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Critique de le_Bison


Un vent glacial, signe hivernal, qui me saisit à la gorge dès la sortie du bureau où j'ai flemmardé ou d'une salle obscure où j'ai vagabondé. le climat se détraque, l'ami. J'ai froid, mes yeux pleurent. Eve est partie.

Rentrer chez moi, dans cette maison vide ou presque, un verre d'Islay pour réchauffer l'âme. Et se prendre pour un oiseau blanc dans le blizzard. (oui, j'ai tendance à me prendre pour un oiseau quand je bois un peu).

Imaginer encore cette belle Eve (énigmatique comme une ex-James Bond Girl) descendre les escaliers du sous-sol dans une tenue si vaporeuse qu'elle ferait frémir n'importe quel gamin en train de se masturber devant la vieille collection de Playboy du paternel. Imaginer justement la moustache du paternel (au sourire aussi avenant qu'un flic dans une unité spéciale de New-York) façon Village People des années 80. Mais avant tout, sortir le livre de Laura Kasichke, qui prenait la poussière et l'humidité automnale depuis trop longtemps, A White Bird in the Blizzard. Pour bien pénétrer l'air froid de l'Ohio.

Une journée tranquille donc, sous le soleil de l'Ohio. A Garden Heights, toutes les maisons se ressemblent. Pas de clôture, une petite pelouse verte, une entrée de garage pour le break familial. D'ailleurs toutes les familles se ressemblent aussi un peu. Et puis dénotant un peu au milieu de ce conformisme de la petite bourgeoisie, se trouve Eve qui au final n'est pas à sa place. Elle rêve de voler comme un oiseau, mais à la place, elle prépare le diner pour son mari et sa fille Kat (qui a été appelé ainsi parce qu'elle voulait juste avoir un chat), elle nettoie la maison, passe l'aspirateur et le plumeau, prépare des tas de cookies pour s'occuper, trop de cookies, et doit surveiller sa ligne. Moi, je la surveille, quand elle passe le plumeau, nue dans le grand salon, fenêtres à peine voilées par des rideaux aussi crèmes que transparents.

Une soirée banale où le soleil clos sa brève conversation avec les mornes plaines de l'Ohio. Kat rentre de l'école, son père déjà à table l'air pensif et abattu – comme tous les jours - la moustache ayant abandonné tout frétillement depuis quelques années déjà. Sauf que le repas n'est pas prêt. Eve a disparu sans laisser de mot ni de trace. Envolée comme un oiseau hors de sa cage. Évaporée comme la brume matinale qui s'élève de la pelouse, alors que l'arrosage automatique s'est lancé à 5h00 du mat'. Elle est partie.

Un premier hiver, un second puis un troisième. La vie en Ohio s'écoule de nouveau normalement. Ou presque. Il y a toujours ce manque qui n'en est pas vraiment un. Cette disparition qui n'en est peut-être pas une. Serons-nous un jour ce qui s'est passée dans la tête d'Eve. L'ennui d'une femme au foyer, le besoin d'aventures, la sensation de n'être plus à sa place. Et le temps qui défile sous ses yeux alors que Kat change de classe, arrive au collège, au lycée, bientôt à l'université. Eve qui veut rester jeune et belle mais Eve qui n'est pas faite pour rester dans une maison payée à crédits à Garden Heights, dans l'Ohio. A-t-elle fugué, fait une mauvaise rencontre, partie avec un nouvel amant. Morte ou vivante. L'attendre et espérer son retour ou ne plus se bercer d'hypothétiques illusions. Après tout, elle n'est peut-être que perdue dans ce terrible blizzard d'un hiver dans l'Ohio où la rudesse de l'hiver, sans son pull marine, ressemble à un séjour dans un congélateur.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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