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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Kerr avait mis la barre haut: pour nous narrer les premiers pas de son héros, évidemment situés en république de Weimar, il a emprunté son titre au chef d'oeuvre de Fritz Lang. le Metropolis de Fritz Lang, tourné en 1923, situe dans le futur un monde où ultra-riches et damnés de la terre s'opposent avant de se réconcilier, l'ordre national-socialiste ayant éliminé la lutte des classes.
Le film était déjà une allégorie transparente de l'Allemagne de l'entre-deux-guerres et le roman de Kerr veut lui aussi retranscrire l'atmosphère de l'éphémère république et de surcroît il multiplie les clins d'oeil au film: procès de la pègre dans les bas-fonds, amour de la jeune socialiste abandonné au profit d'une aventure avec Thea von Adlon (fervent soutien d'Hitler), personnage idéaliste cédant au crime et à la corruption... Surtout, Kerr parvient à bousculer un tableau somme toute classique de la république de Weimar en faisant de la question juive un problème central. Un Juif ne peut être un personnage comme les autres, il ne peut être ce qu'il est sans que sa religion ne fasse de chacune de ses actions un problème politique. S'il embauche un autre Juif, c'est bien sûr par communautarisme, s'il ne l'embauche pas, c'est par calcul et duplicité. Dans cette Allemagne pré-nazie, on ne peut être Juif et innocent, on ne peut même pas être coupable et juif sans que des arrière-pensées n'interfèrent et nient la banalité de la situation.
Le problème, c'est que le roman de Kerr préfère le texte au sous-texte. Entre deux actions languissantes, mais qu'est-ce que ça cause. Ça cause, ça ratiocine et ça philosophe, ça glose à tout va, ça recadre, ça explique et ça contextualise.
« Vous savez quoi, patron? poursuivit Trettin. En écoutant la lecture de cette lettre, je repensais à ce que vous avez dit à propos de ces deux médecins. Vous les avez qualifiés d'eugénistes. Et pas seulement. Ils sont partisans d'exterminer tous les individus qui ne sont pas utiles à la société.
-Hélas, dit Weiss, ces théories pseudo-scientifiques sont largement répandues de nos jours. Surtout en Allemagne. Et défendues par certaines personnes hautement respectables. Jusqu'à sa mort, il y a quelques années, Karl Binding était un des plus fervents partisans de l'euthanasie, comme il disait. Et le psychiatre Alfred Hoche prônait l'élimination des handicapés et des malades mentaux. »
Voila, c'est donc peu de dire que l'intrigue musarde du côté du cours d'histoire. Je n'ai rien contre mais, là, c'est quand même un peu lourdingue. D'ailleurs le coupable laisse trainer l'arme du crime et les scalps de ses victimes dans son coffre (Pourquoi se gêner?). L'enquête tient un peu trop du prétexte. Kerr fait dans la référence historique, il ne va pas en plus s'embêter à bâtir une intrigue policière un minimum excitante.
Bilan: je me suis poliment ennuyée et ça m'a donné envie de revoir le Cabaret de Bob Fosse: Willkommen! Bienvenue! Welcome!... Moralité: Bernie-le-jeune m'a assoupie mais Liza sur sa chaise m'affole toujours autant.
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J'ai retrouvé avec grand plaisir mon policier préféré Bernhardt Gunther, appelé dans ce livre à collaborer avec la police des moeurs pour enquêter sur le meurtre de prostituées dans le Berlin de 1928. Il va être obligé de se confronter avec un chef de la mafia locale dont la fille, justement, a été assassinée. Comme si ces crimes ne suffisaient pas, voici qu'un meurtrier s'en prend à des vétérans de la première guerre mondiale qui n'ont d'autre ressource que la mendicité.
À travers ce livre, Kerr nous fait faire une prodigieuse balade dans le Berlin des pauvres et des soldats handicapés devenus mendiants, celui aussi des "dépravés" (au yeux de l'époque), soumis aux mafias de tous poils, et l'écrivain s'efforce avec succès de mieux nous faire comprendre cette espèce d'anarchie qui a précédé la montée du nazisme.
Kerr possède une vision dans laquelle il intègre sans faille la plus petite de ses descriptions. Tout est utilisé, rien n'est laissé au hasard. Quand Kerr place Bernie dans une situation particulière il en exploite tous les aspects, policiers bien sûr mais aussi politiques, moraux et historiques. Les conséquences tombent comme le couperet d'une fatalité des éléments qui se sont mis en place un peu comme dans les tragédies de Sophocle. Bernie déduit ce qui arrive de ce qu'il observe, certes, mais avec l'impression que les choses lui échappent car, s'il s'appuie sur son esprit logique et sa connaissance des êtres humains dans les pires situations possibles, il reste toujours ce je ne sais quoi d'impondérable qui enclenche un mécanisme et qu'il ne découvre qu'à la conclusion finale, enchaînement des circonstances, luttes pour la survie, morales et justices parallèles aux lois affichées. Bref Kerr nous décrit ici un monde unterground beaucoup plus fort que celui à la dérive dans lequel survit le Berlin d'après-guerre et qui fait peu à peu le terreau du nazisme.
