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Critique de Walden-88


Hé hé hé ! Où est-ce que vous courez comme ça avec ces tronçonneuses ? Et les règles de sécurité alors ! Et toi, où est ton casque de chantier ? Non ça ne va pas du tout, être bûcheron ça ne s'improvise pas. Avant de commencer nous allons donc revoir les bases :
- une grume : tronc de l'arbre abattu, écimé et débarrassé du houppier ainsi que des branches.
- débardage : transport des bois après abattage et façonnage depuis le lieu où ils ont été abattus jusqu'en bordure d'une voie carrossable.
- élinguer : entourer un objet au moyen d'une élingue pour le hisser avec un appareil de levage.
- chaton : mot que les bûcherons employaient dans le temps pour parler d'un gars q'en abattait deux fois plus que les autres.
Bon voilà, je crois que vous êtes prêt à partir tronçonner des arbres dans les forêts de l'Oregon, mais surtout faîtes très attention aux faiseuses de veuves !

L'histoire se déroule dans une petite ville de l'Oregon : Wakonda où on y suit la famille Stamper, qui gère une exploitation forestière. Les personnages de Ken Kesey sont hauts en couleur ! Henry, le patriarche, qui veut "tout mater à grand coup de trique", ferait passer Pépé Jake (de L'oiseau Canadèche de Jim Dodge) pour une bonne soeur. Ses deux fils sont très différents l'un de l'autre. Hank, l'aîné, est le bûcheron par excellence, un géant indestructible, une vraie force de la nature. Il a fait la Corée, adore la baston et détient la plupart des records sportifs de son ancien lycée. Leland dit Lee, le cadet, qui a quitté la demeure des Stamper à l'âge de douze, suivant sa mère sur la côte Est, est le demi-frère de Hank. Il est introverti, passe son temps à lire des livres, a été à l'université de Yale. Lee s'est toujours senti inférieur à son frère et est animé par un désir de vengeance très fort. le clan Stamper, pour faire face à la grève, a besoin de toutes les forces présentes et rappelle donc Lee au bercail pour leur venir en aide.

Dans ce livre les paysages sont grandioses : les forêts, la rivière, les animaux... Cette nature à la fois belle et violente, assassine et assassinée. Et quelquefois j'ai comme une grande idée, c'est aussi une partie de l'histoire des Etats-Unis : une famille coulée dans le moule du vieil Ouest contraint à faire face à l'Amérique nouvelle, à l'Amérique domptée.

Comme dans Vol au-dessus d'un nid de coucou, le côté psychologique des personnages de Kesey est très important. Si on gratte un peu le vernis, on se rend compte qu'il y a une autre couche en dessous. Hank, le frère bourru, est en réalité un homme maladroit qui ne sait pas comment témoigner de l'affection à son frère. Lee, animé par un désir de vengeance, est juste un gamin qui est passé à côté de son enfance et qui a grandi loin des siens.

Il faut également signaler l'habileté avec laquelle l'auteur arrive à tenir en haleine le lecteur sur près de 800 pages (passer de la première à la troisième personne ou changer de narrateur, tout cela dans le même paragraphe). Certaines scènes sont d'une intensité rare, on sent l'odeur de la sciure, les relents d'alcool ou encore le coeur des personnages qui palpite. Comme dans cette scène au Snag, le bar de la ville, où tout le monde attend qu'une bagarre éclate entre Hank et Biggy Newton, un bûcheron de deux mètres qui fait 15 ou 20 kilos de plus que Hank et "ressemble à un ours kodiak qu'on aurait partiellement réussi à raser et à habiller d'une chemise sale".

Ken Kesey a écrit Vol au-dessus d'un nid de coucou en 1962 puis Et quelquefois j'ai comme une grande idée en 1964, il est mort en 2001, pourtant il n'a presque plus rien écrit après ce livre car il a tout donné, il n'avait plus rien dans la plume. En lisant ce roman, vous comprendrez pourquoi...

Je considère ce livre comme un chef-d'oeuvre, certes ce n'est pas une lecture facile mais il y a tout ce que j'aime dans ce roman. Pour moi, l'un des meilleurs livres qu'un Américain ait pu écrire au cours du XXè siècle.
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