. Et de fait, je les trouve rarement à la hauteur de l'Oeuvre, ces fous. Mais il faut vivre dangereusement ainsi que me l'a d'ailleurs appris
D Artagnan et si lui n'a pas eu peur d'un Rochefort, d'un Jussac et de ses sbires, je n'aurai pas peur d'un
Nicolas Juncker. C'est donc dans cet état d'esprit tout mousquetaire que je me suis plongée dans le Journal d'un cadet...
Mordiou, c'est qu'il est bon
Nicolas Juncker et qu'il a du talent, le bougre! Et puis, il aime "
Les Trois Mousquetaires", ça se voit, ça se sent et surtout, ça me plait... Son ouvrage a mis en touche mes ardeurs belliqueuses et m'a conquise en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire et j'ai adoré "
D'Artagnan, journal d'un cadet" de la première à la dernière page qui est à la fois une bande dessinée de haute volée et une réécriture des Trois Mousquetaires très réussie et particulièrement vivante.
Ce qui participe selon moi grandement à la réussite de l'ouvrage est son originalité: ici l'histoire des plus célèbres des mousquetaires est racontée uniquement du point de vue de D'Artagnan qui confie ses (mes)aventures à son journal. Ainsi, si nous retrouvons les grandes lignes du roman, nous les découvrons sous un angle complètement différent, plus personnel. On ne sait rien par exemple des relations houleuses entre le roi et la reine qu'on se contente de frôler, figures lointaines que notre gascon ne fait qu'entrapercevoir... Non content de nous faire revivre l'histoire de l'intérieur,
Nicolas Juncker s'amuse également à combler tous les blancs du roman original en brodant, à approfondir et enrichir des détails glissés ça et là par Alexandre (le Grand) Dumas. Tout cela m'a donnée l'impression de lire les dessous des Trois Mousquetaires, de pénétrer dans les coulisses et leurs loges et j'ai adoré. Étrangement et alors que les personnages en prennent quand même un sacré coup, cela les rend encore plus attachants, plus profonds qu'ils ne le sont déjà, plus humains...
"
D'Artagnan, journal d'un cadet" constitue donc un récit plus intime que "
Les Trois Mousquetaires", il est plus sombre aussi, plus amer puisqu'il dévoile les hommes derrière les héros -et ce n'est pas toujours glorieux, loin de là- mais cela confère au livre beaucoup de gravité, de profondeur et ce n'est pas sans beauté. Bien au contraire.
Mais pour autant, amertume et gravité ne dédaignent pas l'humour et de cela, "
D'Artagnan, journal d'un cadet" en est plein et en déborde même. Les situations cocasses ne manquent pas et D'Artagnan est un narrateur plein de malice et d'une mauvaise foi réjouissantes: il suffit de lire les faits qu'il rapporte et de se pencher sur les illustrations (piquantes, vives et complètement jubilatoires) qui les accompagnent pour s'en rendre compte et se fendre d'un fou rire!
Même si ça ne vaut pas
Alexandre Dumas (il ne faut pas déconner non plus!),
Nicolas Juncker se rapproche du Maître avec cette bande dessinée qui allie la profondeur et l'amertume à la légèreté, la drôlerie et au plaisir pur et simple surtout du récit d'une bonne histoire.
Et en cela, il mérite bien sa nomination dans la compagnie de Monsieur de Tréville. Chapeau bas, "un pour tous et tous pour un!"