Si l'intrigue m'a parue plus faible que dans les précédentes enquêtes de Gunther, en dépit de quelques rebondissements plus ou moins attendus, la vision de Kerr sur l'Allemagne de l'entre deux guerres reste forte et plus réaliste que jamais.
Est très intéressante aussi la présence de Fritz Lang dont le film Metropolis a donné son nom à ce livre, et celle de sa femme, moins connue des non-spécialistes, la scénariste Thea von Harbou, qui relie l'intrigue avec la naissance du scénario de ce très grand film qu'est M le maudit.
Un grand merci à Babelio et aux éditions Seuil pour cette lecture passionnante, qui saisit par sa vision humaniste bien que désespérée ou tout au moins sans illusions, effectuée dans le cadre d'une Masse Critique.
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Cet ultime épisode des enquêtes de Bernie Gunther, inspecteur de la police criminelle allemande, s'explique sans doute par la mort de son créateur, Philipp Kerr, décédé en 2018. Étrangement, ce roman ne clôt pas les aventures de l'antinazi Gunther, conduit par les circonstances à devenir un officier SS, mais s'attache à ses débuts dans la « Kripo », à Berlin, en 1928.
La capitale du Reich, malgré la victoire aux élections des sociaux-démocrates, est en proie à une radicalisation de l'extrême-droite et la poussée des nazis se fait sentir chaque jour davantage dans les rixes qui les opposent aux communistes. le Berlin que décrit Philipp Kerr baigne dans une atmosphère crépusculaire : les invalides de guerre peuplent les rues, les prostitués des deux sexes envahissent les tripots et les boîtes de nuit, la population ouvrière crève de faim dans les taudis des quartiers populaires, la drogue et l'alcool offrent leurs paradis artificiels aux riches comme aux pauvres. Même l'été prend des allures sinistres avec sa chaleur écrasante. Tout le livre est empreint d'une humeur expressionniste – en référence au courant artistique – où se révèlent les horreurs de la guerre de 14-18, les ravages de la crise économique, les traumatismes d'une population entière, comme dans le tableau d'Otto Dix, Les joueurs de skat. Voici pour le contexte du roman et sa couleur très sombre. L'intrigue, elle, tourne autour de deux séries de meurtres qui toucheront des prostituées occasionnelles, puis des « gueules cassées ».
J'ai découvert Philipp Kerr avec ce polar historique très bien écrit. le soin apporté à la restitution du Berlin des années 20 se traduit, inversement, par un affaiblissement des ressorts de l'intrigue. Kerr veut nous faire croiser des politiciens, des scénaristes, des peintres, des artistes et, du coup, Bernie Gunther – déjà ralenti par sa consommation d'alcool – prend tout son temps pour courir après les meurtriers.
Metropolis, le titre du roman, renvoie à l'oeuvre dystopique de Fritz Lang, tout en annonçant M le Maudit, idée scénaristique qui aurait été soufflée par Gunther à Thea von Harbou, la femme du cinéaste. le livre de Kerr, malgré ses qualités, s'éparpille dans les références – aussi justes et pertinentes soient-elles – au détriment d'un traitement plus rythmé de l'intrigue qui passe au second plan et dont le dénouement m'a laissé presque indifférente.
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Le dernier livre de Philip Kerr où on retrouve Bernie Kunther lors de ces premières enquêtes. On se trouve plongés dans le Berlin d'entre deux guerres. Un Berlin gloque, misérable.... Comme d'habitude, Kerr nous plonge bien dans cette ambiance, on y est: les sons, les odeurs... tout peut-être imaginé facilement.
Par contre, j'ai trouvé que l'intrigue était un peu longue à se mettre en place: j'ai trouvé le début très long mais par contre, j'ai dévoré les 100 dernières pages.
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«D'après son agenda, il doit se rendre à l'Opéra-comique vendredi soir, donc, s'il est mort, il a encore le temps de se faire rembourser.»
Bernie Gunther reprend du service dans le Berlin des années 30 ; la capitale prussienne dépravée, violente, stimulante où les estropiés de la grande guerre disputent le trottoir des prostituées, veuves de guerre ou réfugiées russes, sert de théâtre à ce polar historique quatorzième et dernier de la série.

Comme à l'accoutumée l'écossais Philipp Kerr (1956 – 2018) produit un livre bien réalisé, rythmé et intéressant malgré quelques invraisemblance avec cette capacité à « écrire entre les lignes de l'histoire » en respectant scrupuleusement les personnages et les faits.

Ce dernier opus posthume mettant en scène Bernie au début de sa carrière ravira les afficionados mais ses faiblesses nous porte à conseiller la Trilogie Berlinoise pour les nouveaux entrants dans le monde Philipp Kerr.

Traduit de l'anglais par Jean Esch


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Bernie, jeune mène sa première enquête en tant qu'inspecteur à la criminelle dans le Berlin d'M le maudit. Un bon polars, moins sarcastique, même si on voit se dessiner la future grande gueule de Gunther.
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Un polar historique qui montre que l'Allemagne n'était pas tendre avec ses soldats

Découvrir Philip Kerr à travers son dernier ouvrage n'a finalement pas été une si mauvaise idée que cela. En effet, l'auteur nous raconte ici les débuts de son héros, Bernie Gunther, qui se retrouve catapulté de manière inattendue de la brigade des moeurs à la Kripo, l'équivalent de notre police criminelle, qui, sous Hitler, se révélera également un outil de répression politique des plus efficaces. Mais au moment où débute l'intrigue, en 1928, ce n'est pas encore le cas même si son chef, Bernhard Weiss, commence déjà à sentir les prémices de la montée d'un courant politique nauséabond et ce ne sont pas ses racines juives qui auraient pu lui laisser penser le contraire. Mais on y reviendra en fin de chronique.

Deux aspects importants dans ce roman : l'intrigue policière mais surtout le contexte historique.

Commençons par l'enquête : on va dire que c'est plutôt classique comme histoire. Bernie Gunther se voit affecté avec ses responsables à l'élucidation du meurtre de plusieurs prostituées retrouvées ni plus ni moins scalpées, ce qui laisse penser à un pervers fétichiste. Cependant, un autre tueur en série semble prendre le relais en s'attaquant, cette fois, aux éclopés de la Grande Guerre condamnés, après l'horreur des tranchées et le sacrifice fait à la mère Patrie, à mendier dans les rues pour pouvoir survivre. L'enquête prend alors deux directions mais laquelle privilégier ? Et y a-t-il un ou deux tueurs en série ? Et c'est bien d'un Bernie Gunther dont avait besoin Philip Kerr pour mener ces deux enquêtes même si l'un de ses supérieurs ne voient pas d'un bon oeil le zèle dont il fait preuve pour mener à bien cette mission. Car oui, Bernie Gunther est l'homme de la situation. Et pourquoi cela ? Tout simplement, parce qu'il fait preuve d'une qualité rare : l'honnêteté. Et quand il s'engage, il ne fait pas les choses à moitié même si c'est pour découvrir qu'une précédente affaire a été bâclée par des collègues ou qu'un gros bonnet de la pègre attend de lui qu'il lui livre le meurtrier de sa fille afin qu'il puisse lui passer définitivement l'envie de récidiver. On apprécie également ce personnage en souffrance qui se réfugie dans l'alcool afin d'oublier son expérience traumatisante sur le front. Ceci est d'autant plus douloureux que cela aura des conséquences sur sa vie amoureuse. Et ça, ben on n'aime pas !

Mais ce qui m'a surtout intéressé dans ce roman, c'est sa dimension historique car il m'a fait découvrir un aspect de l'entre-deux-guerres que j'ignorais totalement. On a toujours tendance à parler des conséquences de la Guerre sur les soldats français mais il est clair que les soldats allemands n'ont pas été mieux lotis voire même se sont pris une double peine. En effet, après la défaite, ils ont dû subir le regard de ceux qui étaient restés bien planqués à l'arrière et qui ont alors vu en eux et en leurs handicaps physiques le souvenir indélébile d'une défaite humiliante pour la nation allemande. Quand on y pense, on se dit que ces pauvres gars (allemands comme français) n'avaient finalement rien demandé à personne avant de se retrouver à patauger dans les tranchées et se sont vus ensuite, en Allemagne, traités comme des moins que rien voire de véritables plaies à faire disparaître pour ne pas souiller l'image naissante de la grande race aryenne prônée déjà à demi-mots par Hitler. Philip Kerr rend bien compte de cette atmosphère particulièrement violente et agressive à l'égard de ces êtres qui tentaient simplement de survivre : les culs-de-jatte, les prostituées (même occasionnelles), les mendiants… C'est glaçant tant on sent, à travers le récit de l'auteur, le poids de la honte qu'on a voulu leur faire porter. On devine ainsi le début des « purges » que mènera par la suite le pouvoir nazi afin, d'une certaine manière, de se purifier de cette société débile et avilissante, aux moeurs dépravées. Je vous recommande la scène du Sing Sing, particulièrement révélatrice de ce qu'abhorraient les adeptes du futur Führer.

Au final, une lecture plutôt agréable mais qui brille plus par la description de son contexte historique que par son intrigue policière plutôt classique.
Lien : https://mespetitsplaisirsamo..
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Dernier roman de la série, publié après le décès de l'auteur
On revient dans le passé, avant la prise de pouvoir des nazis. Bernard Gunther est encore policier et enquête sur une série de crimes.
On retrouve avec beaucoup de plaisir ce personnage et ses commentaires distanciés sur son époque et les travers de ses congénères.
Malgré tout l'histoire n'atteint pas le niveau d'intensité et de drame auquel certains autres tomes de la série nous avaient habitués.
On se sépare donc en douceur de cet enquêteur humain et cynique qui nous a fait découvrir un pan de l'Histoire récente. Belle série.
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Ce livre est sorti opportunément après la mort de l𠆚uteur. J𠆚i du mal à croire qu’il est entièrement de lui. le style n𠆞st pas le même, l’humour cynique de l𠆚uteur n𠆞st pas là et l’histoire moyenne. Ressemble étrangement (ou un peu trop) à celles de Volker Kutscher (Babylon Berlin)... mieux vaut lire « l’offrande grecque » qui vient de sortir en poche
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Bernie Gunther, un privé chez les nazis...

"Je ne suis pas un nazi. Je suis un Allemand. Ce n'est pas la même chose. Un Allemand est un homme qui arrive à surmonter ses pires préjugés. Un nazi, quelqu'un qui les change en lois" On m'a viré de la Kripo en 1934, et comme il faut bien vivre, je me suis retrouvé déguisé en privé dans l'établissement le plus select de Berlin :

Hôtel Savoy
Hôtel Berlin
Hôtel Regent
Hôtel Adlon
Hôtel Otto

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